D�ambuler dans les art�res et places de la ville d�Oran vous offre parfois un spectacle insolite, loin de l�encombrement des v�hicules et de leurs klaxons assourdissants et du bain de foule, synonyme de stress et de nerfs mis � rude �preuve. Sur la place qui longe l�ancienne cath�drale, un vieil homme muni d�un sac en plastique contenant du pain rassis qu�il prend soigneusement de r�duire en petits morceaux destin�s aux pigeons venus nombreux faire ripaille. Je me suis approch� de ce personnage lunatique dont le comportement r�v�lateur d�affection et d�amour pour ces oiseaux me fait d�couvrir hadj Abdeslem, ancien retrait�, qui consacre une partie de son temps � les nourrir et qui, en guise de remerciements, s�agglutinent autour de lui sans crainte aucune. Ces pigeons ont pris le pli et se sont habitu�s � lui. Il leur rend visite r�guli�rement. Hadj m�apprend qu�il fait le tour de certains immeubles � la qu�te de ce pain qui est tri� et mis dans des sacs propres. Hadj est ravi et cette occupation lui procure enti�re satisfaction ; c�est sa mani�re � lui de se rendre utile. Ah ! si tous ses semblables agissaient de la m�me sorte envers les plus d�munis, si chacun de nous pensait un tant soit peu � cette femme, � cet homme, � cet enfant qui passent la nuit sous une porte coch�re d�un immeuble ou dehors sur des cartons que la pluie a mouill�s et rendus humides. Ah ! si chacun prenait le temps de s�arr�ter et de se baisser pour se rapprocher plus de celui qui tend la main ou celle qui n�ose pas la tendre, Hadj serait vachement content. Oui, lui, le sait et ses pigeons aussi. Ils n�ont pas la facult� de la parole mais par leurs sautillements, leurs roucoulements, ils laissent � Hadj le soin d�interpr�ter ce rituel. Lui, n�a jamais failli � sa mission, hiver comme �t�, Hadj l�immarcessible, r�pond toujours pr�sent et on ne recense aucune absence. Les pigeons l�attendent et connaissent l�heure d�arriv�e de leur bienfaiteur et d�s qu�il prend place sur son banc, ils rappliquent par dizaine, par centaines. Il faut avouer que Hadj a du pain sur la planche. Autour de lui, plusieurs sacs pleins � craquer. Parfois se joignent � lui des b�n�voles qui l�aident dans �son travail� quotidien. Mais lui, ne faiblit jamais. Sa pugnacit� et sa force ne sont plus � d�montrer. Tout ce qu�il entreprend, tout ce qu�il fait, c�est pour ses pigeons. Car Hadj conna�t ses pigeons et les pigeons connaissent Hadj. Un v�ritable lien s�est tiss� entre eux. Une fois la distribution termin�e, Hadj s�assure que tous ont bien mang� et d�un pas nonchalant, il repart comme il est venu. Demain, une autre journ�e, une autre tourn�e. Et, inlassablement, Hadj continue � nourrir ses pigeons.