Tout a été dit (et écrit) sur la pièce de théâtre Les Nuées d'Aristophane, notamment qu'elle est dirigée contre Socrate, son enseignement et son «athéisme». La pièce, d'ailleurs, se termine par l'incendie du Pensoir, l'école de Socrate. Les Nuées fut jouée à Athènes pour la première fois en 423 avant J.-C. Socrate y est présenté comme le grand maître des nouveaux savoirs de la sophistique, artificieux et trompeurs. La pièce présente aussi le philosophe comme un personnage distant et hautain, qui rejette la religion grecque traditionnelle pour vénérer ses propres divinités, et qui dirige une école particulière, dans laquelle il enseigne des idées contraires à la morale traditionnelle. La pièce, selon des historiens, a peut-être contribué à alimenter l'hostilité populaire contre Socrate et même conduit à son procès et à sa terrible exécution en 399 av J.-C., après avoir été accusé de rejeter les dieux d'Athènes et de corrompre la jeunesse. Publié en 2015 sur le blog de l'éditeur Oxford University Press (OUP blog), l'article «Did comedy kill Socrates?» («La comédie a-t-elle tué Socrate?») de Stephen Halliwell, professeur de grec à l'Université St Andrews (Ecosse), montre que ce n'est pas si simple. Pour l'auteur, un premier problème se pose déjà : Platon a écrit l'Apologie de Socrate 25 ans après la seule et unique représentation des Nuées. En 423 av. J.-C., Platon n'était âgé que de quatre ans environ. Il est donc impossible qu'il ait pu percevoir la façon dont la pièce avait été reçue à cette époque. En outre et durant ces vingt-cinq années d'intervalle, une grande partie des personnes qui avaient assisté à la représentation des Nuées devaient être décédées, surtout avec les morts considérables causées par la guerre du Péloponnèse. Aussi, pour Stephen Halliwell, les jurés qui avaient condamné Socrate en 399 (avant J.-C.) avaient très peu de chances, voire aucune de connaître la comédie d'Aristophane. Aussi, le philosophe avait été certainement condamné pour d'autres raisons. Plus de 2000 ans après, Les Nuées continuent à faire couler beaucoup d'encre ! K. B . [email protected]