Quelque 25 000 Sétifiens ont participé, hier, à une marche de la fidélité pour commémorer les événements survenus le 08 mai 1945, puis les jours et les semaines qui suivirent cette date, à savoir les massacres perpétrés par les forces d'occupation ainsi que les milices coloniales. En effet, les Sétifiens ont emprunté le même itinéraire qu'ont emprunté les Algériens il y a tout juste 65 ans. Cependant, le cortège a démarré de la mosquée Abu Dhar Al-Ghaffari, qui est située au coeur de l'ex-faubourg de la Gare, qui avait regroupé des milliers d'Algériens, qui avaient répondu à l'appel du Parti du Peuple Algérien (PPA) et des Amis du Manifeste et de la Liberté (AML), pour rejoindre, au centre-ville, la stèle érigée à la mémoire du premier martyr de ces massacres, M. Bouzid Saâl. D'ailleurs, la marche se voulait pacifique, même si les manifestants, sur leur chemin vers le Monument aux morts pour y déposer une gerbe de fleurs à la mémoire des victimes de la Seconde Guerre mondiale, entendaient crier leur soif de liberté, c'était un cri noyé dans le sang de 45.000 algériens. Par ailleurs, d'autres responsables d'Etat tels que le ministre des Moudjahidine, M. Mohamed-Cherif Abbas et le Secrétaire d'Etat chargé de la communication, M. Azeddine Mihoubi, ont participé à cette marche ainsi que des responsables d'Organisations nationales, de nombreuses personnalités, des Moudjahidine et quelques témoins de ces douloureux événements précédés de jeunes scouts entonnant des chants patriotiques, dont ''Hayou Chamal Ifriqia'' et ''Min Djibalina'', suivis de milliers de Sétifiens, hommes, femmes et enfants. En outre, Mme Annie Steiner, âgée de 82 ans, qui est la grande Moudjahida et qui était militante active de la zone autonome d'Alger, a tenu à participer à l'événement, pour dire à nouveau "son affection et son admiration pour toutes celles et tous ceux qui sont morts pour que vive l'Algérie". Soutenue par de jeunes scouts, elle a également tenu à se recueillir devant la stèle de Bouzid Saâl et a prononcé quelques mots en sa mémoire. "Je suis émue mais fière et heureuse, car le jeune homme qui est tombé à cet endroit, est mort pour un drapeau, pour un seul drapeau, et aujourd'hui j'en vois des milliers autour de moi", a-t-elle dit. Pour la cause algérienne, elle a connu durant 5 ans les prisons d'El Harrach, de Serkadji et plusieurs autres lieux de détention. Aussi, il y avait M. Layachi Guetrani, âgé de 71 ans, qui a avoué que ses souvenirs, contrairement à Mme Steiner, était un peu flous. Car il y a si longtemps alors qu'il n'était qu'un enfant puisqu'il n'avait que 6 ans. Même s'il prétend se rappeler vaguement de gens qui couraient dans tous les sens, ce qu'il n'oubliera pas, ce qui reste gravé à jamais dans ses souvenirs. D'ailleurs, il le raconte la voix tremblante "en courant pour rentrer chez moi, je heurtai une masse, sur le sol, c'était un jeune homme mort, baignant dans une mare de sang. Je vois encore le rictus que formaient ses dents et il m'arrive encore aujourd'hui de le revoir en rêve", a-t-il dit. Plusieurs se mettent devant la stèle de Bouzid Saâl pour prendre des photos de souvenirs pour leurs amis comme le docteur Habiba Aloui qui dit habiter à Alger "je suis de passage à Sétif, cette belle ville, où je suis émerveillée devant tant de patriotisme", a-t-elle témoigné. Sur ce, elle se dit interpellée par la date du 8 Mai 1945. "C'est grâce à tous ces Chouhada, morts entre 1830 et 1962, que je suis là aujourd'hui. Je voulais juste boire un peu d'eau de Aïn Fouara et admirer la statue, puis je me suis trouvée emportée par la ferveur qui anime Sétif, aujourd'hui, et j'en suis fière", a-t-elle ajouté. Par ailleurs, la délégation officielle s'était recueillie, juste avant le coup d'envoi de la marche, au vieux cimetière de Sidi-Saïd, où une fosse commune avait été creusée par les occupants français pour faire disparaître des dizaines de victimes du 8 mai 1945. Après le coup d'envoi d'un semi-marathon international organisé pour cette occasion, le ministre des Moudjahidine et les invités de la wilaya de Sétif se sont rendus, juste avant la clôture de la conférence nationale aux prisons et les camps de détention durant la colonisation, au grand cyberspace d'Algérie Télécom où ils ont visité une exposition de timbres consacrés à la lutte des Algériens pour l'Indépendance (1830-1962) et donné le coup d'envoi de la diffusion d'un timbre à l'effigie de Bouzid Saâl. En outre, une fresque murale qui était dédiée au premier martyr du 8 mai 1945 a été inaugurée à proximité du siège de la commune avant la baptisation d'une rue de la cité El Hidhab du nom du défunt Bachir Boumaza, qui était l'ancien président de la Fondation du 8 Mai 1945 ainsi que l'inauguration du 1er salon maghrébin du livre. Le programme officiel de cette commémoration s'est achevé dans l'après-midi, par la visite d'un site devant abriter un centre de repos des Moudjahidine, à Hammam Sokhna et l'inauguration du musée du Moudjahid, à El Eulma.
