Finances : les réformes initiées ont atteint un stade avancé    Le président iranien appelle à l'arrêt inconditionnel de l'agression sioniste    Journée mondiale des réfugiés: le HCR Algérie appelle à la solidarité et à l'action en faveur des réfugiés sahraouis    BAC 2025: placement de plusieurs individus en détention provisoire, et condamnations à des peines de prison ferme pour fuite de sujets et de réponses    MAE iranien : les négociations à Genève se limitent aux questions nucléaires et régionales    ENTMV : 320 traversées programmées durant la saison estivale    El-Meniaâ : Divers projets pour améliorer le réseau électrique pendant la période estivale    Cour constitutionnelle: constatation de la vacance du poste de président, Mme Leïla Aslaoui assure l'intérim    Le Musée national du moudjahid organise une conférence à l'occasion du 69e anniversaire de la mort en martyr du héros Ahmed Zabana    Signature d'un accord de partenariat entre le ministère de la Formation et l'UNICEF    Lancement de la campagne moisson-battage dans nombre de wilayas de l'Est du pays    Sortie de la 53e promotion de l'Ecole de Commandement et d'Etat-major de Tamenfoust    Oran: des recommandations pour la sauvegarde et la valorisation des archives manuscrites    Réunion de coordination entre le ministère de la Culture et la wilaya d'Alger pour la mise en œuvre du décret portant transfert de l'OREF    Boudjemaa salue les efforts de l'Etat en faveur de l'amélioration de la performance judiciaire et de l'instauration de l'Etat de droit    Organisation de la 17e édition des Portes ouvertes sur le sport militaire à Alger    Festival Cirta des sports équestres: le tent pegging, premier pas vers la généralisation d'un sport nouveau aux niveaux national et régional    Compétitions africaines interclubs : la CAF fixe les dates pour la saison 2025-2026    Bonnes nouvelles pour les femmes au foyer    Donald Trump appelle à la reddition de Téhéran    Le MCA a un point du titre, suspense pour le maintien    Rush sur le Parc de Mostaland    Seize joueurs pour préparer le championnat arabe    Succès retentissant de l'Algeria Bid Round 2024    quels impacts sur la sphère énergétique ?    Un lieu pour l'éveil des enfants à La Haye    Déjouer toutes les machinations et conspirations contre l'Algérie    « Abdelmadjid Tebboune n'a pas accordé d'entretien à des journaux français »    Campagne de sensibilisation autour des menaces sur les récoltes de la tomate industrielle    Les MAE de plusieurs pays arabes et musulmans condamnent    Au cœur des Hauts Plateaux de l'Atlas saharien, Aflou offre bien plus qu'un paysage rude et majestueux    La télévision d'Etat annonce une nouvelle salve de missiles contre l'entité sioniste    L'USMA stoppe l'hémorragie, l'USMK enchaîne    La première journée des épreuves marquée par une bonne organisation dans les wilayas de l'Est du pays    Une date célébrée à travers plusieurs wilayas de l'est du pays    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Combien de Harbi, combien de Stora ?
Publié dans La Tribune le 17 - 03 - 2012

«Toutes les fois qu'un moudjahid disparaît, indépendamment de sa position dans la pyramide de la Révolution, nous enterrons avec lui une partie de l'Histoire, et une information précieuse s'en va si elle ne venait pas à être enregistrée et répertoriée.» L'auteur de ce signal d'alarme, sous forme de constat empreint de triste regret ? Le commandant Abdelkader Mali, alias Abdelaziz Bouteflika, lui-même acteur de la guerre de Libération et présentement chef de son Etat indépendant depuis 1962. Autre exemple, un de ses ministres, Dahou Ould Kablia, lui aussi acteur militaire de la Révolution et toujours président de l'amicale des anciens «malgaches», c'est-à-dire des djounouds de l'ombre du MALG, pense la même chose. Tous les acteurs de la guerre d'Indépendance ont la même foi : un moudjahid qui disparaît sans avoir livré les secrets de sa «boîte noire», c'est le disque dur de la mémoire du Premier Novembre 1954 qui en est d'autant amputée. C'est une bougie, une vigie éclairante qui s'éteint. La biologie étant perpétuellement en œuvre, beaucoup d'acteurs et de porteurs de mémoires ont disparu. En ce cinquantenaire de la Libération, que l'Algérie officielle et l'Algérie civile célèbrent avec une mémoire fragmentée et séquentielle, la question de l'écriture de l'Histoire par les Algériens eux-mêmes est toujours posée, plus que jamais avec une extrême acuité. Cinquante ans après la fin de la colonisation, on est toujours au même constat de carence, c'est-à-dire du travail historique qui reste à faire ou à parfaire. A voir le chef de l'Etat souligner l'impérieux besoin de recueillir, répertorier et traiter les témoignages des combattants de l'ALN et de l'OCFLN encore vivants, on en vient à déduire, tristement, que ce travail n'a pas été fait ou l'a été assez partiellement. On en vient également à se poser la question du comment faire et avec qui le faire ce travail de débriefing des mémoires. Indépendamment, bien sûr, de l'indispensable exploitation des archives d'Etat, des archives de presse, des archives universitaires, des archives disponibles en Algérie et des archives rapatriées en France, notamment les archives de sûreté (armée, police) et autres documents de souveraineté, sans oublier celles qui touchent à la vie quotidienne, l'Administration et le cadastre. Comment faire alors quand l'Algérie dispose de peu d'historiens dont la recherche et la production de travaux sont une vocation et une raison d'être ? Comment faire justement alors qu'existe une crise de vocations et que le Département d'Histoire de l'université algérienne forme de piètres rhéteurs à la place de réels historiens et dispense des formations au rabais sanctionnées, quelle que soit la durée du cycle, par des diplômes démonétisés pour de futurs chômeurs ? On est également tentés de se demander de combien de Mohamed Harbi et de Benjamin Stora l'Algérie dispose-t-elle ? Sur combien d'historiens dignes de ce nom elle peut s'appuyer pour écrire son histoire, autrement que par la célébration ritualisée d'une mémoire officielle ? Ou encore à travers l'expression de mémoires subjectives, c'est-à-dire l'interrogation émotionnelle du vécu, l'évocation d'anecdotes sans valeur scientifique ou de bribes d'histoire qui circulent, d'itinéraires personnels ou de tradition familiale. L'Etat des lieux n'est pas encourageant, il est même attristant. Il n'y a pas aujourd'hui d'école algérienne de l'Histoire, des Hassan Remaoun et autre Daho Djerbal étant deux belles exceptions confirmant la règle d'absence. En 2012, l'Algérie n'a pas d'historiens connus et reconnus, au sens d'études rigoureuses des faits et des événements du passé, d'une construction objective, d'une recherche et d'une exploitation critique des sources. Il n'existe pas aujourd'hui des Mahfoud Kaddache, des Mohamed Harbi, des Mouloud Gaid ou encore des Mohamed Téguia, même si certains d'entre eux ne sont pas aussi prolifiques que les Français Charles André Julien, Charles-Robert Ageron, Gilbert Meynier ou Benjamin Stora. La carence et le défaut se conjuguent aussi, pour ne pas dire surtout, au féminin. Il n'y a pas de Madeleine Rébérioux ou d'Annie Rey-Goldzeiguer
algériennes. Le vide du champ de l'écriture historique et la faiblesse de l'historiographie sont d'autant plus consternants au présent que s'était affirmée durant la période coloniale une école de contre-histoire algérienne. D'abord en arabe, sous la plume d'auteurs issus du mouvement des Ulémas comme Moubarak El Mili, Ahmed Tewfik El Madani et Abderrahmène El Djilali. Ensuite en français, sous la signature d'intellectuels du PPA-MTLD, comme Mohamed Chérif Sahli et Mustapha Lacheraf et, dans leur sillage, Ferhat Abbas. Quant à lui, le président Bouteflika, qui appelle à consigner les témoignages des moudjahidines, a le mérite de le faire, mais son exhortation participe toutefois d'une généreuse profession de foi. Le fond du problème est finalement ailleurs. Il réside dans le statut officiel de la recherche historique, des moyens qui lui sont alloués, de la qualité de l'enseignement de l'Histoire, du nombre d'historiens qualifiés et,
surtout, de la philosophie qui sous-tend l'écriture de l'Histoire. En 2012, l'Histoire reste une affaire d'Etat dans un pays où le débat historique, quand il a lieu, se fait souvent sans les historiens. Un pays amnésique où existe une politique de la mémoire et une politique de l'Histoire. Quand il invite à interroger la mémoire des seuls moudjahidine, le chef de l'Etat confirme implicitement que l'Histoire est toujours l'objet d'enjeux politiques majeurs. En 2012, les historiens algériens qui travaillent au pays, aussi peu nombreux qu'ils soient, travaillent toujours sous la double surveillance du gouvernement et de l'ONM. L'Histoire en Algérie, c'est toute une histoire.
N. K.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.