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KIOSQUE ARABE
Un visa vaut-il une messe ? Par Ahmed Halli [email protected]
Publié dans Le Soir d'Algérie le 31 - 03 - 2008

Finalement, les efforts conjugu�s de Bechar Al- Assad et de son mufti ont eu raison des r�ticences de certains chefs d�Etat arabes. Avec la foi ardente et le patriotisme exalt� qu�on leur conna�t, des pr�sidents et souverains arabes ont fait le voyage de Damas. Ils �chapperont ainsi aux foudres de Damas et au ch�timent de la providence promis par le th�ologien en chef de la Syrie et de ses provinces.
Les Alg�riens ont encore eu droit � leur blessure d�orgueil traditionnelle : les observateurs ont not� l�absence des �grosses pointures� comme l�Egypte et l�Arabie saoudite � ce sommet. Ce qui rel�gue, de fait, l�Alg�rie au rang de petite ou moyenne pointure. Heureusement qu�ici, en Alg�rie, il y a des hommes, et des femmes, qui savent appr�cier la valeur de leur pays et, surtout, les qualit�s hors normes de son pr�sident. Il ne faut pas compter sur les m�dias arabes pour chanter nos louanges et celles de nos chefs. Ces m�dias n�ont d�yeux que pour ce trublion de Kadhafi, catalogu� tant�t comme le �sel� des sommets, tant�t comme la cerise sur le g�teau arabe. Comme � son habitude, le guide libyen a convi� ses pairs � un exercice d�autoflagellation auquel les Iraniens ne sont pas rest�s insensibles. Il ne faut pas trop �nerver l�Iran avec l�histoire de l�occupation de deux ou trois �lots arabes. Apr�s tout, ce sont des musulmans comme nous et les chiites constituent 80% de la population de la r�gion du Golfe, sans pr�ciser si ce fameux golfe �tait arabe ou persique. Sur sa lanc�e, le fr�re Ma�mar a annonc� une guerre contre les Arabes en 2008. A l�issue de cette guerre, l�ennemi am�ricano-sioniste occupera encore d�autres territoires arabes. �Ainsi, a-t-il dit, les Arabes pourront revendiquer un retour aux fronti�res de 2008 comme pr�alable � un r�glement de la crise du Proche- Orient.� Comme d�habitude, Kadhafi a �t� tr�s chaleureusement applaudi � la fin de son discours, signe que l�assistance n�avait pas �cout� un tra�tre mot de sa diatribe. R�aliste d�ailleurs, il avait lui-m�me conseill� aux chefs de d�l�gations de mettre des �couteurs, ce qui est normal dans une salle o� tout le monde ne parle pas la m�me langue. Kadhafi consomm�, il ne restait plus grand-chose � tirer de ce sommet que les Syriens ont organis� comme un coup de force. Et ils ont averti du reste : �Si ce sommet �choue, ce sera le r�sultat d�un complot am�ricano- sioniste.� C��tait rel�guer au chapitre des amn�sies collectives les multiples �checs des innombrables sommets et conf�rences de la �sainte ligue�. Dans son style habituel, le chroniqueur �gyptien Sammy Buhairi ironise dans le quotidien kowe�tien Al-Siassa sur ces accusations de complot lanc�es contre les USA �Supposons, ditil, que les Am�ricains cessent de comploter contre les Arabes. Ce qui est plausible puisque je compte intervenir personnellement (1) aupr�s du pr�sident Bush pour le lui demander. J�ai, en effet, vot� Bush pour le deuxi�me mandat et il est mon coll�gue au sein du parti r�publicain dont je suis membre. Ceci fait, et Bush ayant mis fin aux complots anti- arabes, que feront les Arabes ? Cesserontils de s��pier les uns les autres et de comploter les uns contre les autres ? Laisseront-ils leurs marchandises respectives circuler librement dans leurs pays ? Instaureront-ils une monnaie unique ? Et quand le complot am�ricano-sioniste et occidental aura pris fin, les tueries interarabes et les liquidations physiques cesseront-elles pour autant ?� En conclusion, Sammy Buhairi sugg�re de reprendre le communiqu� final du sommet de Riyad et de remplacer juste les dates et le lieu de r�union pour aboutir au m�me r�sultat. Il faudrait y ajouter sans doute un paragraphe concernant le documentaire du d�put� d�extr�me droite hollandais qui circule sur internet. Ainsi, en plus du complot imput� � la coalition occidentale autour d�Isra�l, on pourra d�noncer les caricatures et les documentaires qui font vaciller la foi des Arabes et les fait douter de leurs convictions profondes. Ces r�actions quasi-�pidermiques font r�agir notre confr�re �gyptien Achraf Abdelkader, un musulman pieux qui d�fend sa religion avec les armes de la raison. Reprenant � son compte la th�se du Tunisien Mohamed Talbi selon laquelle les musulmans doivent choisir entre l�islam et la Charia, il exhorte les Arabes et les musulmans � changer. �Comment voulezvous, dit-il, que le monde respecte notre religion s�il voit sur internet des hommes cagoul�s r�citant des versets du Coran et tailladant la gorge d�un �tre humain. Je dis : un �tre humain ? qu�il soit musulman ou non et ce dans un monde qui a aboli la peine de mort depuis longtemps. Et si ce monde nous accuse de sauvagerie et de cruaut�, devons-nous ressentir �a comme une agression ? Si le port du hidjab et d�une longue barbe doivent nous porter pr�judice en tant que diaspora arabe en Europe, pourquoi ne pas se les interdire ? Surtout, s�ils sont consid�r�s comme une provocation contre eux et chez eux�. (2) Pour parachever l��uvre arabe, enfin, il faudra aussi fustiger la dangereuse invasion religieuse que subissent l�Alg�rie et le Maroc. Des m�dias arabes se sont d�j� mobilis�s contre cette �invasion� qui leur permet de soutenir indirectement la r�pression des libert�s politiques, syndicales et religieuses. La revue saoudienne Al-Madjala avance m�me des statistiques tir�es d�on ne sait o� : 20 % des Marocains seront chr�tiens en 2020, affirme le p�riodique saoudien �dit� � Londres. Il faut donc d�cr�ter la mobilisation g�n�rale et nos journaux s�y emploient activement, quitte � pi�tiner les r�gles essentielles de la profession. Dans leur acharnement � rivaliser pour la conqu�te des lecteurs, certains quotidiens c�toient l�absurde quand ils ne s�y abandonnent pas. Des conversations t�l�phoniques et une rencontre avec des �repentis � (3) et cela suffit � d�clencher des op�rations scoop du style : �Notre reporter a p�n�tr� ou infiltr� le sanctuaire chr�tien.� Il est question, bien entendu, d�argent et surtout de visas promis aux nouveaux convertis et aux pros�lytes. S�agissant de conversions au protestantisme adventiste, il aurait �t� plus judicieux de faire miroiter la Green- Card aux futurs convertis. Et puis, amis lecteurs, s�il y avait des visas � la cl�, combien seraient-ils selon vous � r�sister � l�attrait de la messe ? J�ai relev� aussi cette information relay�e massivement par emails : c�est une dame alg�rienne qui veut divorcer avec son mari parce qu�elle a d�couvert qu�il s��tait converti au juda�sme. Comment l�a-t-elle d�masqu� ? Tout simplement parce qu�il lui demandait de lui pr�parer chaque samedi un plat de couscous avec du lait caill�, ce qui serait une tradition juive. Je vous le dis tout net : depuis cette affaire, j�ai renonc� au �masfouf� et je ne demande plus de lait caill� � mon �picier.
A. H.
(1) Sammy Buhairi, qui �crit dans plusieurs m�dias arabes, est un architecte �gyptien exil� aux Etats-Unis et ayant acquis la citoyennet� am�ricaine. Il est l�un des rares Arabes am�ricains � avouer qu�il a vot� pour Bush, sans se renier pour autant.
(2) Le drame, c�est que la barbe et le foulard sont vus comme les poutres ma�tresses de l�Islam nouveau tel qu�on l�enseigne aux communaut�s arabes en Europe, avec la b�n�diction et, souvent, le soutien des gouvernements locaux. Une mosqu�e Ibn-Albaz, le �salafiste � en plein c�ur de Paris, �a vous situe imm�diatement le cadre et les limites de ce soutien.
(3) Il s�agit ici, bien s�r, de musulmans qui sont revenus � l�Islam apr�s avoir s�journ�, sans visa, dans le monde chr�tien. Comme tous les repentis, ils adorent se confier aux journalistes.


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