Photo : Riad Par Faouzia Ababsa L'avant-projet de loi organique relatif à l'information a été finalisé par le département dirigé par M. Nacer Mehal. Le texte, dont nous avons obtenu copie, instaure une autorité de régulation de la presse. Avec de très larges prérogatives, parmi lesquelles la définition des moyens d'application des droits à l'expression aux différents courants d'opinion, la garantie de l'indépendance et la neutralité du service public de la communication. L'autorité de régulation devra veiller, aux termes de cet avant-projet de loi organique, à la qualité des messages diffusés et à la défense et l'émergence d'une culture nationale dans toutes ses dimensions, notamment dans la production et la diffusion de travaux nationaux. Elle doit également veiller à la transparence des règles économiques dans la gestion des entreprises de presse, à éviter le monopole ou la centralisation de plusieurs titres sous influence politique ou financière et idéologique entre les mains d'un seul propriétaire. Ladite autorité aura pour prérogative aussi l'arbitrage concernant la liberté d'expression dans des conflits qui pourraient intervenir entre les responsables des organes et les rédactions. En fait, une sorte d'instance de médiation pour régler les problèmes à l'amiable. Cette autorité assumera également la mission de l'office de diffusion de la presse, alors que cet office devrait être une entité à part, surtout que jusqu'à présent, les pouvoirs publics sont dans l'incapacité de le faire. Mais ce qui capte le plus l'attention dans les missions dévolues à cette autorité de régulation, c'est la prérogative qui lui est attribué de suspendre les publications. En somme, outre le fait qu'elle se superpose au ministère de la communication, elle se substituera à la justice. L'on s'explique très mal qu'une instance de régulation de la presse, composée dans sa majorité par des journalistes, dont le principe est justement de n'interdire aucun journal ou organe de presse, se voit attribuer la mission de réprimer la liberté d'expression. Et contrairement à ce qu'a avancé le ministre de la Communication, les journalistes n'ont pas pris part à la rédaction de l'avant-projet de loi. Des discussions ont certes eu lieu, mais à aucun moment il a été question d'instauration d'une autorité de régulation et de dispositions relatives à l'emprisonnement des journalistes. L'autorité instaurée par ce texte ressemble, à ne pas s'y méprendre, à une ARPT bis qui est chargée de réguler le secteur de la téléphonie mobile, en veillant à ce que les opérateurs n'enfreignent pas le cahier des charges. Or, concernant les journaux, ce sont des productions intellectuelles et non une production de conserves. Ce qui nous amène à dire qu'en guise de régulation de la presse, c'est une autorité de régulation politique. Parce qu'il ne faut pas se voiler la face, cette autorité n'aura aucun moyen et ne pourra en aucun cas s'attaquer justement aux lobbies financiers et économiques qui font intrusion dans le secteur au point de le clochardiser. Des lobbies qui ont apparemment eu gain de cause dans d'autres domaines et ne se laisseront pas faire lorsqu'il s'agira de défendre leur pouvoir d'influence dans les médias. Enfin, le chapitre relatif à l'autorité de régulation ne précise pas si avec les prérogatives qui lui sont dévolues, on n'assistera pas à la disparition pure et simple du ministère de la Communication.