La cohésion entre les Algériens et leur armée, une épine dans la gorge des ennemis de l'Algérie    Dans les relations internationales, ils n'existent pas de sentiments mais que des intérêts    « La superficie dédiée aux cultures stratégiques est en nette augmentation »    Ce pays qui est le mien…    Trois décès liés au syndrome de Guillain-Barré    CHAN-2024 Les Fennecs passent à côté des trois points    L'Algérie remporte douze médailles, dont 4 en or à Lagos    La Protection civile poursuit ses efforts pour éteindre les feux de forêt dans certaines wilayas du pays    Gemini invente les contes du soir    CSJ : conférence préparatoire à la 2e édition du camp des créateurs de contenu    Natation / Traversée de la Baie d'Alger : 189 nageurs engagés dans la 3e édition    Le ministère de la Poste contribue à l'animation des camps d'été avec un programme éducatif et de sensibilisation    Début des travaux de la 24e Conférence des scouts arabes des femmes guides    Accord pour la création d'une clinique de thérapie cellulaire à Alger    Sidi Bel-Abbes: appel à mettre en lumière les œuvres artistiques du Raï authentique    Mascara : inhumation du moudjahid Boufarah Abdelkader    Athlétisme/Continental Silver Tour - Meeting TIPOS P-T-S: l'Algérien Yasser Triki remporte le concours du triple saut    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'alourdit à 61.369 martyrs et 152.850 blessés    Le soutien et l'accompagnement de la femme rurale au centre des priorités du secteur de la Solidarité nationale    CRA: campagne nationale de formation aux premiers secours    Guterres se dit "préoccupé" par le plan sioniste visant l'occupation totale de Ghaza    Ségolène Royal fustige le Président français et dénonce sa "carte polémique" avec l'Algérie    Cyclisme/Classement continental: l'Algérie se hisse à la 2e place africaine    Mascara: La bataille de "Djebel Stamboul", un haut fait d'armes de la glorieuse Guerre de libération    Souk El Tenine refait ses surfaces urbaines en peau neuve    Chantage à l'antisémitisme pour justifier le Palestinocide    La solution vapeur pour un lavage sans traces    CHAN-2025 Une course pour un trophée    Réunion de coordination sur la santé publique et l'environnement    L'APN prend part au Sultanat d'Oman aux travaux de l'AG de l'Union des scouts parlementaires arabes    500 kg de kif traité saisis en une semaine    « Hommage à Abdelhamid Mehri : Un homme d'Etat, une conscience nationale »    Voyage au cœur d'un trésor vivant...    Boudjemaa met en avant les réformes structurelles et la modernisation du système judiciaire    Abdelmadjid Tebboune préside la cérémonie    Le président de la République honore les retraités de l'Armée et leurs familles    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'internationalisme libéral appartient-il au passé ?
Publié dans La Tribune le 09 - 03 - 2017

Il y a cent ans ce mois-ci, le président américain Woodrow Wilson était confronté à la décision difficile de l'entrée dans la Première Guerre mondiale. Quelques mois plus tôt, il avait obtenu la réélection en faisant notamment campagne sur une politique de neutralité, qu'il s'apprêtait désormais à abandonner, de même que son slogan «America first». Aujourd'hui, pour la première fois en plus de 80 ans, un président américain reprend cette formule, en promouvant toutefois une politique étrangère directement contraire à la doctrine adoptée par Wilson.
Il y a cent ans ce mois-ci, le président américain Woodrow Wilson était confronté à la décision difficile de l'entrée dans la Première Guerre mondiale. Quelques mois plus tôt, il avait obtenu la réélection en faisant notamment campagne sur une politique de neutralité, qu'il s'apprêtait désormais à abandonner, de même que son slogan «America first». Aujourd'hui, pour la première fois en plus de 80 ans, un président américain reprend cette formule, en promouvant toutefois une politique étrangère directement contraire à la doctrine adoptée par Wilson.
Ce n'est qu'en 1919, après la fin de la guerre, que Wilson définit sa vision d'un «internationalisme libéral» en matière de politique étrangère, consistant à soutenir la sécurité collective et l'ouverture du marché entre les différentes démocraties, le tout régulé par un système d'institutions internationales en fin de compte dépendantes des Etats-Unis. Bien que le Sénat américain rejette dans un premier temps la vision de Wilson, et notamment son soutien à la Société des Nations, Franklin D. Roosevelt parvient à ressusciter l'internationalisme libéral après 1933. Cette conception a depuis contribué à façonner la politique étrangère des présidents américains successifs - jusqu'à l'arrivée de Donald Trump.
L'approche trumpienne de l'«Amérique d'abord» combine mépris de l'Otan, condescendance à l'égard de l'Europe, et raillerie du leadership de l'Allemagne en Europe. Elle se caractérise également par le rejet de l'ouverture économique, Trump ayant décidé d'exfiltrer l'Amérique de l'accord de Partenariat transpacifique, et appelé à la renégociation de l'Accord de libre-échange nord-américain. Le nouveau Président a par ailleurs promis de désengager l'Amérique de l'accord climatique de Paris. À la différence de Wilson, Trump semble n'éprouver aucun intérêt à maintenir et approfondir les relations de l'Amérique avec les autres démocraties. Il apparaît au contraire attiré par les dirigeants autoritaires - en premier lieu desquels le président russe Vladimir Poutine - et laisse bien souvent spectateurs les dirigeants des Etats démocratiques.
Bien entendu, s'il était encore en vie, Wilson approuverait sans doute Trump sur certaines questions, même s'il y apporterait des solutions bien différentes. Aujourd'hui, Wilson s'entendrait probablement avec Trump sur le caractère excessif du niveau d'ouverture sur les marchés mondiaux. Il est en effet problématique que les banques et entreprises américaines soient en mesure d'exporter à leur guise autant de capitaux, de technologies et d'emplois, sans véritable prise en compte des coûts sur le plan national. En revanche, la solution proposée par Wilson consisterait certainement à élaborer et à appliquer des réglementations dans le cadre d'un processus multilatéral conduit par les démocraties. De même, il recommanderait sans doute une politique budgétaire axée sur le bien commun, faisant intervenir un hausse d'impôts pour les entreprises et les ménages les plus fortunés, afin de financer notamment le développement des infrastructures, une éducation de qualité, et une couverture santé universelle. En bref, Wilson appuierait certainement un programme proche de celui que recommandent aujourd'hui la sénatrice démocrate américaine Elizabeth Warren ou le prix Nobel Joseph Stiglitz, en faveur d'un système social abouti et tendant vers une prospérité pour tous. Par opposition, Trump privilégie une baisse d'impôts pour les plus fortunés, et semble vouloir appliquer une sorte de capitalisme d'Etat - pour ne pas dire clientéliste - au travers de politiques protectionnistes et de mécanismes spécifiques incitant les entreprises à fabriquer aux Etats-Unis. Peut-être Wilson s'entendrait-il également avec Trump sur un autre point : nous ne pouvons considérer la démocratie comme une valeur universelle et universellement attrayante. À l'instar de Trump, Wilson s'opposerait probablement aux démarches de construction de nations et d'Etats qui ont animé la politique étrangère américaine sous le mandat des présidents George W. Bush et Barack Obama. Mais ici encore, les différences l'emporteraient sur les similitudes. Trump a décrété que l'Amérique n'avait tout simplement plus besoin de se soucier du reste du monde, à moins d'en tirer une contrepartie directe. Par opposition, Wilson entendait voir se propager la démocratie pour le bien de la paix dans le monde, certes de manière indirecte en œuvrant au travers de la Société des Nations. Il pensait que les institutions internationales, la primauté du droit, les valeurs communes, et la présence d'une élite animée par une vision démocratique, pourraient assurer une sécurité collective et une résolution pacifique des conflits. Wilson aspirait à voir la Pax Americana se changer finalement en Pax Democratica. C'est précisément cette vision qui fonde l'«exceptionnalisme» américain. L'idée ne se limite pas à qualifier les Etats-Unis de «Nation indispensable», pour reprendre la formule de Bill Clinton, qui en raison de sa puissance mondiale devrait participer à toutes les grandes questions internationales, mais également à considérer que l'Amérique peut espérer une certaine déférence de la part des autres Etats, dans la mesure où elle œuvre au-delà de ses propres intérêts afin d'appuyer un ordre international garant de la paix, de la coopération et de la prospérité, notamment entre les démocraties de la planète.
Tous les présidents américains n'ont pas suivi l'exemple de Wilson. La promesse de l'internationalisme libéral a été mise à mal par trois administrations américaines, de l'élection de Warren G. Harding en 1920 jusqu'à l'arrivée de Roosevelt au pouvoir en 1933. Trump élu, cette promesse est à nouveau bafouée. «À compter de ce jour, c'est une nouvelle vision qui gouvernera notre pays», a-t-il proclamé lors de son investiture. «À compter de ce jour, ce sera l'Amérique d'abord.»
Mais la vision de Wilson ne sera sans doute pas si facile à anéantir. Au cours du XXe siècle, la Grande dépression, la Seconde Guerre mondiale et la guerre froide ont nécessairement conduit les dirigeants américains à promouvoir l'internationalisme libéral. Le monde tourmenté d'aujourd'hui pourrait bientôt faire à nouveau valoir avec force les atouts profonds et durables de cette conception.
T. S.
(Traduit de l'anglais par Martin Morel)
*Professeur émérite de science politique à l'université Tufts. Auteur de l'ouvrage récent Why Wilson matters : The origins of American liberal internationalism and its crisis today (Pourquoi Wilson compte : Les origines de l'internationalisme libéral américain et sa crise actuelle).
In project-syndicate.org


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.