Aussi étonnant que cela puisse paraître, ce sont deux pharmaciens de Zenket Essouk qui nous ont parlé de ce couscous que l'on consomme seulement durant le printemps. En fait dans la wilaya de Blida, il existe nombre de traditions gastronomiques spécifiques à chaque saison respectées pour leurs vertus thérapeutiques. Pour revenir à el-hamama, dans l'officine on a acheté l'équivalent d'un kilogramme de hamama pour être consommé au souper. Notre interlocuteur nous signale qu'il y a une différence entre le couscous au helhal, lavande sauvage connu à travers le pays et consommé également au printemps et el-hamama. Celui-ci se compose outre de lavande sauvage mais de plusieurs autres plantes médicinales et comestibles comme tasselgha (le globulaire) , le thym, le genièvre ou aaraar ainsi que d'autres variétés d'herbes comestibles dépassant la dizaine. «Il n'y a que les femmes des montagnes qui savent le préparer pour venir le vendre ici dans la vieille ville», nous explique-t-il. Une fois les herbes cueillies dans la montagne, les feuilles sont pilées jusqu'à obtention d'une pâte liquide noirâtre à laquelle on ajoute juste ce qu'il faut d'eau pour rouler le couscous. Après nous avoir montré la couleur des grains de couscous, brune virant au noir, il affirme que «manger durant ces trois mois el- hamama, c'est comme se prémunir avec un vaccin. Oui, c'est cela, un vrai vaccin !» Quand c'est un monsieur en blouse blanche dont la fonction est de seconder le médecin traitant, on ne peut qu'admettre les propriétés préventives d'el hamama. Au goût amer très prononcé, graissé à l'huile d'olive vierge, on peut manger ce couscous nature pour les plus courageux ou sucré, «même sucré, il garde une saveur âcre.» Il faut savoir choisir la personne qui vient proposer el-hamama à la vente. «J'achète toujours chez la même femme depuis plusieurs années, sachant qu'elle respecte, outre les règles d'hygiène, les proportions», confie-t-il. Sur le chemin du retour, en effet, des femmes descendues des montagnes suggèrent aux passants d'acheter leurs paquets de hamama avant que le printemps ne vienne céder sa place à l'été.