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Le lent retour à la vie normale
Larbaâ-Nath-Irathen
Publié dans Le Soir d'Algérie le 21 - 08 - 2021


Reportage de Saïd Aït Mebarek
À Larbaâ-Nath-Irathen et dans tous les villages de cette commune touchés par l'incendie dévastateur d'il y a plus d'une semaine, la vie reprend peu à peu ses droits. Difficilement, car les effets du traumatisme des jours et des nuits cauchemardesques et d'épouvante engendrés par le combat contre les flammes sont toujours vivaces et hantent encore les esprits.
Un paysage lunaire
En arpentant la route sinueuse qui monte vers Larbaâ-Nath-Irathen, à travers le massif forestier de Varkmouch, on est frappé par le spectacle de désolation causé par l'énorme incendie qui s'est déclenché en début de soirée du 9 août 2021. Partout où le regard se pose, les ravages du feu sont visibles, renvoyant la vision d'un paysage lunaire et décharné.
Sur le versant de cette dense forêt, à cheval entre les territoires des communes des Aït Yenni et de l'ex Fort-National, surplombant le plateau de Takhoukht et qui monte jusqu'à la lisière des villages Aït Frah, Aït Atteli et Taourirt-Mokrane, et plus à l'est vers Ikhlidjene et Aït Aougacha, on ne voit que cendres et une succession de vallons parcourus par l'incendie. Les flammes ont entièrement consumé le couvert végétal. Rares sont les arbres qui ont résisté à la puissance du feu. Sous l'effet de la chaleur qui s'est insinuée profondément dans le sol, les racines des oléastres, chênes et autres espèces d'arbres qui peuplent cette écosystème forestier ont implosé, laissant entrevoir à la surface du sol des trous béants couverts de cendre blanche.
Ikhlidjène, les survivants de l'apocalypse
A la lisière et à l'intérieur des villages, les traces du feu sont aussi visibles. Comme en témoignent les nombreuses carcasses de véhicules calcinés et d'habitations qui étaient la proie des flammes que nous avions aperçus jeudi dernier sur la route qui mène vers Ikhlidjène qui compte dix-neuf morts dont les sépultures sont rassemblées dans un même carre aménagé dans un angle du village. Sur les plaques placées au-dessus des tombes, sont visibles les noms des victimes, toutes issues de mêmes familles, trois au total, dont celle de la maman retrouvée morte, avec dans ses bras, ses deux filles adolescentes. L'une d'elles, Sarah, venait juste de décrocher son bac et se préparait à faire son inscription à l'université.
Encore immergés dans cette atmosphère chargée de détresse et de tristesse, les habitants des quatre hameaux, Imathoukene, Aït Ali, Laala et Agoulmime, qui constituent l'agglomération villageoise des Ikhlidène, tentent, peu à peu, de se remettre de leur pénible épreuve.
Dans le récit que beaucoup nous ont fait des terribles événements vécus dans la journée du 10 août 2021 ainsi que des jours qui ont suivi le drame, on sent l'énorme poids du traumatisme que certains d'entre eux mettront sans doute encore beaucoup de temps à évacuer. La description des scènes d'épouvante devant les flammes qui ont tout dévoré sur leur passage, le souvenir des dépouilles calcinées appartenant à des familles entières et recueillies à la lisière du village, reviennent comme une triste litanie dans la bouche des villageois qui se considèrent, à juste titre, comme les survivants d'une véritable apocalypse.
Rencontré à hauteur du village Imathouken, fraction des Ikhlidjène, Akli tente, tant bien que mal, de raconter les faits dont il était, à la fois, l'acteur et le témoin obligé. Mobilisé depuis le début du sinistre, comme de nombreux autres jeunes du village, cet artisan tôlier de profession raconte comment il a participé au combat contre le feu meurtrier au péril de sa vie et de ses biens. Ses deux véhicules ont subi de gros dommages dont l'un a été entièrement calciné, en tentant de sauver des vies. Le récit qu'il fait des événements est émaillé de souvenirs de mort et de l'effroi qui s'est saisi des familles qui tentaient de fuir pour échapper à l'énorme brasier. « J'ai recueilli de mes propres mains des corps de villageois mortellement brûlés. Et c'est en tentant de porter secours à un citoyen de mon village qui avait des problèmes avec son véhicule et que j'ai croisé sur la route au moment où je participais à l'évacuation des familles que ma voiture s'est trouvée piégée par les flammes », témoigne Akli.
Visiblement affecté par l'ampleur du drame et fatigué par les longues heures de mobilisation en tant que membre actif du comité de village et engagé contre le feu qui, raconte-t-il, « est arrivé au village vers 2h du matin alors que beaucoup de ses habitants s'étaient portés au secours de leurs voisins d'Ath Frah, Taourirt-Mokrane et Ath Atteli, qui étaient déjà en proie aux flamme », Mohand Belkakem témoigne lui aussi de la détresse ressentie par les villageois cernés de partout par les flammes et qui ont fini par emporter une vingtaine des leurs et causé des brûlures graves à presque une dizaine d'autres. « Le feu nous a laissé juste le temps de donner l'alerte et de commencer à évacuer les familles vers une salle des fêtes située sur les hauteurs du village, aux abords de la RN15. En l'espace d'une vingtaine de minutes, le village a été comme pris en étau par l'énorme fournaise qui ne s'était éteinte que vers le milieu de 'l'après-midi », raconte encore Mohand qui parle de scènes inimaginables de panique et de sauve-qui-peut qui s'était emparée de tout le monde. « C'était dans ces conditions que beaucoup de victimes ont été enregistrées », raconte-t-il.
Le décompte macabre est lourd: au total, le village a enregistré 19 victimes, dont 18 ont été identifiées et enterrées. Des dizaines de blessés ont été déplorés, certains légèrement et soignés mais beaucoup sont admis en soins intensifs à l'Institut Pasteur et l'hôpital des grands brûlés de Douéra à Alger. Il y a des villageois qui n'ont pas encore donné signe de vie et qu'on considère comme étant disparus. Au village, on veut croire à l'espoir de les voir revenir. « Ce sont, dit Mohand, des personnes qui se sont peut-être réfugiées ailleurs, et on attend qu'elles se manifestent, dans le cas contraire... »
La solidarité toujours et encore
La longue attente est amplifiée par le drame mais à Ikhlidjène, on fait preuve de résilience et de courage. El les caravanes de solidarité qui ne cessent d'affluer vers les lieux dès le lendemain du drame constituent un réconfort pour les villageois qui font tout pour sortir de l'ornière de la fatalité qui les accable pour se reconstruire et reprendre le cours normal de la vie.
Une entreprise à laquelle s'est attelée une psychologue bénévole qui s'est livrée à des séances d'écoute avec certains villageois et surtout des enfants fortement fragilisés par les tragiques événements.
«Il y a un fort traumatisme chez tout le monde qui ne manquera pas de leur laisser des séquelles et qui demanderont du temps pour s'estomper. Il se peut même qu'elles ne le seront jamais», a confié la psychologue à un groupe de journalistes présents sur place. Ce drame humain appelle en urgence «une prise en charge psychologique d'envergure », ajoute la psychologue pour qui il y a un besoin d'écouter et de traitement de toutes ces personnes impactées par les événements traumatisants dont il convient de diagnostiquer les effets avant d'envisager une prise en charge. « Il y a, chez les adultes, ceux qui en font une fixation et d'autres qui se réfugient dans le déni et ne veulent pas en parler, alors que pour les enfants, c'est l'incompréhension et la peur d'un retour des flammes », précise la psychothérapeute, en insistant sur « l'impératif d'accompagner les enfants, surtout en cette veille de rentrée scolaire».
À Ikhlidjène, l'autre urgence, c'est le relogement des sinistrés dont les habitations ont été endommagées par le feu. Jusqu'à jeudi dernier, les nombreux sinistrés étaient dans l'attente du passage des équipes de recensement des dégâts diligentées par l'Etat. Les techniciens du CTC et des services de l'urbanisme sont les seuls à pouvoir décider de la nature et de la consistance de l'aide qui leur sera apportée, et ce, en fonction des dégâts qui seront constatés. C'est à ces techniciens de dire s'il s'agira d'une simple réhabilitation ou d'une démolition totale si les demeures sont fortement fragilisées.
Des opérations qui risquent de prendre beaucoup de temps, s'inquiètent certains pour qui il urge d'être fixé sur leur sort avant l'arrivée des rigueurs de l'hiver.
En attendant, se pose la question de savoir où aller pour ceux qui n'ont pas les moyens pour retaper leurs habitations après le passage des recenseurs. On apprend que certains entrepreneurs et des artisans en bâtiment se sont dit prêts à venir en aide aux sinistrés.
La solidarité s'est organisée aussi en faveur des éleveurs ou de simples citoyens qui n'ont plus de quoi nourrir leurs bêtes. Jeudi dernier, un camion chargé de foin est arrivé au village Agoulmim. « Nos amis les bêtes ont aussi besoin de notre solidarité », lance, mi-amusé, mi-sérieux, l'un des donateurs venus de la wilaya de Béjaïa. Des actions d'entraide de ce genre ont été constatées dans les villages, juste après l'accalmie qui a suivi le sinistre.
Solidaires dans le drame, les jeunes d'Ikhlidjène ont sauvé de la mort des soldats de l'ANP
Malgré le feu menaçant qui finira par atteindre leur village, les habitants d'Ikhlidjène n'ont pas hésité à prêter main-forte aux autres victimes de ces incendies. « Nous étions huit jeunes du village à voler au secours des soldats cernés par les flammes dans leur campement situé au lieu-dit Icheridhen sur l'axe de la RN 15, menant de Larbaâ-Nath-Irathen à Aïn-el-Hammam. Sur place, il y avait aussi des citoyens des villages voisins et qui avaient pris part au savetage des soldats », raconte Mohand Belkacem. Il ajoute : « Nous avons été alertés par un camionneur venu de Aïn-el-Hammam et nous nous sommes vite dirigés sur les lieux, malheureusement, nous n'avons pas pu faire grand-chose pour eux. Il y en avait qui avaient déjà succombé à leurs brûlures, nous avons aidé à éteindre les flammes et secouru les blessés jusqu'à l'arrivée des renforts.»
Des années de travail parties en fumée
C'est le sort réservé à Abderrahmane, un jeune apiculteur de Larbaâ-Nath-Irathen, qui a perdu tous ses ruchers. Sur une vidéo postée sur le réseau social Facebook, Abderrahmne lance un appel à l'aide pour reconstituer ses essaims d'abeilles et pour pouvoir reprendre son activité. «Je suis moi aussi victime du désastre qui a frappé la Kabylie. Je vois mon rêve partir en fumée et des années de labeur réduites en cendres. Avant ce drame, j'avais 500 ruches et aujourd'hui je me retrouve complètement ruiné. En premier lieu, je demande aux personnes qui ont déplacé la trentaine de ruches qui ont pu être sauvées et qui sont des environs de Takhoukht de me les restituer, je pourrai reconnaître les miennes.
Et en second lieu, j'appelle les âmes charitables à me donner un coup de main sur le plan matériel, pour pouvoir me remettre à nouveau sur pied et reprendre mon activité.
L'apiculture est le seul métier que je maîtrise, elle est ma passion. Merci de m'offrir une seconde chance, un nouveau départ », écrit le jeune apiculteur.
S. A. M.


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