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En France : quand un anti-raciste noir est accusé de racisme
Publié dans Le Soir d'Algérie le 21 - 09 - 2019


Par Zineddine Sekfali
Le sportif Lilian Thuram est réputé dans le monde du football, mais il est aussi fort connu des militants antiracistes. Il a en effet remporté en 1998, avec tous ses brillants coéquipiers «blacks, beurs et blancs», la coupe du monde. Il se consacre depuis quelque temps, avec conviction, courage et persévérance, à la lutte contre le racisme, jadis latent, aujourd'hui manifeste, et qui se répand en France comme un cancer, en même temps que se renforce de façon inquiétante, l'extrême droite, «la plus bête du monde», comme aiment encore à le dire les Français libéraux. Or, Lilian Thuram est en train de devenir pour quelques Français notoirement racistes, leur bouc émissaire chéri – je n'ose pas dire leur tête de Turc bien aimé ! Il serait pour eux le modèle, voire même l'incarnation du «racisme anti-blanc», ce concept nouveau que certains ont inventé pour pourfendre encore plus les noirs et les complexer afin de les faire taire.
Dans certains médias, Thuram fait l'objet de basses et insidieuses attaques, suite à des propos qu'il a tenus à un quotidien italien pour condamner sans ambiguïté, les faits, les gestes et les cris clairement racistes, commis publiquement , dans un stade récemment, par des spectateurs italiens, à l'endroit du joueur de l'AC Milan, Romelu Lukaku qui, comme chacun devrait le savoir, est de nationalité belge et d'origine congolaise. Et en plus de cela, je dirais que Lukaku est «noir-noir !» pour reprendre une expression de l'humoriste française Muriel Robin, expression tirée d'un sketch, où elle joue le rôle d'une mère «française de souche», sidérée lorsque sa fille lui a annoncé qu'elle avait décidé d'épouser un Noir !
L. Thuram qui a sans doute subi dès sa prime enfance, dans la cour de son école ou en classe, puis durant toute son adolescence, dans la rue ainsi que sur les stades, ce racisme «beauf» si particulier aux crétins. Avec beaucoup d'autres, Thuram sait combien ce racisme de bas étage fait mal, combien il blesse, combien il est ignoble et révoltant. Mais les temps et les mœurs ont changé – O tempora, o mores ! – Aujourd'hui on trouve parmi les censeurs de Lilian Thuram, sans doute un gros paquet de «gilets jaunes» et de «sans dents» qui ne veulent pas que «des métèques viennent leur manger leur pain», mais aussi des gens instruits, éduqués et cultivés qui ont lu les délires xénophobes de Charles Maurras académicien en 1936, monarchiste, franc-maçon, vichyste et rédacteur en chef du media L'action Française qui fut longtemps l'organe du mouvement dit national puis ouvertement fasciste. D'autres intellectuels français ont eux aussi versé dans la mouvance raciste et réactionnaire, tels que Maurice Barrès, et Edouard Drumont. Tous ces gens-là ont eu des émules dont certains ont été condamnés à de lourdes peines de prison, à la guillotine ou parfois au poteau d'exécution, à la fin de la guerre 1939-1945.
De nos jours, les gens de la droite française pure et dure, font leur miel des élucubrations racistes du nouvel intellectuel «engagé» Eric Zemmour, et du philosophe et professeur de l'Ecole polytechnique Alain Finkielkraut. Bien sûr, on ne procède plus ouvertement à des ratonnades et on ne lynche plus les noirs comme on procédait jadis dans les colonies ou aux USA. On ne proclame pas l'apartheid, on ne crée pas de groupes de type Ku Klux Klan ni de commandos de tueurs cagoulés. De nos jours, on lynche les gens à la télévision devant le public, certaines chaînes ayant choisi, audimat et buzz obligent, d'organiser de temps à autre à l'approche notamment des rendez-vous électoraux, des émissions avec des «plateaux» qui ressemblent à des chambres d'accusation criminelle, où on livre en pâture aux Français bien nés, un noir ou un arabe ou quelque autre métèque. C'est en fait cela qui est arrivé récemment à Thuram, Des journalistes BCBG ou commentateurs dits sportifs ainsi qu'une ex-ministre de la République et ex-représentante de la Nation, ont accablé Thuram, pour cause de racisme blanc qu'il chercherait à répandre en France. Ce genre d'émissions suintent de méchanceté, de xénophobie et de racisme. Des Français viennent y déverser leur haine contre ceux qui n'ont pas la même couleur de peau que la leur, et ne sont pas de racines judéo-chrétiennes comme eux. Les nazis préféraient, pour probablement éviter de faire référence au judéo-christianisme et ratisser large, parler de la supériorité de race aryenne. On sait où cela a mené des populations entières de Juifs, de Slaves, de Tziganes, de Roms, d'infirmes et de malheureux misérables, etc. On devine que ces débatteurs et leurs téléspectateurs d'un soir, exècrent les blacks et abhorrent les beurs, fussent-ils nés en France, de parents français. Ils excluent du coup, de la Nation française, tous les individus qui ont du sang noir ou arabe dans leurs veines, alors même qu'il est établi historiquement que leurs aïeux ont versé le leur sur les champs de bataille, en 1914-1918 puis en 1939-1944, pour la libération de la France et la liberté des Français.
En réalité, les critiques de L. Thuram reprennent à leur compte – peut-être pour certains d'entre eux, à l'insu de leur plein gré, comme a dit l'autre – le concept préfabriqué de toutes pièces, de «racisme anti-blanc» que certains intellectuels, penseurs et idéologues de l'extrême droite ont théorisé et qu'ils serinent inlassablement, à travers leurs discours, leurs livres et par le biais de certains médias, dans le but de l'instiller profondément dans les cerveaux de leurs concitoyens.
Ces procureurs pervers sont, en plus, d'infâmes hypocrites. Pour faire croire à leur bonne foi et leur objectivité, ils se proclament anti-racistes, condamnent, si besoin est, l'esclavage ou font semblant de le condamner, admettent les méfaits du colonialisme et de l'apartheid, se disent horrifiés par le code de l'indigénat – ensemble de textes législatifs et réglementaires – qui très officiellement, codifiait la discrimination raciale, politique, économique et sociale, et ainsi consacrait légalement la supériorité – ou mieux dit, la suprématie – du Français blanc sur le sujet français de couleur dans un espace géographique immense qui s'étendait de la Cochinchine (actuel Viêt-Nam) au fin fond des îles de l'Atlantique et du Pacifique en passant par les «possessions» de l'Afrique, et à l'Algérie, incluse dans les possessions d'outre-mer, même si par ailleurs, on prétendait dans une sorte de fiction à laquelle tous faisaient semblant d'être attachés, que l'Algérie était un ensemble de départements français au même titre que ceux de la Métropole. Ce sont des intellectuels et des politiques comme ceux qu'on vient de citer qui ont poussé le gouvernement français à commettre cette incroyable bêtise qui a consisté à réhabiliter et absoudre par voie législative le colonialisme(1) pour tous ses méfaits et dont un autre penseur français(2), Albert Memmi, juif d'Afrique du Nord, agrégé de la Sorbonne, a dit : «le colonialisme est une des oppressions majeures de notre temps» et qu'il constituait «une variété du fascisme». Je pense personnellement que le colonialisme et le fascisme sont des frères jumeaux et les enfants de l'Occident. Rappelons ici que le parlement français avait, sous la pression de parlementaires de droite, appelée UMP à l'époque, et d'une bonne partie de l'opinion publique nostalgique des colonies, adopté une loi – la loi du 23 février 2005 – contenant un article clairement révisionniste, qui aurait obligé les maîtres des écoles à enseigner à leurs élèves les bienfaits de la colonisation... Cette disposition fut annulée sur orientation personnelle du Président Chirac. Considérant que cette disposition adoptée par le parlement, relevait constitutionnellement d'une matière qui fait partie du domaine du pouvoir exécutif, elle a été supprimée par un décret n°2006-160 du 15 décembre 2006. Il importe de rappeler à cette occasion que début 2010, plusieurs députés algériens ont déposé à l'APN une proposition de loi incriminant le colonialisme. On ne sait pas ce qu'il est advenu de cette proposition de loi qui avait l'air d'une réaction politique, apparemment très tardive, à la loi française citée ci-dessus. La guerre des lois n'aura pas eu lieu ! Quelle raison d'Etat s'y opposait-elle ? On le saura peut-être un jour...
Je ne saurais terminer cette chronique sans citer trois grands écrivains noirs : Aimé Césaire, Louis Damas et Léopold Senghor.
Aimé Césaire est un noir martiniquais.(3) Il a écrit ceci : «Mains coupées, corps écartelés, gibet, voilà ce qui peuple les allées de l'histoire coloniale….». Dans un poème datant de 1956, donnant libre cours à son émotion, il s'est exclamé :
«Ma mémoire est entourée de sang,
Ma mémoire a sa ceinture de cadavres !».
Louis Damas, le Guyanais qui comprenait que le colonialisme et le fascisme sont des frères jumeaux, avait écrit(4) :
«Bientôt cette idée leur viendra de vouloir
Vous en bouffer du nègre,
À la manière d'Hitler bouffant des juifs
Sept jours fascistes sur sept !».
C'est encore lui qui s'était écrié, comme un jeune rappeur noir d'aujourd'hui ou un banlieusard beur marginalisé et discriminé :
«La haine m'étouffe,
La haine m'oppresse !».
C'est enfin lui qui a lancé ces mots terrifiants, jaillis du plus profond de son être :
«Rien ne saurait calmer autant ma haine,
Qu'une belle mare de sang…»
Quant à Senghor,(5) le Sénégalais, il est l'auteur de cette poignante prière :
«Seigneur Dieu, pardonne à l'Europe blanche,
Et il est vrai, Seigneur, que pendant quatre siècles de Lumières
Elle a jeté la bave et les abois de ses molosses sur mes terres…
Oui Seigneur, pardonne à la France,
Qui dit bien la voie droite,
Et chemine par des sentiers obliques».
Heureusement pour eux qu'ils sont morts. Aujourd'hui, y aurait-il eu des TV pour les traîner dans la boue, sous les sarcasmes de quelques journalistes et de quelque égérie fascisante, comme on le fait sans vergogne pour L. Thuram....
Ces quelques brèves citations de trois témoins irrécusables du racisme blanc qu'ils ont subi et supporté durant de longues années, ne valent-elles pas mieux que je ne sais quelles théories farfelues et quelles vaticinations insensées des nouveaux idéologues de la droite réactionnaire française et autres prétendus faiseurs d'opinions, qu'on fait complaisamment défiler devant les caméras des chaînes de télévision, comme si l'on préparait déjà le peuple français à quelque grande ratonnade ou pogrom, et à tout le moins, à une prochaine révision déchirante de la législation sur l'immigration ?
Z. S.
1) Voir «Absolution et épitaphe» article de Z. S paru dans El Watan du 12 janvier 2006 et Djazairess du même jour.
2) Albert Memmi Portrait du colonisé précédé du portrait du colonisateur Editions Payot 1979.
3) Discours sur le colonialisme 1950 et Cahier d'un retour au pays natal 1938.
4) Pigments 1937 et Black Label 1956.
5) Hosties noires 1948.


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