Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
L'Algérie, la Libye, la Syrie, les révoltes et les désinformations médiatiques en débat Plantu rencontre des jeunes caricaturistes, étudiants des Beaux-arts, artistes et autres
Le célèbre caricaturiste français du quotidien Le Monde, Plantu, a rencontré hier au centre culturel français (CCF) des jeunes caricaturistes, étudiants des Beaux-arts et autres artistes algériens avec lesquels un débat aussi enrichissant que passionnant a été engagé autour de plusieurs thèmes internationaux. Plantu s'est dit très satisfait du contenu des débats et exprimé le souhait que de telles initiatives se renouvellent et se multiplient. La rencontre, caractérisée par une ambiance aussi sympathique qu'intellectuelle et franche, à laquelle a participé le célèbre caricaturiste et bédéiste algérien Slim, n'a pas connu que des convergences dans les idées, positions politiques, concept de l'humanisme et de démocratie, mais l'écoute de l'autre était là, l'acceptation de l'autre, malgré les différences de convictions aussi. «Les gens ne savent pas combien la presse écrite algérienne est aussi libre», a lancé Plantu. Slim rappelle que «trois caricaturistes ont été assassinés par les terroristes» et que «par conséquent, une certaine terreur existe toujours empêchant les caricaturistes algériens de s'éclater». «Le fait de dessiner Belkhadem comme je l'ai fait sans être persécuté est une preuve que la presse écrite en Algérie est très libre», souligne Plantu. Plantu et Slim échangent des exemples de leurs expériences respectives, sous forme d'un débat très suivi par les jeunes caricaturistes, étudiants des Beaux-arts, artistes et autres présents. Le ton est libre, à tel point que parfois le débat s'élargit sur des questions d'actualité internationale. Bernard Henry Levi (BHL) aussi a été cité. «Vous savez, BHL est membre du conseil d'administration de mon journal (Le Monde), n'empêche que j'ai fait une caricature sur lui et elle est passée», lance Plantu qui, un peu plus loin, et sur une autre question, dira que «si BHL et Sarkozy m'avaient envoyé à Tripoli, j'aurais compris pourquoi». Le célèbre caricaturiste exprime, par là, sa connaissance du degré d'implication de BHL dans le conflit en Libye. Cependant, il est loin d'être un sympathisant du colonel Mouammar Kadhafi. «Mouammar Kadhafi est un fêlé. Il avait promis, par son fameux «Zenga Zenga» de raser la population libyenne, si ce n'était l'intervention de l'Otan». Une bédéiste algérienne lui exprime son désaccord. «L'Algérie a vu juste en refusant l'intervention militaire de l'Otan en Libye. L'Occident n'avait pas à intervenir dans un pays voisin.» «C'est parce que la Ligue arabe n'est pas intervenue pour stopper le massacre des Libyens que l'Otan est intervenu», répond Plantu. «Si comme si vous me dites que les alliés n'avaient pas à intervenir pour sauver la Pologne envahie en 1932 par Hitler et ses troupes», argumente également le caricaturiste français. «Je tiens, par ailleurs, à vous parler de certains médias français, dont France 24. Elles font dans l'exagération. Je suis d'ici et j'ai été fortement surprise de prendre connaissance d'informations diffusées par ces médias sur les émeutes du 5 janvier 2011. J'ai vu de mes propres yeux ce qui s'était passé et les informations diffusées et égarées n'avaient aucun fondement. Je présume que ça pourrait être la même chose pour la Libye et la Syrie», réplique la bédéiste algérienne. «Moi, en tant que caricaturiste, je suis obligé de me référer à des sources d'informations que j'estime crédibles, pour faire mes caricatures, comme en Libye. Je n'ai pas la compétence de vérifier si tels faits sont réels ou faux. Cependant, Mouammar Kadhafi est fêlé», insiste le caricaturiste du Monde. Un autre jeune Algérien intervient et pose le problème de la médiatisation faite par certains organes de presse occidentaux et les enjeux économiques qui la motivent. «Ecoutez, l'Otan n'a pas fait ce que les Etats-Unis d'Amérique ont fait en Irak avec l'invasion du pays, décidée par Georges Bush. C'est incomparable avec la Libye. En Libye vous ne voyez pas de militaires occidentaux circuler. L'Occident a juste aidé les Libyens par de la logistique pour se débarrasser du régime de Mouammar Kadhafi», estime encore Plantu. La jeune bédéiste algérienne évoque le dossier iranien. «Ce n'est pas parce qu'ils ne sont pas d'accord avec Ahmadinejad qu'il faudra bombarder le pays. S'il faudra un changement, il doit venir des Iraniens», selon elle. «Je ne critique pas le peuple iranien. C'est un groupe de chiites qui dirige le pays et le peuple à lui seul ne peut pas y faire face». Pour ce qui est de la liberté de la presse, Plantu reconnaît que «Dilem a fait publier des caricatures que je ne peux pas faire publier dans mon pays, dont je suis fier et qui est, pourtant, de démocratie». «Des caricatures sont publiées, en Algérie, et pourtant ne peuvent pas être publiées en France», explique-t-il. C'est dire, selon lui, la liberté de ton de la presse papier, en Algérie. «Dans mon journal (Le Monde), je suis invité à descendre en flammes Sarkozy mais je ne peux pas critiquer, aussi ouvertement, la gauche dont la publication fait partie», confie-t-il. Le débat empreint de franchise et de l'acceptation des convictions de l'autre devrait, selon l'avis de tous les participants, se renouveler régulièrement.