Comportements n Les difficultés dont se plaignent les professeurs relèvent des dérives verbales. Le tutoiement est devenu monnaie courante dans les salles de classe. «Les élèves veulent s?inscrire dans une relation de camaraderie plus que de respect. Mais à l?école, il y a des règles à respecter», explique un professeur de mathématiques au lycée Emir-Abdelkader. «Il y a une génération entre nous, pourtant j?ai l?impression qu?il y a un gouffre», explique Souad M., 29 ans, professeur d?anglais dans le même lycée. «Nous aussi nous faisions des bêtises, mais en douce. Là, ils ne prennent même pas la peine de se cacher», ajoute-t-elle. L?autorité n?inspire plus la crainte. On chahute en classe, dans les couloirs et en cours. Samir, petit bout de chou de 1re année, fait la moue avant d?avouer que, oui, parfois il court en ouvrant les portes, mais «ça c?est rien, c?est pour le délire quand on n?a rien à faire». Un autre phénomène commence à devenir pratique courante dans les lycées : les graffitis. Un peu partout sur les murs des lycées, on trouve des expressions plus ou moins vulgaires. Mais elles portent toutes un message : l?ennui, la haine, le marasme. «Je peux tolérer un message social ou politique, mais nos mômes vont un peu plus loin. Ils n?hésitent pas à écrire sur les murs le nom d?un professeur qu?ils détestent en raison de sa sévérité avec, en dessous, un commentaire sur sa vie privée. Imaginez, un jour j?ai trouvé mon nom avec le mot suivant : ?Elle est divorcée et elle cherche un mari !? J?ai dû envoyer un ami le soir pour l?effacer... Mais le mal était déjà fait. Longtemps, tout le lycée ne parlait que de cela », raconte une enseignante. Certains élèves, aussi, n?éprouvent aucune honte à afficher leurs sentiments d?amour ou de haine envers leur camarades sur les murs : je t?aime Mlle Y. ; X. est toxicomane et revendeur de drogue..., peut-on lire sur le mur d?un lycée de la banlieue d?Alger. Selon les professeurs et les parents d?élèves, ces comportements sont souvent liés à un phénomène d?échec scolaire. Certains élèves se sentent rejetés dès le début de l?année et ne voient d?autre issue que le chahut, la désobéissance, le rejet? «On est des futurs chômeurs», lance Souad, une élève de 3e année. Les professeurs, eux, sont parfois désarmés quand ils s?aperçoivent que certains ne savent ni lire ni écrire correctement en terminale, ou adoptent une attitude enfantine de rejet en cas de difficulté de résolution d?un problème. Certains élèves arrivent en classe sans affaires, ni livre ni cahier, et s?interpellent mutuellement au point de gêner le déroulement du cours.