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Agouni Gueghrane, le fant�me de Slimane Azem
Par Arezki Metref
Publié dans Le Soir d'Algérie le 02 - 01 - 2005

Des gamins tapent dans un ballon de foot sur un terrain vague � flanc de pr�cipice, les joues rouges de froid, la t�te enfonc�e dans des bonnets de laine. �Est-ce que tu sais qui est Slimane Azem ?�, demande-t-on au gardien de but. �Dh' khali, C'est mon oncle �, r�pond-il. Les autres arrivent. On discute balle au centre.
�On est fier de lui, ici�, dit un des joueurs. �On devrait �tudier ses textes�, r�torque un autre en d�signant la direction de cette �cole m�me o� Slimane a us� ses fonds de culotte. On se souvient, ici comme ailleurs, que Slimane Azem a �t� et reste l'un des rares chanteurs kabyles qu'on peut �couter en famille. �a lui conf�re d�j� une place particuli�re. A la sortie du village vers la montagne, un cube campe lourdement sur la roche. Sur la fa�ade peinte en vert, une inscription verticale : �Coiffure�. En contrebas, un autre b�timent est nich� au cœur des oliviers. C'est la demeure des Azem. Slimane est n� dans une masure au toit en terre. C'�tait la fa�on de faire de l'�poque. Une architecture ing�nieuse et in�dite : de la terre, du schiste et des rondins de bois d'olivier et de fr�ne. Dans les ann�es 1940, les premi�res maisons en dur apparaissent, tranchant avec l'architecture de survie aussi vieille que ce village qui semble tendre une embuscade � la Kouiret, cette montagne du massif du Djurdjura sur laquelle les maisons ont l'air d'avoir pouss� plut�t que construites. Sous la maison des Azem qui d�limite le village vers Taguemount Na�t Ergane, des olives s�chent en tas noirs et juteux sur le bord de la route. C'est la saison de la cueillette. On peut le savoir en observant les nu�es d'�tourneaux qui planaient au-dessus des oliviers. Etal�e en amont entre deux rochers, Agouni Gueghrane est hors du temps. Le nom de ce village qui tutoie les nuages signifie �La plaine aux quilles� mais nul ne saurait en donner une explication d�finitive. On y joua, dans les limbes, au jeu de quilles. Il s'y tenait des concours de lancers de javelots. Trois traits distinguent Agouni Gueghrane. La premi�re est ancienne, c'est la place du village. Elle fut pendant longtemps, dit-on sans quelque fiert�, la plus grande de Kabylie. La deuxi�me est, elle, toute r�cente, c'est la d�charge sauvage qui menacerait l'�cosyst�me si elle n'est pas stopp�e nette et vite. La troisi�me, enfin, intemporelle, c'est d'�tre le hameau natal de Slimane Azem. Arab Akli a 86 ans. Enfin, il est pr�sum� les avoir. Si les yeux lui jouent des tours, l'esprit, lui, est intact. Il se souvient de ce camarade d'enfance des Nat Waali. A l'�cole d'Agouni Gueghrane construite en 1913, ils ont fr�quent� tour � tour la classe de M. Halet, puis celle de M. Casavous et, enfin, celle de M. Si Ahmed. Ils ont fait le berger c�te � c�te. Ce n'est pas une l�gende forg�e apr�s coup : son camarade taillait des fl�tes dans le roseau et aimait leur arracher ces sons qui ressemblent � l'�cho des pierres qui roulent du haut de la montagne. Un son �pre, lancinant, comme tenu en apesanteur. Un son qui ressemble � l'entrechoquement de ces pierrailles qui descendent � pic du Corbeau et du Piton, ces rochers dress�s comme deux menhirs entre lesquels Agouni Gueghrane est post� en embuscade. Apr�s l'�cole, Slimane descend vers la plaine pour chercher du travail. Il d�gotte un boulot dans une exploitation agricole de Staou�li. Quand il revient � Agouni Gueghrane, une guitare dans ses bagages, il est d�j� cet artiste audacieux qui s'appr�te � moderniser la po�sie kabyle et � d�clencher la r�surrection de l'identit� berb�re dont il est aujourd'hui un des p�res fondateurs. Rares les artistes qui ne se r�clament pas de lui. Comme on en trouve d�sormais presque partout en Kabylie gagn�e par la fi�vre de la repr�sentation, trois grands portraits sont suspendus sur la place du village. Un repr�sente Matoub, l'autre Abchiche B�la�d, musicien et choriste de Slimane Azem qui a fini, par chanter de ses propres ailes, et Slimane lui-m�me. Sur le mur gondol� du caf� de la place, deux photos sont punais�es. L'une repr�sente les joueurs de la JSK, sagement align�s comme des �coliers pour une pose de fin d'ann�e. L'autre est un portrait de Slimane Azem d�coup� dans un calendrier, lui-m�me repiqu� d'une pochette de disque. Le caf� est une illustration de l'univers nostalgique de la po�sie de Slimane Azem funambulant sur le fil d'un tesson de verre entre l'ancestralit� incarn�e par l'ouate de la vie � Agouni Gueghrane et l'exil, symbolis� par la transhumance � travers les caf�s, lieu d'attente, d'expectative, stations �tranges pour �trangers. Agglutin�s autour de tables noy�es dans la fum�e, joueurs et spectateurs s'adonnent avec une passion bruyante aux dominos, gestes confondus. Au moins trois g�n�rations de joueurs de dominos s'affrontent en tournois. Slimane �tait, nous confie Akli Arab qui tenait � nous offrir le caf� dans le cœur battant du village, un �enfant bien �lev� et un � bon �l�ve �. Sa�d Aliche, un septuag�naire retrait� au verbe ch�ti�, se souvient de cette ann�e - ce devait �tre en 1946 - o�, enfant en guenilles, il a vu arriver Slimane �avec Jacqueline et sa traction avant� brillant comme un soleil de cette c�l�brit� qu'il commen�ait � avoir en France. Akli Arab compl�te : �Il avait fait entrer alors la premi�re tamachint alaghna, (machine � chanson, tourne-disques)� et il a chant� � Afir � moins que ce ne soit au caf� de Bouhnik � A 44 ans, Larbi Na�t Wali a deux raisons majeures de ch�rir Slimane Azem. Il est de la m�me famille que lui et, comme son illustre ain�, il fait dans la chanson. Mais il sait qu'il lui reste � gagner un pr�nom. C'est dur de partager le patronyme d'un g�ant. �Slice est le patrimoine de toute la Kabylie�, relativise-t-il. Que Agouni Gueghrane lui doive sa renomm�e, c'est �vident. Trois fourgons sur cinq qui font la navette avec les Ouadhias �coutent du Slimane en boucle. Depuis sa mort en exil, Slimane Azem est c�l�br� quasiment comme un marabout. Une v�ritable Slimania s'est empar�e du monde artistique et militant kabyle, qui souvent ne fait qu'un. Ce culte vou� � Slimane Azem est justifi� au moins par son g�nie novateur de musicien qui a su �lever au rang de genre musical les frustes accords de nos montagnes. Il est justifi� aussi par sa grande qualit� de po�te aux images de fabuliste, pionnier dans la contestation. Il est justifi� enfin par la r�appropriation par le mouvement berb�re des figures de son patrimoine. Slimane est parti. Il a p�r�grin�, guitare et nostalgie de tamurthiw, Agouni Gueghrane, en bandouli�re, de ville en ville, dans l'exil. Il est mort en France. Il est enterr� en France sans jamais �tre revenu dans ce village comme fig� entre ciel et terre, entre avant et apr�s, qui �tait pour lui le refuge ultime. Il n'est pas revenu, priv� du bercail pour de sombres histoires d'interpr�tation de ses actes et de ses chansons. Peut-�tre qu'un jour il faut mettre un terme � ce malentendu et rendre � la terre qui l'a vu na�tre, un homme qui l'a tellement aim�e que, m�me s'il en est loin, elle se confond avec lui.
A.M.
Dans notre prochaine �dition,
Tizi Hibel, les fils du pauvre


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