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JEAN LACOUTURE
Ou le journalisme du tamis
Publié dans Le Soir d'Algérie le 17 - 04 - 2008

Jean Lacouture est un vieux baroudeur du journalisme qui a eu � couvrir les grands conflits li�s � la d�conolisation dans les ann�es 1950 et 1960. Ce sont les �tapes, souvent conditionn�es par le hasard, de ce chemin pour la sympathie ind�pendantiste, avec ses contradictions, qu�il raconte dans ce livre d��changes avec un autre journaliste, Bernard Guetta.
L��il encore vif, Jean Lacouture serait presque pr�t � reprendre son sac et � sauter dans le premier moyen de transport pour aller voir ce qui se passe dans le monde, anim� comme par une mystique du journalisme de terrain. Lorsque, la cinquantaine pass�e, il s�est aper�u des difficult�s physiques qu�il ressentait � rallier le terrain, il a d�cid� de quitter le journalisme. Ecrire des biographies et des livres valait mieux, � ses yeux, que le journalisme de bureau. Issu de la bourgeoisie de Bordeaux, Jean Lacouture fait des �tudes chez les j�suites. Ceci ne le pr�disposait pas du tout aux sympathies et aux positions qu�il allait avoir et prendre par la suite. A seize ans, il rejoint la R�sistance. A la fin de la Seconde guerre mondiale, il est attach� de presse du g�n�ral Leclerc. C�est ainsi qu�il se retrouve en Indochine. Journaliste en uniforme, il ne va pas tarder � s��prendre de la cause ind�pendantiste vietnamienne jusqu�� fonder Paris Saigon, un journal qui pr�ne la n�gociation, sans abandonner son travail de journaliste pour l�arm�e. Ce qui lui vaudra, � lui et � ses camarades, cette cinglante apostrophe : �Ils font le matin, un journal pour la guerre et l�apr�s-midi un journal pour la paix.� Lorsque la guerre �clate, Jean Lacouture d�cide de gagner Paris. Mais il aura auparavant fait une des plus importantes rencontres de sa vie : Ho Chi Minh. A vingt trois ans, il rencontre ce r�volutionnaire mythique qui lui parle de Paris. Il a, lui, 59 ans et on l�appelle �le vieux�. Jean Lacouture �crit : �La sympathie est certaine.� Elle n�emp�che pas le retour � Paris et le d�but, en 1950, d�une carri�re de journaliste et de reporter � Combat. Mais avant d�entrer au journal dont Albert Camus fut l�une des plumes vedettes, Jean Lacouture se rend � Rabat o� il est employ� � la r�sidence g�n�rale de France. Pendant ces deux ann�es, le journaliste reconna�t s��tre laiss� aller � l�h�donisme. Il ne voit pas, ne veut pas ou ne sait pas voir les effets de la domination coloniale. Il passe �� travers le Maroc� o� il baignait comme �un poisson dans l�eau, sans regarder de quelle couleur est l�eau, ni si elle est trop ou pas assez sal�e�. Mais en r�gle g�n�rale, il impute la dissociation entre l�h�donisme et la citoyennet� responsable au fait d��tre �n� dans la bourgeoisie, je savais ce que c�est que de vivre parmi les injustes, comme l�a dit Mauriac � son propos. J�avais travers� le Front populaire, � quinze ans, sans passer du c�t� du peuple. J�avais v�cu l�occupation de la France en sachant o� �taient le bien et le mal sans r�agir. C��tait tr�s clair, ma famille �coutait passionn�ment la radio de Londres mais je n�ai pris le chemin du maquis que trois mois avant le d�barquement�. Apr�s donc la parenth�se marocaine, Jean Lacouture revient en France. Il est reporter � Combat o� il touche � tous les domaines, de la politique internationale au sport. De cet �clectisme, il lui est rest� une curiosit� pour tous les genres. C�est un des sp�cialistes actuels du rugby. En 1951, sans quitter enti�rement Combat, il pige pour Le Monde, qu�il rejoint bient�t. C�est une cons�cration pour lui : �Un jeune journaliste qui a de l�ambition r�ve n�cessairement en 1950 d�entrer au Monde qui est, pour ce m�tier, ce qu�est Normale Sup pour un jeune professeur. L��quipe du Monde domine le journalisme fran�ais � En d�pit de l�int�r�t de ce travail qui lui fait toucher du doigt la r�alit� coloniale et fera de lui d�s cette �poque un partisan de la d�colonisation de l�Alg�rie, il quitte, pour des raisons personnelles, le Monde et la France pour Le Caire et France Soir. De 1953 � 1956, il est correspondant du quotidien du soir parisien dans la capitale �gyptienne. C�est l� o� il va se familiariser avec la r�alit� sociale et politique de �l�Egypte des bikbachis � (lieutenants colonels). Il rencontre �videmment les officiers qui viennent de d�barrasser le pays du faroukisme sous la conduite de Naguib, �le seul g�n�ral � ne pas �tre d�consid�r� dans la guerre de Palestine, un honn�te homme, un type bien�. Nasser prendra le pas sur Naguib. Le nass�risme, appuy� au d�part par les Am�ricains, va se rapprocher de l�Union sovi�tique et la doctrine va s�en trouver infl�chie vers quelque chose d��galitaire. Mais ce n�est pas le socialisme orthodoxe. Jean Lacouture caract�rise bien le nass�risme et tous les socialismes tiers-mondistes qu�il va influer, jusqu�� l�alg�rien. �Nasser et ses bikbachis sont id�ologiquement tr�s loin du camp sovi�tique. Ce socialisme qui vient souvent dans leurs propos, c�est un socialisme arabe. Pour les gens comme Nasser, Sadate et les autres, pour ces nationalistes, le socialisme est une donn�e op�rationnelle ; l�Egypte, une valeur fondamentale ; l�arabisme, une ambition et l�islam une r�f�rence. � Au cours de son s�jour au Caire, Jean Lacouture rencontre les responsables du FLN de l�ext�rieur. �Des t�tes�, dit-il, notamment de Hocine A�t Ahmed et de M�hamed Yazid, qui donnent une coh�rence th�orique r�volutionnaire � une action arm�e qui parait, sur le terrain, hirsute. Au contact de tout cela, Jean Lacouture approfondit ses positions anticolonialistes en mesurant l�ampleur du g�chis colonial assis sur �notre brutalit�, notre domination, notre imp�rialisme � qui, par ailleurs, �n�ont pas suffi � couper court � des attentes et � des sympathies qui tiennent � la greffe de culture et que je continue � juger inesp�r�es�. Mais le colonialisme n�est idyllique que pour les colonialistes et ce n�est pas sans autod�rision que le g�n�ral De Gaulle avait lanc� aux Guin�ens en 1958 : �Ah, vous ne voulez pas de nous ? On s�en va !� En 1957, Jean Lacouture revient au Mondeen tant que chef de service outre-mer. Il arrive en pleine guerre d�ind�pendance et le sujet rel�ve de sa rubrique. Comment un anticolonialiste mod�r� articule ses positions avec la prudence du Monde. Par la voici comme il en parle aujourd�hui : � Le Monde a occup� une sorte de magist�re de l�interrogation pessimiste et de l��lucidation, laissant � d�autres, non sans connivences, la fonction r�v�latrice.� Et d�ajouter : �Nous sommes conscients de jouer le r�le de tamis entre quelque chose qui est in�luctable (l�ind�pendance de l�Alg�rie) et ce que peut recevoir un public fran�ais � une p�riode donn�e. Nous pratiquons l� un journalisme tr�s �trange qui ne peut �tre compris aujourd�hui o� la mode est � la transparence, cette �vidence des sots.� Journalisme du demi-mot par engagement anticolonialste le conduit � se radicaliser � gauche, d�abord contre le g�n�ral De Gaulle, contre la Ve R�publique et surtout pour le Vietcong et les Khmers rouges �un mouvement de r�sistance contre un gouvernement fabriqu� par les Am�ricains�. Il prend parti pour les r�gimes hostiles � �l'imp�rialisme am�ricain�. En 1975, il salue la chute de Sa�gon et la venue imminente d'un �meilleur Cambodge� avec les Khmers rouges. Il faudra plus de trois ans � de nombreux intellectuels pour appr�hender la r�alit� de l'id�ologie des Khmers rouges et des Vietnamiens du Nord et plus encore pour admettre le g�nocide khmer. En novembre 1978, Jean Lacouture reconna�t ses erreurs sur ses pr�sentations du Vi�tnam et des Khmers rouges. Dans un entretien � Valeurs Actuelles, il d�clare �avoir pratiqu� une information s�lective en dissimulant le caract�re stalinien du r�gime nord-vietnamien�. �Je pensais que le conflit contre l'imp�rialisme am�ricain �tait profond�ment juste et qu'il serait toujours temps, apr�s la guerre, de s'interroger sur la nature v�ritable du r�gime. Au Cambodge, j'ai p�ch� par ignorance et par na�vet�. Je n'avais aucun moyen de contr�ler mes informations. J'avais un peu connu certains dirigeants actuels des Khmers rouges, mais rien ne permettait de jeter une ombre sur leur avenir et leur programme. Ils se r�clamaient du marxisme, sans que j'aie pu d�celer en eux les racines du totalitarisme. J'avoue que j'ai manqu� de p�n�tration politique.� Auteur d�une �uvre de journaliste et de biographe impressionnante (un livre par an), Jean Lacouture aide � la compr�hension du monde par sa sinc�rit� et son intelligence � interroger ses propres engagements. Ce livre est une sorte de manuel d��thique journalistique en pratique.
Bachir Agour
Bernard Guetta et Jean Lacouture,
Le Monde est mon m�tier, Grasset


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