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L'effet papillon d'un volcan islandais plonge le monde dans le chaos
Quand une éruption volcanique cause des milliards de dollars de pertes
Publié dans La Tribune le 27 - 04 - 2010

L'heure est déjà au bilan et aux leçons à tirer. Le bilan commence généralement par les pertes enregistrées. En quelques jours, le nuage de poussières noires a paralysé l'Europe, le continent qui concentre le plus fort trafic aérien au monde : 313 aéroports fermés, 63 000 vols annulés et 6,8 millions de passagers bloqués. Les rendez-vous manqués, il y en a eu beaucoup. Un battement de papillon en Islande, et le monde s'affole. Les conséquences de l'éruption volcanique sont aussi nombreuses que variées. Ainsi la cérémonie des obsèques du président polonais Lech Kaczynski s'est-elle déroulée sans la présence de nombreux présidents qui avaient prévu d'y assister. Idem pour la conférence d'Alger sur le gaz liquéfié et la conférence internationale sur le désarmement nucléaire à Téhéran. La réunion entre l'Union Européenne et le Fonds monétaire international (FMI) sur la situation économique de la Grèce a été tout simplement annulée.
La théorie du chaos
Coïncidence ironique, c'est un météorologue Edward Lorenz, qui évoque pour la première fois l'effet papillon. En 1972, il fait une conférence à l'American Association for the Advancement of Science intitulée : «Prédictibilité : le battement d'ailes d'un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ?» La théorie du chaos ne constitue pas une autre approche des sciences sociales mais s'inscrit naturellement dans la lignée de théories plus générales en
sociologie ou en sciences politiques comme le structuro-fonctionnalisme ou le systémisme. Les outils développés pour l'étude du chaos peuvent ainsi aider à la compréhension des systèmes sociaux ou politiques. Appliquant la théorie du chaos sur les sciences sociales, Mark Michaels a déterminé sept lois fondamentales relatives aux comportements organisationnels et aux systèmes sociaux. Ces lois établissent que des systèmes simples mais dynamiques peuvent devenir complexes. En effet, ils sont bâtis sur un feed-back positif, sont sensibles aux conditions initiales et sont auto-organisationnels. Ces systèmes, toujours selon Michaels, peuvent être contrôlés par le chaos. Prigogine, Erwin Schrödinger, S. Kauffmann et H. Atlan ont démontré certains aspects des lois de Michaels et établi des conditions liées à l'établissement de l'auto-organisation dans les systèmes complexes, telles l'existence d'un état loin de l'équilibre, une certaine résistance au changement ainsi qu'une cohérence du système. Dans l'étude des conflits, il faut mentionner les travaux d'Alvin Saperstein qui s'est intéressé aux systèmes des Etats, à leurs relations et à la prévision en termes de guerre et de paix. Il s'est également intéressé à l'instabilité issue de la crise et des divergences entre les Etats. Cette modélisation doit permettre normalement une certaine prédictibilité à très court terme d'une guerre mais ne permettra jamais, naturellement, de déterminer à l'avance l'issue de celle-ci. M. Wolfson s'est également intéressé à la dynamique non linéaire des conflits internationaux. Dans le domaine des études sur la course aux armements, il faut citer G. Mayer-Kreiss qui s'est attaché à définir des modèles non linéaires pouvant expliquer certains comportements liés à la recherche de la puissance militaire.Pour simplifier une théorie complexe, prenons la maxime de Benjamin Franklin : «A cause du clou, le fer fut perdu. A cause du fer, le cheval fut perdu. A cause du cheval, le cavalier fut perdu. A cause du cavalier, le message fut perdu. A cause du message, la bataille fut perdue. A cause de la bataille, la guerre fut perdue. A cause de la guerre, la liberté
fut perdue. Tout cela pour un simple clou.»Le déterminisme de la théorie du chaos exige qu'une question soit posée : si cela recommençait ? Au moins deux raisons suscitent cette crainte. Premièrement, le dernier réveil du volcan islandais, en 1821, s'était traduit par 13 mois d'éruptions par intermittence. Les scientifiques n'excluent donc pas de nouvelles perturbations tandis que les économistes divergent sur leurs conséquences, entre pertes colossales et adaptation. Deuxièmement, une autre crise du volcan est à prévoir avec l'éruption possible du Katla. Celle-ci serait dix fois plus forte et éjecterait de plus grands panaches de cendres dans les airs. Il est situé à seulement 20 kilomètres de l'Eyjafjallajokul, dans le sud de l'île. Les chercheurs restent toutefois sur leurs gardes. Une éruption volcanique peut provoquer l'explosion d'un volcan voisin, et les trois dernières fois que l'Eyjafjallajokul est entré en éruption, le Katla a fait de même. A l'ère de la mondialisation, le papillon amplifie les crises. La crise du volcan montre encore une fois que la mondialisation est aussi un accélérateur de crise. Un constat déjà établi avec la crise financière commencée aux Etats-Unis et devenue crise économique mondiale, en passant de
l'économie virtuelle à l'économie réelle. Jusqu'à l'été 2008, rappelle Jean-Pierre Robin, le monde pensait que les pays émergents offriraient des pôles de résistance. La théorie du «découplage» est démentie, contrairement à celle de l'effet papillon. Chaque crise peut potentiellement devenue mondiale pour une multitude de raisons. Citons-en une : la mobilité humaine.Les flux humains se déploient à travers 3 grands types d'immigrations. La migration économique qui concerne 180 millions de personnes à la recherche d'un travail, c'est ainsi qu'on voit apparaître des diasporas, la plus importante aujourd'hui étant la diaspora chinoise. Les diasporas sont dues aux filières migratoires, mais elles sont souvent investisseur, donc jouent un rôle actif. On observe aussi la fuite des cerveaux : braim drain. Le second type est la migration politique qui concerne 30 millions de personnes, réfugiés politiques dus aux guerres. L'Afrique est le continent le plus touché. Le troisième relève de la migration touristique : 900 millions de personnes en 2007, ce qui représente moins de 9% de la population. Afin d'illustrer l'effet amplificateur de la mondialisation sur les crises, citons l'étude faite pour le FMI par Jean Pisani-Ferry, directeur du laboratoire d'idées européen Bruegel, qui s'est étonné du «manque de résilience» de l'économie mondiale au choc de la crise du subprime. Les pertes initiales, de «100 milliards de dollars sont insignifiantes, quel qu'en soit le standard, 0,7% du PIB américain, 0,2% du PIB mondial», juge-t-il. Or, les effets de la crise sont dramatiques :- la perte de 50 000 milliards de dollars de richesse nominale, à la Bourse et dans l'immobilier ;- la perte de 4 à 5 points de croissance économique mondiale (par rapport à son potentiel annuel), soit environ 2 500 milliards de dollars ;- 20 millions de chômeurs supplémentaires annoncés par
l'Organisation internationale du travail.
Le papillon était dans le volcan
Le fret aérien ne représente que 5% du trafic marchandises en volume, mais, en valeur, ces mêmes marchandises pèsent 40% du trafic mondial. L'Association américaine de l'industrie du voyage estime les pertes pour l'économie américaine à 650 millions de dollars (484 millions d'euros). En incluant les pertes des aéroports, des hôtels, les jours de travail perdus des voyageurs bloqués, les marchandises périssables, les pièces de rechange non acheminées qui ont engendré des pertes de production, etc., le coût global pour l'Europe atteindra plusieurs milliards d'euros. Ainsi l'Association internationale du transport aérien (IATA) a-t-elle estimé que la crise du volcan islandais a coûté 1,7 milliard de dollars aux compagnies aériennes. Sur les 3 jours les plus touchés, les 17,
18 et 19 avril, les perturbations ont quotidiennement coûté 400 millions de dollars au secteur. Une étude de la banque HSBC évalue à 150 millions d'euros les dommages causés aux seules cinq premières compagnies aériennes.L'IATA estime que l'ampleur de cette crise dépasse celle des jours qui ont suivi le 11 septembre 2001, quand l'espace aérien américain avait été fermé 3 jours durant. Ainsi l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a-t-elle estimé les dégâts directs et indirects du 11-septembre à près de 30 milliards de dollars (22,347 milliards d'euros). Les bilans du nuage de cendres sont partiels pour l'instant. Une étude de Natixis précise que 313 aéroports ont été fermés et 7 millions de personnes bloquées. Elle ajoute que le nombre de vols annulés a été plus important que dans les trois jours qui ont suivi le 11 septembre 2001, où l'espace aérien américain a été fermé.
Pour l'analyste économique Vanessa Rossi, de l'institut de recherche londonien Chatham House, il suffirait d'une baisse d'un cinquième du nombre de voyageurs pour réduire à néant les espoirs de reprise économique de l'Union européenne en 2010. L'effet boule de neige pourrait coûter un à deux points du produit intérieur brut (PIB), ce qui signifie le maintien de la récession.La banque britannique Royal Bank of Scotland (RBS), quant à elle, estime à 500 millions d'euros par jour la perte de productivité liée aux millions de salariés empêchés de se rendre à leur travail par le nuage de cendres volcaniques. La banque relève que, selon les dernières estimations européennes, environ 7 millions de personnes restent coincées à l'étranger, dont la plupart sont raisemblablement des citoyens de l'UE. Deux millions d'entre eux avaient prévu de retourner au travail, soit environ 0,9% de la main-d'œuvre européenne. RBS ajoute que cela pourrait prendre environ trois jours pour que cette main-d'œuvre retourne au travail, ce qui impliquerait une perte de productivité pour l'Europe d'environ un demi-milliard d'euros par jour.Ces pronostics paraissent en revanche prématurés à Simon Tilford, économiste en chef du Centre pour la réforme européenne : il estime que certains secteurs de l'économie vont souffrir plus que d'autres mais que, d'une façon générale, l'UE devrait s'en sortir. Les compagnies aériennes, qui se remettaient difficilement de la crise, seront les plus durement frappées. Face à l'impact de la crise du volcan sur l'industrie du transport aérien, l'IATA appelle les gouvernements à examiner la façon dont ils pourraient dédommager les compagnies pour la perte de revenus engendrée par cette crise, en rappelant que les autorités américaines avaient mobilisé 5 milliards dd dollars en compensation de la fermeture du trafic aérien après le 11 septembre 2001. Il faut dire que l'IATA avait pris publiquement position ces derniers jours contre l'ampleur de l'interdiction de vol qu'elle jugeait largement excessive et fondée sur une méconnaissance de la situation.
Encore l'Etat à la rescousse
La Stratégie internationale de l'ONU pour la réduction des catastrophes (ISDR) appelle de son côté les gouvernements européens à intégrer les risques volcaniques dans leurs politiques et leur législation concernant l'aviation. Par le biais du plan Hyogo pour l'action, un plan de dix ans visant à rendre le monde plus sûr face aux catastrophes provoquées par des dangers naturels et adopté par 168 gouvernements en 2005, l'agence entreprend de garantir une meilleure coordination entre les autorités et les scientifiques.Face à l'ampleur de la crise, les Etats de l'UE ont déjà annoncé leur disposition à intervenir.
La Commission européenne s'est dit prête à envisager un dispositif «similaire à celui mis en place à la suite du 11 septembre». Joaquin Almunia, le commissaire à la concurrence, a néanmoins précisé que «les Etats membres devront démontrer la nécessité de l'aide et s'assurer qu'elle ne constituent pas un soutien excessif par rapport aux entreprises concurrentes».L'octroi de ces aides est prévu par l'article 107 du traité européen «qui permet aux Etats de compenser les préjudices liés aux catastrophes naturelles ou qui sont dus à des événements exceptionnels». La Commission s'est dit prête à clarifier ce texte afin que les gouvernements puissent l'utiliser pour combler les pertes dues au nuage de cendres. Pour que ces aides soient autorisées, l'indemnisation versée devra être non discriminatoire (à toutes les compagnies d'un même Etat), elle doit être limitée au coût constaté au moment de l'interruption du trafic et le montant de l'indemnisation doit être calculé de manière précise et objective pour éviter l'indemnisation excessive. Ces aides ne doivent pas être destinées à renflouer des compagnies aériennes en difficulté avant la crise causée par les cendres du volcan islandais.L'Association internationale du transport aérien note également que certaines économies ont pu être réalisées du fait du maintien au sol des appareils, comme les 110 millions de dollars de facture kérosène en moins chaque jour. Mais il faut en revanche ajouter les frais de prise en charge des passagers bloqués. Concernant les autres activités commerciales, les spécialistes rappellent que 80 à 90% des échanges internationaux se font par voie maritime. Seuls les produits à très forte valeur ajoutée (électronique, pharmaceutique) utilisent le transport aérien. La conséquence sera donc juste un décalage sans réduction des volumes à terme.Daniel Mirza, professeur
d'économie et chercheur au Centre d'études prospectives et d'informations internationales (CEPII), estime que ces pertes macroéconomiques seront partiellement compensées au plan microéconomique. Le creux de croissance subi par les transporteurs aériens est d'ores et déjà récupéré par d'autres acteurs économiques. Eurotunnel, qui fonctionne habituellement à 52% de ses capacités, a tourné à plein, passant de 5 000 à 10 000 voitures jour.Car, en définitive, chaos ou simple crise redondante, dans les grandes difficultés économiques, environnementales ou sanitaires, c'est encore l'Etat qui est appelé en renfort, si libéral et mondialisé puisse être le monde.
L. A. H.


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