Suite à son retrait de l'alliance présidentielle, Aboudjerra Soltani, président du mouvement de la société pour la paix (MSP) explique les raisons de son choix en animant une conférence de presse hier à son siège à El Mouradia. D'emblée, le président a remercié ceux qui ont respecté sa décision contrairement à ceux qui parlaient de «non-événement» en faisant référence au FLN et à son SG Belkhadem. A cet effet, il explique que l'alliance présidentielle n'a plus lieu d'être et que cette gouvernance est devenue stérile d'un point de vue politique, stratégique et économique. Selon lui, «la tripartite ne correspond plus aux bases démocratiques qui lui ont permis de voir le jour». Le MSP attendait davantage des réformes présidentielles et pour lui, elles sont très en deçà de ce qui a été convenu au départ. «Lorsque nous avons signé l'accord qui nous unissait au RND et au FLN le 16 février 2004, nous envisagions cette union sur des fondements et des bases solides, ce qui n'a pas été respecté, d'où notre choix de continuer notre trajectoire politique de manière indépendante», a-t-il dit en insistant sur l'utilité de décentraliser les structures étatiques qui, selon lui, «limitent la scène politique uniquement à la capitale». Pour ce qui est des réformes présidentielles, il a souligné leurs lacunes et estime qu'elles «devraient davantage s'axer sur les doléances du peuple et non pas seulement sur le domaine économique, financier et politique». A la veille du cinquantenaire de l'indépendance, M. Soltani a aussi insisté sur l'importance de revoir la politique et le système mis en place ainsi que la position des dirigeants. Des réformes superficielles «Il est primordial de tracer une nouvelle carte politique avant les législatives», maintient-il. Il a d'ailleurs qualifié les réformes de «superficielles» et a reproché au gouvernement de tenir compte uniquement de «l'avis des élus et ministres» dans leurs prises de décision, et appelle à plus de proximité avec le peuple. S'agissant des réformes initiées par le chef de l'Etat et éviter un printemps maghrébin du type libyen, tunisien et égyptien, le chef de file du parti dira à ce propos que les réformes ne sont que des projets qui n'ont pas abouti. «Les dirigeants ne sont pas allés au fond du problème et se sont contentés de simples idées sans aller au fond des revendications de la société», indique le président du MSP. En se retirant de l'alliance présidentielle, le MSP aspire à un gouvernement technocrate, où la démocratie, la transparence et les libertés seront les maîtres mots de la gestion politique. «Il serait malsain de notre part de nous présenter aux législatives tout en restant au pouvoir et en utilisant le financement de l'Etat pour notre campagne», a soutenu le président du MSP qui a aussi soulevé un point épineux relatif au «lavage de cerveau» qui s'opère par les hauts responsables au niveau des zones reculées du pays. En effet, en vue de l'obtention de certains marchés et de projets de développement local, les partis au pouvoir n'hésitent pas à promettre des marchés aux investisseurs en contrepartie de leurs voix pour les élections. «Le MSP se donne pour cheval de bataille d'éradiquer ce genre de pratique et de mettre en place un appareil exécutif dénué de toute forme de corruption», selon le premier responsable du mouvement. «Notre décision n'est pas une stratégie politique en vue de nous présenter aux élections et si ça avait était le cas, ce choix ne se serait pas fait lors d'un conseil en session ordinaire mais plutôt lors du congrès du parti», a indiqué M. Soltani, ajoutant : «Nous n'avons pas changé de programme politique, nous avons seulement rénové notre programme». Par contre, il n'a pas écarté sa probable intention de se présenter aux élections prochaines. Les réelles motivations de Soltani Il y a aussi de quoi se poser des questions sur les réelles motivations du MSP qui l'ont poussé à ne quitter l'alliance que dix ans après. En effet, si cette union ne lui convenait pas, il aurait dû se prononcer à ce sujet dès le début et non pas attendre toutes ses années. Ainsi, M. Soltani prétend qu'il n'y a pas derrière cela un intérêt individualiste, mais prône plutôt l'intérêt commun du peuple en voulant lui redonner espoir et le faire participer aux changements, en vue d'une ouverture politique. «Ces dix années nous ont permis d'acquérir davantage d'expériences sur la gestion et le politique», explique Soltani. D'après lui, ces dix dernières années étaient l'occasion de faire le point sur les événements bouleversants qu'à connus l'Algérie, et le MSP a accompagné le gouvernement pour appuyer davantage la concorde civile, la réconciliation nationale et maintenir «la paix» après la réconciliation en mettant en place des réformes. Il a ainsi comparé la scène politique à une «partie de football» où l'on réalise les meilleurs scores au deuxième round. Le président du MSP se prononce également sur sa position envers le RND et le FLN et dira à ce propos qu'«ils ne sont pas nos ennemis mais plutôt des concurrents aux prochaines législatives». S'agissant de la création d'une alliance rassemblant tous les partis à tendance islamique pour se présenter en liste unique aux législatives, M. Soltani s'est dit ouvert à toute forme de propositions et qu'il n'a aucun complexe envers aucun parti de quelque obédience soit-il. «Il faut laisser au peuple le libre arbitre pour se prononcer sur ses préférences, car aucun de nous ne peut prétendre savoir ce que sera la scène politique dans les six mois qui viennent», indiquera le premier responsable du MSP. Pour ce qui est des législatives, M. Soltani a appelé à plus de transparence et de neutralité dans l'organisation des élections et insiste sur un «contrôle judiciaire» et sur le renforcement de la surveillance en amont et en aval du déroulement des opérations de vote. Pour ce qui est de la Turquie dont le président soutient les Algériens dans leur conflit avec les Français pour la reconnaissance des crimes de guerre commis lors de la guerre d'indépendance, M. Soltani dira : «Toutes les recommandations internes ou externes sont les bienvenues, du moment qu'il ne s'agit pas d'ordres ou de sommations. Cependant, il est aussi nécessaire de rappeler qu'il n'y a pas que les français qui ont commis des exactions, des crimes et des atrocités en Algérie, car les Turcs ont aussi du sang sur les mains et ont aussi commis des abominations durant leur présence en Algérie, et ce n'est parce qu'ils sont musulmans qu'il faut oublier et pardonner.» Il serait aussi judicieux de leur demander de reconnaître leurs crimes et cela en demandant l'avis du peuple», déclare M. Soltani. Dans le même ordre d'idées, il est à rappeler que le premier responsable du parti s'est récemment rendu en Turquie sur invitation du Premier ministre Erdogan et qu'il a dit en ce sens que «l'islam selon le modèle turc est une bonne expérience et il n'y a aucun mal à reproduire les succès enregistrés chez nos voisins».