Oran : sortie de cinq promotions à l'Ecole supérieure d'administration militaire    Face aux tensions budgétaires et pour plus de justice sociale, pour une politique de subventions ciblées    AAPI: Rekkache examine avec le ministre du Commerce omanais les opportunités d'investissement et de partenariat    Rezig appelle les opérateurs économiques à conquérir le marché africain    Téhéran ciblé par des bombardements américains    Attaf s'entretient à Istanbul avec son homologue syrien    Attaf s'entretient à Istanbul avec son homologue bangladais    Un gala pour l'armée sioniste en plein Paris    Triste fin de saison pour le monde sportif algérien    Lutte contre les incendies de forêts: une manœuvre de simulation à Skikda et à Jijel (DGPC)    Les services de sécurité se mobilisent pour assurer la protection des estivants pour l'été 2025    Réunion de coordination pour la mise en œuvre du Décret portant transfert de l'OREF    Le quotidien El Moudjahid lance sa plateforme multimédia à l'occasion du 60e anniversaire de sa création    "Alger, Capitale de la Culture Hassaniya" 2025: de précieux manuscrits historiques et des livres illustrant l'authenticité et la culture du peuple sahraoui    Le Premier ministre reçoit la ministre du Développement social du Sultanat d'Oman    Accident au Stade du 5 juillet: mise en place d'une commission d'enquête sur instruction du Président de la République    Ouverture de la saison estivale 2025 : le wali d'Alger inaugure plusieurs infrastructures    Mouloudji reçoit la ministre du Développement social du Sultanat d'Oman    La 56ème Foire internationale d'Alger s'ouvre lundi, le sultanat d'Oman invité d'honneur    La fantasia, une épopée équestre célébrant un patrimoine ancestral et glorifiant des étapes héroïques de l'histoire de l'Algérie    Athlétisme: coup d'envoi du Championnat National des Epreuves Combinées au SATO du complexe olympique    Le bilan s'alourdit à 3 morts et 81 blessés    Le Parlement arabe salue les efforts de l'UIPA sous la direction de l'Algérie en faveur des causes arabes    La manifestation "Nuit des musées" suscite un engouement du public à Constantine    Iran: "pas de danger" pour la population après les frappes américaines sur le site nucléaire de Fordo    Des chiffres satisfaisants et des projets en perspective pour la Sonelgaz    « Aucune demande d'autorisation n'a été enregistrée jusqu'à présent »    L'US Biskra officialise sa rétrogradation    Quatrième sacre consécutif pour le HBC El-Biar    L'Irak vacille sous la pression régionale    Il y a vingt ans disparaissait l'icône du style « Tindi", Othmane Bali    « Si l'on ne sent plus la douleur des enfants, on n'est plus humain »    Ligue 1 Mobilis: Le MCA sacré, la JSK en Ligue des champions et le NCM relégué    « Abdelmadjid Tebboune n'a pas accordé d'entretien à des journaux français »    Déjouer toutes les machinations et conspirations contre l'Algérie    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les quatorze péchés capitaux de Shahrour
Publié dans Le Soir d'Algérie le 23 - 12 - 2019

Il y a des gens dont on est tellement lassé que sans être pour autant des pousses au crime, nous nous attachons à suivre le moindre de leurs pas, en espérant que ce soit le faux ou le dernier. Celui qui permet aux deux pieds de se retrouver enfin unis dans la quiétude éternelle du tombeau, tout en laissant aux survivants la latitude d'apprécier cette quiétude, d'un autre angle. Nous avons, en revanche, beaucoup d'appréhensions et d'inquiétudes à suivre les pas hésitants de certains aînés, que leur âge avancé n'autorise pas à commettre le moindre excès. Et si par malheur, ils disparaissent au moment où on avait le plus besoin d'eux, ou on s'y attendait le moins, nous nous sentons un peu abandonnés devant l'avenir qui nous attend sans eux. Le penseur syrien Mohamed Shahrour, qui vient de nous quitter à l'âge de 81 ans, était de cette engeance-là, celle qui s'obstine à triompher de l'obscurantisme et de l'ignorance sacrée. Au départ, rien ne destinait cet ingénieur en génie civil, formé en URSS (ce qui servira surtout à le diaboliser), à se lancer dans l'œuvre de sa vie : faire revivre un Islam des lumières. Car, de son point de vue, cet Islam-là existe, a existé, et il n'a pas attendu les âges d'or, catalogués comme tels dans les livres d'histoire, pour exister, mais il suffisait d'aller vers le Coran. Uniquement le Coran.
Mohamed Shahrour était un musulman pratiquant, mais un de ces pratiquants qui ne s'évertuent pas à rendre leur piété visible par des stigmates, évoquant parfois la tâche de Caïn.
Il voulait relire le Coran à la lumière des progrès scientifiques et renouer avec l'Islam des origines, mais un Islam débarrassé des strates, empilées durant des siècles par les théologiens. Il était donc catalogué «coraniste», à l'instar des penseurs égyptiens Djamal Al-Bana et Ahmed Sobhi Mansour, car il voulait retourner au seul Coran et expurger l'Islam de la Sunna. Shahrour était à sa manière un «salafiste», mais il projetait à l'encontre des fondamentalistes d'extirper du patrimoine tous les hadiths sur lesquels s'adosse l'Islam politique de nos jours. En agissant ainsi, Mohamed Shahrour ne contredisait pas les enseignements du Prophète de l'Islam, puisque c'est le Prophète en personne qui a interdit la transcription de ses hadiths. Il craignait, en effet, que ces hadiths ne viennent rivaliser ou entrer en conflit avec le Coran, ce qui est effectivement arrivé après l'ouverture des vannes, sous la dynastie omeyyade. Pour le penseur syrien, ce sont les dynasties omeyyade et abbasside qui ont imposé la Sunna, au détriment du Coran lorsque ces dynasties étaient au faîte de leur puissance politique. Il s'agit donc juste de considérer les hadiths comme des éléments d'histoire.
Shahrour affirme, en effet, qu'il s'agit de revoir de fond en comble les constituants du patrimoine religieux et de les réexaminer à partir de nos connaissances et de nos réalités. Il faudra asseoir de nouvelles bases théologiques, loin des critères et des savoirs qui étaient en vigueur au deuxième et au troisième siècle de l'Hégire, et sans l'intervention des Etats. Aujourd'hui, déplore-t-il, le discours religieux que nous adressons au monde n'est pas celui de l'Islam de la révélation ni celui du message de Mohamed, c'est un discours tout à fait opposé. En plus de son livre le plus célèbre, «Le Livre et le Coran», où il expose sa relecture du Coran, le penseur syrien a plaidé pour la nécessité d'assécher les sources du terrorisme. Malheureusement, beaucoup d'Etats et de dirigeants politiques, qui ont adhéré à cette thématique, se sont cantonnés aux sources de financement et au recrutement d'exécutants. Or, explique-t-il, le terrorisme n'est pas né ex nihilo, mais il se réfère à notre culture et son action ne fait que rééditer des faits intervenus aux premiers âges de l'Islam. Et il ajoute : «Tant que nous continuerons à lire l'Islam de la même manière, nous obtiendrons les mêmes résultats, quelles que soient les appellations, Al-Qaïda, Daesh, Boko Haram, ou autres groupes. Les groupes terroristes se réfèrent aux mêmes textes et aux mêmes exemples.
Le penseur a toujours défendu la primauté du Coran comme source de législation, tout en soulignant que l'Islam laisse une grande liberté de manœuvre à l'homme sur ce chapitre. Il souligne qu'il y a dans le Coran de quoi alimenter toutes législations sur terre, alors que dans le patrimoine théologique hérité, nous trouvons des dispositions qui contredisent le Coran.
Outre la réfutation de hadiths, comme source de législation, Mohamed Shahrour a contesté également certaines lectures et exégèses du Coran sur des sujets sensibles, comme l'héritage et les interdits. Il est de notoriété publique que le penseur syrien a soulevé l'ire des conservateurs sur deux sujets : le premier sur l'héritage, en concluant de sa propre lecture du Coran que Dieu a instauré l'égalité entre l'homme et la femme en la matière, contrairement à l'usage. Dans ce domaine, aussi, il s'est inscrit en faux contre la croyance que l'Islam interdit la transmission d'héritage par voie testamentaire. Le second sujet, en reprochant aux théologiens d'avoir péché par excès de zèle, par exemple, en portant le nombre de péchés capitaux (haram) à soixante-dix, alors qu'il n'en a dénombré que quatorze dans le Coran. Quant à la cohabitation du religieux et de la politique, il l'a résumée très clairement : «Le seul pouvoir que possède la religion, c'est celui de la conscience.
S'agissant du pouvoir politique, c'est une autre affaire qui est différente et qui n'a rien à voir avec la religion. Il n'est pas dans les fonctions de l'Etat d'envoyer les gens au paradis ou en enfer, sa fonction se limite aux problèmes d'ici-bas. Et s'il n'est pas possible de séparer la religion de l'Etat, il faut en revanche dissocier la religion de l'Etat.» On comprendra que la disparition d'un tel homme puisse susciter autant d'émotion et de peine que celles que l'on peut ressentir devant la perte d'un être cher. Regrets éternels, Mohamed Shahrour !
A. H.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.