Hier, les images de désolation des scènes de saccages de la veille étaient encore visibles dans les locaux de la Direction de l'éducation de Béjaïa, de l'opérateur de téléphonie Djezzy et de l'agence BNP Paribas. Ces scènes de violence ont suscité une vive indignation dans les rangs de la société civile béjaouie. Le slogan «Non à la violence» a été largement partagé sur le réseau social Facebook par des milliers d'internautes qui ont unanimement condamné ces actes de violence et de saccages. Nabil Ferguenis, syndicaliste au Snapap, s'est demandé sur sa page facebook «à qui profite le chaos». Le syndicaliste du Snapap note que «les émeutiers, qui ont mis le feu au premier étage de la DE et saccagé le 1er étage et volé beaucoup de matériels, ne sont que des délinquants et des voyous». La Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) a, dans un communiqué, appelé les habitants de Béjaïa à la «vigilance» et au «calme». Dans son document, l'organisation de défense des droits de l'Homme réaffirme que «seul un cadre pacifique serait en mesure de faire aboutir des revendications citoyennes, toutes légitimes». La Laddh, bureau de Béjaïa, a également lancé un appel en direction des représentants de la société civile, des acteurs du mouvement associatif, des syndicats, des collectifs d'étudiants et de la presse à une réunion urgente pour hier en fin d'après-midi au siège du CDDH pour «voir comment agir au sujet de la grève et des dérapages». «Aujourd'hui, la société est face à une réalité amère et dangereuse», souligne Saïd Salhi, vice-président de la Laddh, tout en identifiant les émeutiers, auteurs des actes de pillages et de saccages, comme étant «des jeunes mal encadrés, non structurés et dépolitisés». Plaidant pour le respect des droits des associations et des organisations de la société civile qui peuvent, juge-t-il, faire un travail de «sensibilisation et de médiation dans une pareille situation», le militant des droits de l'Homme de Béjaïa estime que «les pouvoirs publics doivent méditer et réfléchir longuement sur leur attitude et rapport avec la société civile». Me Iken Sofiane, militant des droits de l'Homme à Akbou, abonde dans le même sens, estimant que le gouvernement «se doit de se réunir urgemment en vue d'étudier la situation qui risque de déraper dangereusement, discuter avec la société civile et apporter des solutions». Tout en soulignant «la légitimité des revendications mises en avant», l'avocat d'Akbou et militant des droits de l'Homme affirme que «la protestation ne doit pas dépasser le cadre pacifique», avant de lancer un appel à «la vigilance des citoyens». De son côté, le P/APW de Béjaïa, Ali Rabhi, intervenant sur les ondes de la radio locale, a énergiquement condamné les actes de saccages et de pillages ayant émaillé la grève des commerçants. S'appuyant sur un sondage effectué en discutant avec des émeutiers, le président de l'institution élue de wilaya a déclaré que «les auteurs de ces actes ne savaient même pas pourquoi ils s'en prenaient à des édifices publics et privés». «En détruisant des édifices publics qui seront reconstruits avec l'argent du contribuable, c'est se tirer une balle dans les pieds», estime un autre militant associatif de Béjaïa. «Aujourd'hui, au lieu de faire le recensement des projets construits dans une région déjà fortement marginalisée par le pouvoir et qui se trouve à la traîne du développement économique dans le pays, nous en sommes arrivés à constater amèrement le saccage et la destruction des quelques rares réalisations que possède la région», se désole Mohand F., un militant associatif de Béjaïa. Nombre de citoyens pensent que l'heure est désormais à la méditation et à l'action en vue de faire barrage «aux desseins malveillants» de ceux qui veulent déstabiliser la région.