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Tlemcen La harga : autopsie d'un phénomène
Publié dans Le Temps d'Algérie le 17 - 12 - 2018

Avant l'instauration du visa Schengen, ce sont les faussaires de documents de voyages et de visas qui ont proliféré, moyennant de fortes sommes d'argent pour les candidats à ce risque
L'on comprend sans peine les causes, les motivations et le désespoir des migrants subsahariens qui risquent leurs vies pour la harga vers des horizons meilleurs, mais est-ce le cas de ces centaines d'Algériens qui bravent la mort pour quitter le pays ?
Ce phénomène a pris ces dernières années des proportions plus qu'alarmantes, et l'on s'interroge encore sur les réelles causes qui poussent ces jeunes et moins jeunes à cette aventure périlleuse dans la majorité des cas. Pour la seule année en cours, plus d'une quarantaine de corps sans vie ont été repêchés par les garde-côtes de la Marine nationale, et des dizaines ont été secourus au large et sauvés d'une mort certaine. Le chômage, la précarité et les conditions socioéconomiques du pays en sont-ils les causes ? Qui sont ces jeunes candidats à la harga et à quelle topographie sociologique appartiennent-ils ?
Même si aucune étude sociologique n'a été entreprise par nos chercheurs universitaires pour apporter des réponses à cette problématique, qui comporte un risque majeur pour nos concitoyens et porte atteinte à l'image de notre pays, on a tenté d'aller à la rencontre de ces harraga pour tenter de comprendre leurs réelles motivations et les situer socialement. Jusqu'alors, à l'intérieur du pays comme outre-mer, on considère qu'ils fuient la misère, le chômage, la hogra et l'absence de liberté. C'est le son de cloche qu'on entend dans tous les médias, mais sur quelles bases qualifie-t-on ces causes ?
Les harraga tentent-ils de se justifier par ces faux-fuyants pour se justifier outre-mer et tenter de bénéficier d'un statut «d'exilés» ? Qu'en est-il en réalité ?
Le visa, cause essentielle de la harga
Pour comprendre ce phénomène, il faudrait revenir en arrière et décortiquer sa genèse. Dans les années 80 et 90, avant le durcissement des conditions d'obtention du visa par les pays européens, le problème n'existait pas. Les seuls candidats aux voyages clandestins optaient pour des passeurs à bord de navires marchands ou de voyageurs pour atteindre l'autre rive de la Méditerranée.
Avant l'instauration du visa Schengen, ce sont les faussaires de documents de voyages et de visas qui ont proliféré, moyennant de fortes sommes d'argent pour les candidats à ce risque. Puis les conditions se sont de plus en plus durcies et ni la falsification des documents et encore moins les passeurs transfrontaliers ne sont devenus utiles à ces jeunes qui veulent à tout prix «voyager». Même la période de la décennie noire qu'a connue le pays n'a pas enregistré autant de candidats à la harga.
On l'aurait certainement justifié. Donc les causes sont à rechercher ailleurs, sachant que les Algériens en général, jeunes et moins jeunes, aiment voyager. Durant les années 70 et 80, des millions de touristes algériens se sont rendus en Europe, surtout en Espagne, et dont la majorité sont rentrés après leur séjour. Pourtant, les conditions socioéconomiques du pays n'étaient pas des plus reluisantes. Ce qui a provoqué d'ailleurs les événements d'Octobre 1988. Tous les jeunes harraga que nous avons contactés n'obéissent à aucun profil de «victimes» tels que tentent certains de les décrire.
Seule «la belle vie»
«J'ai vendu ma moto et j'avais quelques économies de côté, j'ai changé le tout en Euros. J'avais décidé alors avec un groupe d'amis de tenter l'aventure et avons pris contact avec un passeur», affirme Sid Ahmed, âgé de 26 ans.
Il était électricien auto de profession et dit «vivre bien et regretter son coup de folie» qui l'avait presque conduit à la mort n'était l'intervention à temps des garde-côtes qui ont repêché leur embarcation de fortune au large de la ville côtière de Ghazaouet. Il affirme avoir payé aux passeurs 4500 Euros tout comme ses trois amis qui avaient tous un emploi. Il nous a parlé avec amertume de cette mauvaise expérience et des réelles causes qui l'ont conduit à risquer sa vie. «J'ai fait plus d'une dizaine demandes de visa, mais elles ont toutes été refusées par les consulats de France et d'Espagne.
Je voulais juste voyager et vivre la belle vie ailleurs, d'autant que j'avais une amie sur Facebook qui allait me recevoir et avec qui on a développé une relation très affective», soulignant qu'«il me fallait coûte que coûte la rejoindre ; sur un coup de tête, j'ai pris la décision d'opter pour la harga». Mais c'est quoi, la belle vie, selon Sid Ahmed.
Pour lui, «ce sont tous les plaisirs et la liberté en Europe où les jeunes disposent d'innombrables lieux de loisirs et de distractions pour se défouler». Samir, 23 ans, son ami dans cette malheureuse aventure, affirme de son côté qu' «il ne manquait de rien sauf qu'il n'y a rien pour les jeunes ; c'est la monotonie et le manque de distractions qui l'ont poussé à la harga». Ils considèrent tous que les jeunes «n'ont pas où aller pour se défouler et les quelques endroits qui existent leur sont inaccessibles financièrement».
Réda : le cas édifiant d'un harrag
Le cas de Réda, 31 ans, est des plus édifiants. Ayant bénéficié d'un crédit de l'Ansej, il s'est vu créer une micro-entreprise spécialisée dans le froid. Il a même bénéficié d'un véhicule Berlingo. «Durant plus d'une année, je n'ai pas trouvé d'opportunités de travail. J'ai fini par brader tout le matériel, mis le véhicule au garage, et tenté la harga». Réda voulait justifier l'injustifiable et, selon lui, «il avait fait le mauvais choix d'opter pour la spécialité du froid et il aurait été préférable de faire une agence de location de voitures». Sauf que la réparation des équipements frigorifiques, qui est sa spécialité, est très demandée. Aujourd'hui, il perd sur les deux fronts car il est poursuivi en justice pour rembourser le matériel qu'il a vendu. «Je ne suis pas le seul à avoir vendu le matériel de l'Ansej et tenté la harga, j'en connais plus d'une dizaine», souligne-t-il, avant de se ressaisir et dire : «Il est vrai que j'ai volé l'argent de l'état, et même si j'avais réussi la harga, j'aurais toujours été poursuivi par la justice. Ce que je regrette, ce sont les 26.000 Euros perdus à jamais». Ce qui prouve que les conditions sociales n'ont aucun lien avec ce phénomène.
La majorité est motivée pour d'autres considérations plus subjectives qu'objectives. Le seul qui a tenté de nous convaincre mais qui n'a jamais choisi la harga est Hachemi, âgé de 42 ans. «J'ai fait 3 fois de la prison pour différents délits. Soit un cumul de 7 ans de détention. Depuis, je ne fais que bricoler pour gagner ma vie et je suis toujours célibataire. Je vis chez ma mère. Notre société ne pardonne pas et un repris de justice est mal vu partout et refusé partout. Je voulais quitter le pays uniquement pour changer d'air, mais malheureusement, je n'ai pas les moyens pour payer les passeurs», avant de conclure ironiquement : «Ya kho, même pour la harga, il faut être riche ou en avoir les moyens». Il a tout dit.


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