Pleine de vie et de gentillesse, Lila Tafat est animatrice et maquilleuse professionnelle pour enfants. Après avoir décroché son diplôme d'éducatrice principale, elle a travaillé au sein de crèches avant d'intégrer la Ligue de la jeunesse de la wilaya d'Alger. Dans cet entretien, elle dissèque son métier et souligne son impact sur les enfants et les parents. Lila donne de même des conseils sur le choix des produits à utiliser. Par Sarah Raymouche Soirmagazine : Comment êtes-vous devenue animatrice et maquilleuse professionnelle pour enfants ? Lila tafat : J'ai commencé très tôt à travailler avec les enfants. A 15 ans, je suis devenue nounou ou baby-sitter durant les vacances scolaires. Lycéenne, j'aidais les monitrices durant les vacances à la crèche, et à temps plein chez moi. Et suite à des problèmes familiaux, j'ai dû quitter le lycée. Je pense que ce passé m'a conduite tout naturellement à privilégier un métier au contact des enfants pour retrouver une chaleur et une tendresse que seuls les enfants peuvent procurer. Pour cela, j'ai décidé, lorsque la conjoncture familiale l'a permis, de devenir nourrice professionnelle. Je me suis inscrite, dans ce sens, dans une école privée agréée pour décrocher un diplôme d'éducatrice principale pour les enfants de deux ans et demi. Durant treize ans, j'ai travaillé dans plusieurs garderies. J'ai acquis beaucoup d'expérience et les enfants m'ont enrichie. Pour moi, travailler avec eux est une joie et un plaisir même si cela est difficile et fatiguant des fois. Par la suite, j'ai lancé des ateliers de travaux manuels en devenant animatrice dans la maison de jeunes de la wilaya d'Alger et dans une ligue de protection de l'environnement. Et étant une ancienne sportive, je fais également de l'animation dans ce domaine. L'animation me permet de partager encore plus avec les enfants et les orienter. Et c'est tout naturellement que je me suis lancée dans le maquillage pour enfants. Sans une formation spécifique, parce que j'ai eu à suivre plusieurs séminaires pour me perfectionner en animation et en ateliers ludiques. J'ai pu voir et constater lors de différentes manifestations que les enfants adorent cela. Alors, avec d'autres animateurs, nous avons convenu de le faire à titre gracieux. C'est une véritable fierté pour moi et un plaisir renouvelé. Donc, c'est un peu par hasard que vous avez commencé à faire ce métier... Oui, on peut dire que j'ai commencé un peu par hasard. En plus de l'amour de travailler avec les enfants, je sens que j'ai un don. Je me sens encore comme une petite fille et je comprends leurs besoins en tant qu'enfant. Donc, en commençant à pratiquer un peu par hasard, j'ai découvert que j'avais des capacités pour le faire. Les enfants sont pour la plupart pas exigeants. Il suffit de prendre le temps de les écouter et de les comprendre. Vous savez, quand il y a beaucoup de monde, ils deviennent comme par magie sages. Ils font la queue dans le silence sans trop de difficultés. Ils regardent, subjugués, ce que je fais. C'est ce qui est important à retenir. Ce genre d'activités leur apprend la patience et le respect d'autrui par ce qu'ils écoutent ce que l'autre demande et peuvent partager. Quel sentiment cela vous apporte ? C'est avant tout une satisfaction morale de se dire qu'on contribue à rendre les gens heureux et joyeux. Je fais en sorte de toujours garder le sourire même si je suis très fatiguée et que j'ai l'impression que le nombre d'enfants ne cesse d'augmenter. De plus, cela me permet d'exprimer un petit peu mon art et mon agilité que je ne me connaissais pas. Comme je vous l'ai dit, c'est par hasard que je me suis lancée et je ne le regrette pas. Quelle est la perception de ce métier auprès des gens, les enfants et les parents ? Ils sont très contents et très respectueux. Les parents ne banalisent pas ce que nous faisons ; bien au contraire, ils donnent de la valeur à ce que nous accomplissons. Lorsque je finis de maquiller un enfant, ils me remercient et m'expriment des vœux de bonheur et de prospérité. Ils ont conscience que c'est important pour leurs enfants. Ces derniers sont tellement fiers et heureux qu'ils n'osent pas parler. Avant de commencer à les maquiller, ils savent ce qu'ils veulent et le demandent très gentiment. Dernièrement, j'ai travaillé durant la journée de l'enfance. J'ai eu à maquiller la troupe d'enfants qui devait représenter une pièce de théâtre. J'étais vraiment satisfaite de moi-même et de l'effet produit. Cela m'encourage à poursuivre. Pensez-vous que c'est un métier valorisé en Algérie ? Personnellement, je trouve que tout ce qui est en rapport avec le monde des enfants n'est pas très valorisé. Pour moi, nos enfants manquent de tout. Ils n'ont pas leur monde. Alors notre métier, c'est une autre paire de manches. Nous essayons de travailler avec les moyens du bord et faire avancer les choses. J'ai été formée à la ludothèque et la bibliothèque numérique. J'espère pouvoir les mettre en place. Pour les parents qui veulent maquiller eux-mêmes leurs enfants, quels conseils leur donneriez-vous ? Vous savez, en Algérie, contrairement aux autres pays, notamment en France, il n'y a pas beaucoup de matériels pour ce genre d'activité que ce soit pour le maquillage ou le déguisement. Pour cela, j'utilise des crayons de couleurs gras, de la dorure et une certaine marque de maquillage qui peut être employée. Je les invite à voir certains dessins qui peuvent être retrouvés sur internet. Je veux leur dire qu'un enfant, dans certains cas, il suffit juste de lui faire un petit dessin de rien du tout et il est content. Je les encourage à partager ce genre d'expérience avec leurs enfants.