Le Grand auditorium de l'Unesco accueillera, le 15 juin prochain, un concert exceptionnel qu'animera le mythique orchestre chaâbi El Gusto, porteur d'une forte symbolique de symbiose interconfessionnelle. L'organisation de cette soirée de gala sera dédiée aux «Chibanis» (Pl. de chibani, vieux en arabe dialectal), ces vieux travailleurs migrants du Maghreb venus en France au début des années 1930, a été confiée à Nadia Chouikhi, la présidente d'Uniame, une association basée à Paris et qui se donne pour objectif majeur d'accompagner les malades et les personnes en fin de vie. Nadia Chouikhi a précisé à l'APS que «l'idée, en gestation depuis plus de six mois, est de rendre un hommage à cette catégorie de personnes qui, au soir de leur vie, continuent de raser les murs. Il est temps de leur dire merci pour leur labeur, et d'avoir légué à la postérité un savoir-faire dont la France d'aujourd'hui pourrait s'enorgueillir». Pour la présidente de l'association, qui affirme promouvoir la concorde et l'humanisme, faire rencontrer d'anciens musiciens avec de vieux immigrés participe d'une volonté de s'acquitter de la dette de reconnaissance envers les «Chibanis». Créée avant la guerre de libération nationale, la troupe El-Gusto, composée de musiciens juifs et musulmans, chante la nostalgie des amours perdus et la joie de vivre altérée. Partis d'Algérie et dispersés après le recouvrement de l'indépendance, les membres encore vivants, soit près d'une quarantaine, se retrouvent un demi-siècle plus tard et recomposent l'orchestre qui enchaîne les concerts et les sorties d'albums. L'orchestre, qui a été réuni sur scène une première fois en 2006 au Théâtre national algérien, s'était produit les 9 et 10 janvier 2012 à Paris, deux concerts programmés pour accompagner la sortie dans la capitale française du long-métrage «El-Gusto», réalisé par l'Algérienne Safinez Bousbia, marquant des retrouvailles après plus de quarante ans entre ces musiciens. La présidente d'Uniame a insisté sur le fait que «ces musiciens, tant juifs que musulmans, ont eux aussi souffert des affres de l'exil et de la séparation. Ils auront en face d'eux une partie d'un public de leur génération qui a enduré pratiquement les mêmes souffrances». Elle a également souligné que «le premier lieu de rencontre de ces musiciens, la Casbah d'Alger, est classé patrimoine mondial par L'Unesco. Le choix du siège de l'organisation onusienne à Paris n'est pas fortuit. Ce lieu symbolique incarne la paix que nous souhaitons entre les peuples». S. B.
