Les responsables du Cnapeste ont beau dire, il y a quand même une sacrée dose de cynisme dans leur décision de reprendre le travail… au premier jour des vacances scolaires ! Bien sûr, formellement, ils avaient de quoi expliquer la fin d'un débrayage monstrueux qui a soulevé l'indignation des plus paisibles, y compris au sein de leur propre corporation. Certains enseignants, qui avaient pourtant partagé l'essentiel de leurs revendications et à un degré moindre la manière d'exprimer leurs colères, ne comprenaient pas en effet qu'on puisse aller aussi loin dans le chantage et être à ce point sourds aux appels à la responsabilité. De leurs propres rangs et à leur périphérie, des voix qui n'en pouvaient plus face à l'outrage fait à l'école se sont même élevées, dont les révélations laissent perplexes. Certains d'entre les enseignants grévistes les plus enflammés et les plus jusqu'au-boutistes dans leurs déclarations publiques n'ont même pas été vus une seule fois dans l'enceinte de leurs établissements. Au piquet de grève, ils ont préféré vaquer à d'autres occupations. La cueillette des olives comme en Kabylie, le petit business partout ailleurs et parfois, suprême fumisterie, les «cours de soutien» dispensés dans de sordides garages contre rémunérations sonnantes et trébuchantes… à leurs propres élèves dans l'école publique ! Dans cette grève dont on n'entrevoyait pas la fin, la tutelle n'est évidemment pas au-dessus de tout reproche. Sinon, on le saurait et l'école ne serait certainement pas au point où elle en est. Mais on pensait naïvement qu'une école déjà si mal en point pouvait faire l'économie, non pas de la grève, c'est un droit, mais de la folie furieuse. Mais pour en arriver à ce niveau de décrépitude, il fallait bien une «conjugaison d'efforts» dont on vient de vivre l'un des épisodes les plus caractéristiques. Un mois de débrayage plus tard, le ministère nous apprend que les dégâts pour les candidats au bac n'étaient pas si graves que ça puisqu'ils pouvaient être réparés par des cours de rattrapage et… un CD qui contient tous les cours perdus et toutes les leçons susceptibles de contenir les questions de l'examen. On ne sait toujours pas comment on compte organiser ces cours de rattrapage, les disques magiques ne sont toujours pas remis aux élèves puisqu'un seul exemplaire a été envoyé à chaque établissement qui doit se débrouiller pour tirer autant de copies que nécessaires et les dates du bac blanc sont confiées à la main incertaine des directions de l'éducation dont on connaît la performance. En attendant, la tutelle et le Cnapeste sont venus main dans la main vers le même micro tendu pour nous expliquer qu'ils se sont finalement entendus sur l'essentiel, avant de nous faire partager et leur «satisfaction» et leur«optimisme». Les cours devaient reprendre aujourd'hui, premier jour de vacances, après le week-end. Roule. Slimane Laouari
