Mercredi dernier, au soir, Alger ressemblait de pr�s � une ville morte. Certes, il y avait le match de foot qui a vid� les rues de la capitale ; mais il y avait surtout le concert anim� par la chanteuse belge Maurane � la salle Ibn Khaldoun. Avant 21h, les gens arrivaient par petits groupes. Qui en v�hicule qui � pied. Les visages arboraient des sourires prometteurs d'une soir�e qui ne sera qu'impeccable. A l'int�rieur de la salle, les si�ges sont d�j� squatt�s. Ceux qui �taient dehors, de simples gens, deviennent maintenant des spectateurs. C'est un public qui bavarde en toute insouciance en attendant… �� et l�, on entend des �clats de rire aussit�t �touff�s. Brusquement, les lumi�res s'�teignirent, un faisceau lumineux bleu, droit comme un fil � plomb, balaya la sc�ne. Une voix off commanda : "Mesdames, messieurs, honorables spectateurs, nous vous prions de ne pas utiliser le flash de vos appareils � photo. Quant aux portables, il est "strictement" permis de les allumer." La voix se retira telle une mar�e basse. Deux personnes se pr�cipit�rent sur la sc�ne. L'un se rua vers la guitare, l'autre se h�ta vers le piano. Chacun prend sa place. Une silhouette serpentant tout doucement les suivit. C'�tait Maurane. Et sans pr�ambule, elle attaque une chanson, Au clair de ma plume. La chanteuse entre directement dans le vif du sujet. Elle a devanc� m�me ses compagnons de route, "son orchestre philharmonique". En face, le public n'ayant rien compris en cette attitude applaudit. Puis le silence intervint. La voix chaude et sensuelle de Maurane heurta les murs de la salle comme pour les r�veiller de leur torpeur. La chanteuse semble h�siter � s'adresser � son public alg�rois. Elle ne veut point s'arr�ter. Elle passe � une autre chanson sans transition aucune. Pourquoi ? un autre titre plus rythm�, lui a valu les clap, clap, clap… chaleureux de 800 spectateurs. C'�tait impressionnant. La musique s'arr�ta nette. Ni les cordes de la guitare ni les touches du piano noir ne semblent vouloir poursuivre. A son tour, la voix de Maurane s'�teint. Un instant, en trois battements de cils, la chanteuse lan�a � son public : "Je suis heureuse." Heureuse ou contente ? En fait, cette soir�e elle l'attendait depuis longtemps. Et justement le bonheur est, semble-t-il, toutes ces ann�es pass�es � attendre. "�a fait longtemps que des copains alg�riens me demandent : quand est-ce que tu vas chanter en Alg�rie ? Eh bien me voil�, enfin, ici, parmi vous." Maurane, "emmitoufl�e" dans une robe noire et l�g�re, est une dame ronde. Et, faites attention, elle se plait � le r�clamer. Et depuis qu'elle est � Alger, elle ne mange que du bourek et… du couscous royal, SVP !! Elle est donc ronde et se passionne de bulles. Elle a la voix chaude et admire le champagne, "la boisson des femmes" (c'est elle qui le clame). Apr�s �a, elle entame l'une de ses meilleures chanson : Boire dans le m�me r�ve. A l'entendre parler, on reste fig�. A l'�couter chanter, on comprend comment Ulysse a failli succomber aux chants des sir�nes. De sa voix tendre et envo�tante, elle r�pand les chansons des enfants terribles de la chanson fran�aise, Jaques Brel entre autres. Je ne sais pas pourquoi, l'une des titres phare du grand Jacques au f�minin. Je sais que l�-haut, dans le ciel, Claude et Jacques sont en train de taper des pieds", lan�a la chanteuse, allusion faite � Jacques Brel et Claude Fran�ois. Maurane a su durant toute la soir�e occuper la sc�ne. Et entre une chanson et une autre, elle s'improvise animatrice. Le concert s'est termin� peu avant minuit. Alger ronflait d�j�.