Elle n'est pas un effet de mode, cette tendance émergente en forme de tir javeloté à cible incertaine. Pour le moment, et pour autant que cette tendance a les apparences d'un effet de mode, elle se situe dans le périmètre mouvant des systèmes politiques occidentaux. Les partisans de l'anti-système y ont assurément le vent en poupe et la logique voudrait qu'on s'interrogeât d'abord sur le sens de ce vent avant de scruter la girouette. Surtout quand, dans la tempête qui se lève, le coup de blizzard succède à l'ouragan. Sans rapport avec le réchauffement climatique, une météo politique très incertaine déjoue les pronostics et fait un pied de nez aux sondeurs prévisionnistes. Aux Etats-Unis, réputé première démocratie du monde, un typhon aveuglant tous les radars vient d'installer au pouvoir l'incongru Donald Trump. Tendance lourde ? Jeudi, en France, un coup de blizzard tout aussi inattendu est venu rebattre les cartes déjà fortement brouillées d'une situation à lisibilité politique au jour le jour. Fait unique dans les annales de la vie politique française, le président François Hollande prend tout le monde de court en se déclarant non candidat à la prochaine présidentielle qui a lieu dans moins de cinq mois. Pour un coup de tonnerre de… Brest, c'en est un et des plus tonitruants, même si ce n'est pas dans un ciel des plus sereins. C'est la première fois, sous la cinquième république, qu'un tel événement transgressif des mœurs et usages se produit sous le ciel de l'Hexagone. Mais dans la France de 2016, politiques et citoyens-électeurs n'arrêtent pas de se chercher et de se faire fouetter par des vents contraires. En fait, une quête plus qu'une recherche. Plus peut-être que pour les Etats-Unis sous la prochaine présidence de l'imprévisible et limité culturellement Donald Trump, dans la France divisée et subdivisée, attaquée dans ses gènes par un discours identitaire qui vise clairement à faire exploser les poudrières, dans cette France trop tiraillée, les conflits intercommunautaires, voire des petites guerres civiles ne sont pas une vue de l'esprit. Dans un tel contexte, la décision de François Hollande est à la fois triste et courageuse. Face à l'adversité, des siens d'abord, n'eût-il pas gagné à descendre dans l'arène sabre au clair ? Aux Brutus qui lui ont porté l'estocade, il a préféré couper l'herbe sous les pieds en se portant pâle pour l'Elysée : «Entretuez-vous, mais le moment venu je saurai qui soutenir.» Mais une fois qu'on dit cela, on a toujours rien dit des périls, très sérieux qui menacent la France. Plus grave, le Parti socialiste (PS) qui a fait élire Hollande en 2012, est livré aux égos de jeunes loups impatients et à une vieille garde assez en mal d'imagination. Pendant ce temps, Marine Le Pen, la patronne du parti de l'extrême droite (FN) opte pour un attentisme d'où elle ne sortira que pour ramasser les dividendes. Attitude des plus louches, d'autant plus que, faisant ami-ami avec les musulmans, elle s'est découvert des atomes crochus avec ceux qu'elle vouait aux gémonies il n'y a pas si longtemps. Elle veut ramasser une mise totale. Mais elle devra d'abord détruire la droite «réconciliée» avant les socialistes. La vieille droite, elle, a provisoirement retrouvé un semblant d'unité avec François Fillon sorti vainqueur haut la main de la primaire. Reste-t-il de la place pour un candidat de gauche, Valls, Montebourg, Mélenchon ou n'importe qui d'autre ? C'est encore une question de vent et de météo, car comme disait Guillaume d'Orange, «il n'y a point de vent favorable pour qui ne sait où aller». A. S.