«Au titre du soutien au développement culturel, le texte (de la loi de finances complémentaire 2010, ndlr) institue une taxe sur la publicité destinée au financement de l'industrie cinématographique, et décide l'exonération du papier, pour le livre, de la TVA, de même que pour l'accès à Internet et pour l'hébergement de sites Web.» Une décision importante au profit de la production culturelle qui semble souffrir d'un manque de moyens financiers et d'infrastructures. Cependant, la misère culturelle en Algérie est-elle due uniquement au problème de moyens ? La crise multidimensionnelle qui a touché tous les secteurs d'activité n'a pas épargné la sphère culturelle notamment sa dimension humaine. En d'autres termes, il y a comme une stérilité dans la créativité. Le génie créateur qui pouvait pendant les années d'occupation coloniale et pendant les premières années de l'indépendance, couver le vécu de la nation et le synthétiser sous forme artistique, littéraire, cinématographique ou théâtrale, a été castré pendant les années quatre-vingt au nom du conformisme abortif et carrément assassiné pendant les années quatre-vingt-dix au nom d'un puritanisme chimérique. Pourtant, la créativité ne peut s'accommoder d'orientations idéologiques, cultuelles ou politiques au risque de générer des monstruosités et une médiocrité folklorique comme c'est le cas aujourd'hui. La production culturelle régnante est d'une indigence désolante et répulsive qui pousse la jeunesse et les anciennes générations à s'abreuver à d'autres sources dont on apprécie l'esthétique et la qualité même si elles ne reflètent pas le vécu commun aux Algériens et ne satisfont pas leurs besoins intellectuels. Le copinage, le népotisme et l'affairisme dominent la scène culturelle et la production dite abusivement artistique. Certes, la nature a horreur du vide, mais lorsqu'une librairie est transformée en pizzeria, lorsque les salles de cinéma sont à l'abandon, lorsque les galeries d'art sont clandestines, lorsque les feuilletons à l'eau de rose font du mimétisme des navets égyptiens… il y a lieu de penser que la mort de la culture a été programmée. Le secteur privé qui investit dans la production culturelle ne semble être intéressé que par le gain facile grâce à une politique de remplissage et de tout-venant. Le programme télévisuel diffusé pendant ce Ramadhan et pendant les Ramadhans précédents, à quelques exceptions près, est assez éloquent sur le niveau artistique et esthétique qu'on sert aux Algériens. Ces derniers n'ont pas d'autre choix tout comme ils n'ont pas de choix au marché des fruits et légumes. C'est cette culture qui est imposée aux consommateurs : aucun choix, aucune variété dans l'offre et aucune demande de qualité ne peut être satisfaite. Donc, l'indigence de la culture est surtout une affaire de politique culturelle. La renaissance ne peut se réaliser que si la liberté de création est reconnue, consacrée et sacrée. Car le potentiel de la créativité existe mais il est marginalisé parce qu'il refuse la facilité et la médiocrité. A. G.