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Le système dégage... et après
Publié dans Le Soir d'Algérie le 10 - 03 - 2019


Par Dr Belmekki Salah, psychiatre
Mon attention s'est longuement attardée sur l'intervention médiatique d'acteurs et de personnalités politiques et sur les déclarations d'intention de candidats à la candidature à la magistrature suprême, dans un contexte vitrifié par le régime politique en place qui persiste à servir un discours chloroformé indéchiffrable par l'analyse politique ou discursive et qui excède toute une nation par l'humiliation ressentie. La réaction populaire en l'état apporte un cinglant démenti à l'illusion.
On peut aisément saisir les causes qui ont poussé les citoyens à sortir dans la rue et à s'émanciper des simulacres, des connivences et de l'inaction. Une scène politique ubuesque que le régime entretient à coups de privilèges et de subventions publiques pour maintenir son hégémonie alors que ses référents idéologiques s'épuisent.
L'histoire des peuples et des nations n'est pas une dialectique heureuse et apaisée, mais une tension politique semée de ruses et d'imprévus qui peuvent précipiter leur destin dans la tragédie de la décomposition et les exemples en ce début de XXIe siècle sont édifiants. Il y a toutes les raisons d'être inquiet devant la montée des violences sociales et la corruption, les communautarismes, la déliquescence des mœurs politiques, la sédition religieuse, le fanatisme et la médiocrité. Le discrédit massif qui touche aux hommes s'étend dangereusement aux institutions. Comme si l'expérience coloniale ou, plus près de nous, dites de la «Tragédie nationale» n'instruisaient nullement les «élites» politiques et les responsables institutionnels, dont le sens et la raison sont totalement anesthésiés par les enjeux immédiats de pouvoir, les rendant incapables de projections dans l'avenir.
A cet état, les causes ne sont pas dans «le libre-arbitre» auquel seraient soumis ces acteurs pour porter le choix entre la liberté et la servitude volontaire comme tente de l'expliquer le «moralisme» ambiant, mais dans des considérations d'ordre bio-politique au sens des rapports entre la subjectivité, la politique et le pouvoir. Dans cette lecture, l'assujettissement est profondément ancré dans l'inconscient psychanalytique et cela n'atténue en rien la capacité des responsables dans cet échec.
La déclaration institutive de Novembre était un minimum qui permettait à tous les courants de se reconnaître pour dépasser la crise politique du mouvement national, mais elle constituait surtout un basculement radical du rapport politique colons/colonisés pour faire accéder ces derniers à la dignité de la politique dans ce qu'elle a de valeurs républicaines et démocratiques. Ses révolutionnaires avaient un rapport à l'histoire et à l'ancrage loin des utopies génocidaires du siècle, conscients de la réalité de l'extrême pauvreté morale et matérielle du peuple algérien qui expliquerait le caractère social et les principes islamiques de cette déclaration. Contextualiser et expliciter cette déclaration reste un enjeu politique d'actualité. Les principes islamiques contenus dans cette déclaration ne sont pas dans un rapport théologico-politique qui briderait son caractère radicalement moderne, mais dans un rapport éthique bien au-delà du politique ; le religieux doit sans cesse inquiéter et questionner la finalité de toute entreprise humaine. L'entrisme des islamistes et leur arrogance trouvent dans cet «inexpliqué» les ressources morales et politiques de leur offensive contre la culture algérienne, l'Etat et la société.
La Nation n'a pas encore rendu l'hommage qui revient à la grandeur de Abane Ramdane, un juste parmi les justes ; une intuition prémonitoire source d'analyse rationnelle de la Révolution de la part de l'homme, qui, en affirmant «la primauté du politique sur le militaire», n'aura jamais eu plus raison qu'en ces moments troubles et confus. Il savait que la Révolution charriait des formes modernes et pré-modernes de pouvoir dont il avait anticipé les contradictions et les contraintes en affirmant ce principe. L'histoire et la mémoire gardent intacte la pertinence de ce principe précurseur que la démocratie dans sa forme libérale et dans ses principes universels devra impérativement rétablir.
Feu Aït Ahmed réaffirmait devant le déni de la réalité historique de ceux qui nous dirigent que si nous avions décidé souverainement d'être algériens, c'est parce que nous avions voulu l'être ; un processus révolutionnaire a armé notre volonté collective pour émarger à l'Histoire et la politique par l'autodétermination. Les classes populaires sont parfaitement conscientes de ce fait et conscientes du mépris qu'éprouve pour elle la classe dirigeante, et savent aussi que tout n'est pas permis contrairement à elle qui reste murée dans une anomie culturelle ou un état de non-définition et un vide conceptuel qui rongent gravement la société.
Nous portons une dette trans-générationnelle à l'égard de Novembre dont il faut identifier les contours de la pérennité ; une dette «critique» et non une dette à «l'infini», la première relevant de la maturité critique du politique et la seconde de la sacralité religieuse, dont la confusion des ordres a jusqu'à présent oblitéré l'émergence de la raison critique et du rapport de la société à elle-même. La crise politique que nous endurons est avant tout une crise de transmission et de filiation. La question est alors, d'une part, comment le post-colonialisme a structuré la subalternité après l'indigénat en lieu et place d'une citoyenneté politique ? Et d'autre part, comment l'hégémonie idéologique a structuré la domination politique et économique faisant de la violence un recours toujours possible ? L'enjeu de ces paradoxes est conceptuel, théorique et idéologique confrontés avec la réalité de la société algérienne, et n'est ni dans le pamphlet ni dans le lyrisme stylisé qui grime les confrontations et les occasions perdues et encore moins dans l'égarement idéologique dans la mesure où il tourne au moralisme étriqué.
Il faut apporter un démenti formel à ceux qui prétendent que le peuple algérien, avec ses mœurs et ses croyances, ne serait pas éligible à l'honneur de la démocratie. A ceux-là, il faut répondre que la démocratie est déjà dans la société, chez les femmes qui luttent et qui travaillent, les corporations qui s'organisent et structurent leurs revendications, dans la revendication des droits linguistiques et identitaires, chez les citoyens qui refusent la complicité et luttent contre l'arbitraire, dans autant de conflictualités invisibles qui n'ont pas encore émergé à la visibilité du conflit ouvert.
La révolution passive travaille la société depuis toujours et c'est à la politique de la charger de sens. L'homme politique et l'expert ne détiennent pas à eux seuls les savoirs sur les réalités sociales, si bien que ce qui se passe actuellement objective le décalage de ces derniers par rapport à la société. A ce stade, les classes populaires et la jeunesse en particulier se réapproprient leur «être» politique et indiquent le sens.
Les querelles sémantiques font partie intégrante du débat intellectuel et incitent en permanence à la vigilance démocratique ; les mots, les définitions et les notions influencent durablement le raisonnement politique, les schèmes et les grilles d'analyse. La concaténation du socialisme et de l'islamisme est intenable et si elle est un peu partout, sa définition n'est nulle part. Le concept «militaro-sécuritaire» est plus opérant quand il faut arpenter l'Histoire et la traçabilité des rapports de force politique qui structurent et maintiennent l'hégémonie du régime actuel. L'assassinat d'Abane Ramdane enclenche un engrenage qui se referme sur l'essence même de l'indépendance que sont les libertés et l'exigence démocratique. Faire du pouvoir un «sujet» exclusif du discours obère l'analyse politique et fait de l'acteur du changement une image spéculaire de ce dernier quand il n'endosse pas inconsciemment le statut de «subalterne».
De l'Etat-parti à la démocrature, le pouvoir algérien est totalement emmaillé par la logique de la survie qui consiste à gérer et canaliser les crises au seul bénéfice du régime. Le traitement politique des causes étant risqué, c'est aux conséquences qu'il est réservé.
Dans pareille logique, les forces démocratiques doivent abandonner le modèle révolutionnaire hérité de Novembre et penser une puissance purement destituante, qui ne saurait être captée par la puissance des appareils du régime et des factions et précipité dans la spirale interminable de la violence. Dans ses enjeux et sa substance, la démocratie relève du dissensus politique. Elle est un contentieux durable et une guerre sans armes que se livrent les acteurs civils qui incarnent des courants politiques présents dans la société et la travaillent en permanence, départagée par des règles de jeu régulières et équitables.
Ces institutions sont le lieu de polémiques, de joutes verbales et de diatribes qui se règlent par le vote et le compromis, et pour offrir de véritables alternatives et des choix au peuple souverain, les clivages et les lignes de démarcation sont indispensables. Le dissensus est une mise en scène du conflit qui dessine un espace démocratique de droit. Les divisions sont dans le peuple et l'honneur de la démocratie est de les faire paraître. Le risque du consensus est de voir les extrêmes s'exprimer à sa marge avant de le déborder. Le seul consensus acceptable est une entente sur des valeurs éthico-politiques de la démocratie pluraliste.
Sortir des guerres picrocholines et des sectarismes politiques est l'autre condition. L'une des raisons de leur permanence et de leur survivance est la difficulté à penser le politique comme philosophie, comme méthode et comme projection. La démocratie n'est pas un «Nous» contre un «Eux» négatif. Le conflit se structure autour de valeurs à fort contenu positif, l'émancipation contre les subalternités, l'égalité contre l'inégalité, la vérité contre le mensonge, l'identité positive contre l'identité négative, le peuple contre l'oligarchie. Un combat idéologique en pesant sur les valeurs, la philosophie, la culture et les traditions. Un front politique, économique et culturel. L'unification de la famille démocratique est un impératif politique majeur dans la phase à venir qui nécessite des articulations à différents niveaux.
Il ne s'agit pas de convergence, mais de transformation qui implique une mutation des pratiques et de la perception, et des acteurs charismatiques qui admettent le caractère hétérogène du camp démocratique et sa compatibilité avec une grande démocratie interne.
Collectivement, nous sommes devant des responsabilités historiques qui nous engagent si nous voulons donner un sens à Novembre autre que d'être les otages des prismes postcoloniaux, si nous voulons que cesse la déportation culturelle des Algériens, si nous voulons des libertés et si nous voulons élaborer souverainement des institutions démocratiques pérennes.
B. S.


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