Pour commémorer la vingtième année de la disparition de Himoud Brahimi dit Momo, les Editions El Ibriz en partenariat avec la fondation Casbah et l'association Lumières, a organisé samedi, une rencontre au Palais des Raïs à Alger. Doudja, la fille de Momo, certains de ses amis et habitants de la Casbah tels que Belkacem Babaci ont tenu à apporter leur témoignages autour de cet homme que même des personnes très proches de lui n'arrivaient pas à connaître toutes les facettes. Il est rappeler que Momo était cet homme qui ne passait pas inaperçu malgré sa démarche lente. On le voyait passer portant toujours sa tenue traditionnelle et son couffin d'Algérois d'autrefois. Le petit vendeur de fruits et légumes de Djamaâ El Yhoud, qui se trouve à quelques dizaines de mètres de son domicile de la basse Casbah, le connaissait, le libraire, le journaliste et le professeur d'université le connaissaient. Tout le monde voulait discuter avec Momo et Momo discutait avec tout le monde. Né en 1918 à la Casbah d'Alger qu'il ne refusera de quitter que pour rejoindre son créateur, Himoud Brahimi alias Momo a eu plusieurs facettes intéressantes durant sa longue vie. Se cachant parfois derrière ses éclats de rire exceptionnels et ses coups de nerfs, l'homme était un penseur qui tenait à ses idées, un excellent comédien et acteur mais aussi un grand sportif. Homme ou poisson ? En effet, Himoud Brahimi avait battu le record du monde de plongée en apnée, en 1956, à la piscine de Paris. Au lendemain de cet exploit, un journal français avait titré un article «Homme ou poisson» avec une caricature de Momo avec un corps de sirène. Puisque l'humour ne lui manquait pas, Momo, qui se trouvait une fois sur une plage de l'Algérois, remarqua une Française qui bronzait seule sur un rocher isolé. Le champion a plongé et nagé sous l'eau plus d'une centaine de mètres pour sortir de l'eau face à la jolie femme. Momo, qui portait la barbe et les cheveux longs, se mit à lire quelques versets de la Bible à la jolie créature avant de disparaître en replongeant. La femme se dirigea vers la plage en criant : «J'ai vu Jésus, j'ai vu Jésus !» Il faut noter que le grand nageur avait la capacité de faire une prière complète à plusieurs mètres sous l'eau. Pour semer le doute et créer le mythe, Momo ,qui avait une très bonne connaissance du christianisme, avait à la fois, dans sa chambre, un portrait de la Vierge Marie d' un côté, et le noble Coran de l'autre. Il faut dire que Momo, qui faisait régulièrement ses cinq prières, était un farouche défenseur de l'Islam quand il le fallait. Comédien sur scène, lors des rencontres-débats et dans la rue, Himoud Brahimi était, en fait, un homme sérieux au travail, car il n' a jamais failli à ses missions durant sa longue carrière (25 ans) au niveau de la direction des impôts. L'homme s'est, également, occupé de son fils Mansour en l'inscrivant aux cours de l'association El-Mossilia pour en faire un virtuose du banjo et de la mandoline. Il est à noter que Momo était un grand amateur de musique andalouse. Un artiste complet Himoud Brahimi avait joué dans de grands films tel que Tarzan aux côtés de Johnny Weissmuller. Il jouera plus tard en 1948, dans Noces de sable d'André Swoboda et dans Les plongeurs du désert réalisé par Tahar Hannache et mis en musique par Mohamed Iguerbouchene, un film tourné complètement avec des Algériens que les Français refuseront de diffuser. Après l'indépendance, Momo donnera des cours de théâtre avant de retourner au cinéma. En 1971, il joue dans Tahya Ya Didou où il brillera par les déclamations de son premier poème Mienne Casbah (traduit) qu'il avait écrit en 1949. On le verra également dans Vent de sable de Lakhdar Hamina et dans Le clandestin de Benamar Bakhti. Malgré tous les témoignages, il reste difficile d'élucider d'autres facettes de l'homme qu'était Himoud Brahimi. On ne saura jamais tout sur cet artiste, poète, philosophe, nageur et grand amoureux de la Casbah d'Alger.