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Passeport et carte d'identité biométriques en Algérie : Consentir à être fiché ou devenir un sans-papiers ?
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 29 - 04 - 2010


Alter Info
En Algérie, beaucoup d'encre commence à couler au sujet du Passeport Electronique et Biométrique (PBE), beaucoup moins, et c'est regrettable, au sujet de la Carte Nationale d'Identité Biométrique Electronique et Sécurisée (CNIBES).
Dressé comme un épouvantail, le chiffon rouge de la photographie (avec ou sans barbe, avec ou sans foulard) a réussi à faire foncer tête baissée les « contre » comme les « pour » dans le panneau et à nous détourner de l'essentiel du sujet, à savoir le fichage de 35 millions d'algériens.
Quel est le véritable objectif de l'opération « papiers biométriques » ? Qui est le réel bénéficiaire de l'opération ? L'Algérie a-t-elle les moyens de faire usage, par elle-même et uniquement pour son propre compte, des informations recueillies ? En avait-elle seulement l'intention il y a quelques semaines ?
Le faux objet du scandale : la photographie
Même si cela semble peu probable (et presque absurde) s'agissant de la barbe d'un voyageur, pourra-t-on demander plus tard à la femme « en foulard » de l'enlever pour contrôler la conformité avec la photo « sans foulard » ? N'en aurait-on pas le droit ? Pour tout contrôle de papiers, cette femme sera, à chaque fois, « dévoilée » aux yeux de celui qui verra son passeport ou sa carte d'identité (le pafiste, le commercial pour acheter un billet d'avion, le guichetier de la banque ou des chèques postaux, le policier à un barrage routier, etc…). Ce regard comparateur, évaluateur, inquisiteur, je le vois déjà. Quand on n'est pas une femme, que l'on ne porte pas de voile, on ne peut pas comprendre. Maladroite et parfaitement inutile (comme nous le verrons plus loin), exiger une photo sans foulard à celle qui le porte, est pour le moins un outrage.
Qui a donc décidé qu'aujourd'hui toutes les algériennes devaient être dévoilées, de gré ou de force, alors qu'on nous matraque à longueur de colonnes, que les islamistes veulent voiler toutes les algériennes, de gré ou de force ? Même Hakim Laâlam s'engouffre dans le sujet lorsqu'il braille de joie le 03 avril à l'intention du ministre de l'Intérieur, » Dévoile Nounou ! Dévoile ! » Quelqu'un finira-t-il enfin par se rappeler que les femmes, même celles qui ont un foulard, peuvent choisir toutes seules ? Sauf si la liberté de choisir ne s'applique qu'à celles qui décident de porter une minijupe, du moins croient-elles l'avoir décidé. Piètre liberté, imposée par les diktats du dieu de la mode, dieu servi par les fantasmes de couturiers et de stylistes… hommes !
Parue dans Le Soir d'Algérie du 10 avril, d ans un dossier baptisé « Le débat se dévoile » (et qui ne dévoile rien, mis à part du saupoudrage journaleux), une interview de Zoubir Arous, sociologue, chercheur au CREAD nous apprend que « le port du foulard est un phénomène purement sociologique… très peu de femmes le portent par conviction religieuse« . Encore une tribune pour quelqu'un qui s'est purement trompé de pays et qui se base très peu sur une étude approfondie du sujet dont il babille.
Aboudjerra Soltani , lui en appelle déjà à la désobéissance civile mais s'il avait pris la peine de consulter la documentation (volumineuse, je le reconnais volontiers) que l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) met en consultation libre sur son site internet, il n'aurait pas eu à faire son Gandhi.
En effet, dans le document en 5 volumes de l'OACI, disponible en six langues et référencé Doc 9303, on peut admirer entre les pages 104 et 106 (de la version française), des portraits autorisés et non autorisés en matière de photographie.
Et ô stupeur, on y voit clairement, entre autres portraits, un barbu ainsi qu'une femme en khimar avec la note suivante : « Les coiffures ne seront pas acceptées, sauf dans les cas où l'autorité nationale compétente en donne spécifiquement l'approbation, notamment pour des motifs religieux, médicaux ou culturels » . C'est clair, y'a pas photo ! Les éléments importants concernent simplement la qualité de la photographie, le style et l'éclairage, le cadrage et l'expression. Et comme bonus, on découvre, qu'à l'instar de la lecture de l'iris, les empreintes digitales sont optionnelles !
On imaginait un bras de fer entre l'OACI et « l'Autorité nationale compétente » sur le sujet du dévoilement des femmes. Il n'en est rien : l'OACI autorise mais en Algérie, c'est « l'Autorité nationale compétente », aidée en cela par Bouabdallah Ghlamallah (le ministre des Affaires Religieuses en personne), qui prononce une fatwa infâme pour « rendre illicite » le port du foulard : « Les femmes voilées doivent se soumettre à la loi« , tonne-t-il. Un comble.
L'OACI a bien intégré dans sa démarche, l'existence de différences culturelles et cultuelles. Pourquoi l'Algérie voudrait-elle donc imposer à ses propres citoyens une « réglementation » plus étriquée quitte à se heurter à des convictions religieuses profondément ancrées ? Alors, incompétence, excès de zèle… ou tactique pour cacher l'objectif réel de l'opération ?
Le véritable objet du scandale : le fichage
Dans L'Expression du 05 avril, on peut lire qu'après le directeur adjoint du FBI, la procession des responsables américains à Alger continue avec la venue du secrétaire d' Etat à la Justice qui signera le 08 avril « un accord d'assistance judiciaire mutuelle avec le gouvernement algérien. C'est ce qu'a indiqué hier John Brown, responsable de la communication à l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Alger, lors d'une conférence de presse. De nombreux secteurs sont concernés par ce futur accord. Il s'agit d'échange d'information sur le terrorisme, le trafic de drogue et tout genre d'activités illicites. Aucun autre détail n'a été divulgué par le responsable américain sur le contenu de cet accord… L'Algérie fournit déjà des informations aux Etats-Unis après la mise en place de mesures de contrôle accrues dans le cadre de la sécurisation du transport aérien. Le même responsable n'a pas été dans la capacité d'expliciter la nature des informations divulguées. S'agit-il des noms des voyageurs, de leurs adresses, de leurs professions ou de leurs orientations politiques ? On n'en saura rien. Ces informations constituent-elles une atteinte à la vie privée ? Même silence. »
On se doute bien que cette signature n'a pu avoir lieu qu'après moult tractations, échanges téléphoniques et épistolaires. Serait-elle le prix de la faveur spéciale consentie pour effacer l'Algérie de la « liste noire » des pays soumis au scanner corporel afin que le gouvernement algérien ne perde pas la face dans cette affaire ? Passé subrepticement à la trappe, le dossier du scanner corporel reste une affaire non réglée même si l'on tente de nous faire croire que tous les pays y sont maintenant soumis et que c'est une victoire de l'Algérie. La procédure a simplement été universellement étendue mais toujours à la population cible de départ. Dorénavant, quelle que soit la couleur de votre passeport, c'est votre nom, votre origine ou votre faciès qui détermineront votre passage au scanner. Et grâce aux passeports biométriques, lisibles sur les machines des aéroports du monde entier, ce sera un vrai jeu d'enfant. Algériens détenteurs d'une double nationalité, vous aussi, vous serez mis à nu !
Pour revenir à l'accord d'assistance judiciaire avec les Etats-Unis, cette information recoupée avec d'autres indices dénote que l'opération « papiers biométriques » semble, pour rester courtois, plutôt nébuleuse :
- Elle a démarré dans la précipitation, sans préparation sérieuse et sans coordination avec les structures d'accueil. Le ministère de l'Intérieur a même dû, pour les consulats à l'étranger, ajourner l'opération du 1er avril au départ ( date on ne peut plus sérieuse ) au 24 novembre prochain.
- Le marché a été attribué (est-il passé par un appel d'offres transparent d'ailleurs ?) à une société française privée qui dans son propre pays s'est vue retirer le même marché pour des raisons de souveraineté nationale. L'Algérie connue pour se cabrer au moindre picotement de sa souveraineté nationale, livre pourtant sans état d'âme aucun, la vie et la mémoire de 35 millions d'algériens à une société étrangère.
- Les recommandations d'une commission chargée de préparer le projet du nouveau passeport, concernant le questionnaire adopté, n'ont pas été prises en considération malgré un travail de plus de 18 mois. » Le ministère a mis en œuvre son propre projet » , déplore un chef de daïra à Alger.
En un mot, » il y a quelque chose de pourri dans le royaume « .
Last but not least, dans le but de « faciliter » l'obtention du PBE et de la CNIBES , on demande au citoyen de renseigner un formulaire ubuesque et de fournir une pleine brouette de papiers aussi pittoresques que le fameux 12-S, délivré une seule fois dans la vie spécialement pour cette occasion, une attestation de travail et même une carte de groupage sanguin. C'est comme si soudain l'Etat algérien n'avait jamais existé, que tous les passeports et cartes d'identité actuellement en circulation étaient des faux et que chaque algérien devait prouver sa citoyenneté grâce à une véritable re-naissance.
Louisa Hanoune considère que c'est une question purement technique. « On n'a pas peur du passeport biométrique », dit-elle. Elle use d'un dicton local pour clarifier sa pensée. Pour elle, » il n'y a que celui qui a le ventre plein de foin qui a peur du feu ». Elle ajoute que les fauteurs de trouble sont dans ce cas de figure ». N'étant ni ex-candidat à la présidentielle, ni surtout candidat à un Etat totalitaire, fût-il trotskiste, j'ai très peur… même si je n'ai pas un brin de foin dans le ventre.
Non, je n'ai rien à cacher. Mais j'ai une vie privée et des souvenirs et j'ai la faiblesse de croire qu'ils n'appartiennent qu'à moi. Moi, individu unique et particulier, pas un NIN ( le fameux numéro d'identification national unique qui sera notre honteux tatouage ). Quel McCarthy m'obligera à donner des noms pour me reconnaître un nom que j'ai toujours eu ? Quelle Stasi voudrait connaître mes trois derniers emplois et employeurs, mes trois meilleurs amis, trois de mes collègues… avec noms, prénoms, adresse, téléphone et e-mail ?! Pourquoi pas aussi trois voisins, ce qui permettrait que chacun puisse être plus aisément triangulé sur une carte. Pour le passeport, qui est un document international, nous aurions peut-être compris certaines « contraintes imposées » de l'extérieur (elles sont finalement inexistantes à la lecture des documents de l'OACI) mais s'agissant de la carte d'identité, un document de « souveraineté interne », on ne saisit pas l'utilité des questions posées.
En mon âme et conscience, je ne puis répondre aux questions du formulaire et je souhaite que mes amis n'aient pas la fâcheuse idée d'inscrire mon nom dans une des cases prévues à cet effet. Quant aux anciens de l'école, je voudrais qu'aucun d'entre eux ne se rappelle de moi. Est-ce naturel de rêver que l'on ne se souvienne pas de vous ?
Chaque citoyen est en droit aujourd'hui de réveiller les députés repus et les partis assoupis. Il est également en droit d'interpeller le ministre de l'Intérieur sur la question de savoir si le gouvernement algérien, sans aucune aide étrangère, a l'intention et les capacités de faire usage des informations qu'il nous contraint à lui fournir, uniquement pour son propre compte et seulement pour le but avoué publiquement. Le ministre de l'Intérieur peut-il garantir sur sa vie que l'intimité de 35 millions d'algériens fixés et englués dans une gigantesque toile d'araignée ( probablement la seule au monde remplie grâce à l'apport bénévole et consentant de citoyens allant paisiblement à l'abattoir ) n'est pas prévue pour alimenter une base de données déjà cédée à une intelligence étrangère, qui elle possède les moyens de l'utiliser au mieux de ses intérêts ? Peut-il prêter serment qu'elle ne servira pas à des fins policières ou politiques ? Je ne suis d'ailleurs pas certain que ses amis de la nomenklatura lui pardonneront quand ils auront compris, qu'eux-mêmes ainsi que leurs enfants, seront vulgairement épinglés comme des insectes dans une collection.
Le ministre de l'Intérieur nous promet même qu'il est prévu à terme, la possibilité pour l'administration d'introduire des services électroniques en ligne. Nous serons encore plus facilement tracés (je n'ai pas dit traqués) : qui a demandé quoi, quand, à partir d'où. On peut aussi pressentir à terme la « cession » mercantile de ce fichier, ou de certaines informations, à des entreprises pour faire du marketing téléphonique, du publipostage, de la publicité ciblée en fonction de critères précis et de choix multiples. On peut imaginer pire : les fuites, les erreurs ( voyons, la machine ne se trompe jamais ! ), la malveillance, la négligence, la curiosité des fonctionnaires (celle due au simple ennui et celle qui est monnayée), les informations transmises par complaisance à un ami, les abus de pouvoir, l'intelligence avec l'ennemi… Big Brother is watching you.
Maître Ali Meziane, avocat au Barreau d'Alger, affirme que la procédure du PBE et de la CNIBES peut être contestée par le citoyen car elle se déroule en dehors du droit régi par des textes à caractère législatif. En attendant que » l'Autorité nationale compétente » revienne à la raison, je vais suivre le conseil gracieux et avisé de cet avocat en ne répondant à aucune question et en vivant sans papiers dans mon propre pays. A ma mort, aucun bureaucrate ne pourra plus me soumettre à la question. On m'enterrera et je disparaîtrai comme j'aurai vécu, libre et anonyme. Le parfait citoyen inconnu.


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