Les cocaïnomanes ont le drapeau en berne. Un groupe est pris dans les filets de la police et la justice a frappé! Quelle peut être l´attitude de policiers de la brigade de lutte du banditisme au sein d´un commissariat où ont atterri des informations selon lesquelles la cocaïne circulait bel et bien et à un prix d´or dans les artères de Douaouda? Elle ne peut que susciter un élan que seuls les agents férus d´investigations peuvent avoir. La salle d´audience de la cour d´Alger du Ruisseau, rue Fernane (ex-Vauban) connaissait des tics sur les visages des proches et amis des huit accusés de trafic de drogue et quelle drogue! La blanche, la plus redoutée! La plus dégueulasse! Dans la foule, il y a ceux qui ne croient pas que des familles soient tombées dans le piège du gain facile, rapide mais dévastateur. Il y a ceux qui en ont vu et entendu, des vertes et des pas mûres. Forcément, si ces gens sont en taule, c´est qu´il n´y a pas de fumée sans feu. Alors, que s´est-il passé exactement? Nous sommes en mars 2007, Abdekader, 70 ans, à la retraite s´adonnait paisiblement en compagnie de son fils Mohamed à une partie de pêche sur les abords de la plage Colonel Abbas sise à Douaouda-Marine (wilaya de Tipaza). Lorsqu´ils s´apprêtaient en fin de journée à retirer les filets jetés la veille, ils furent surpris d´y découvrir parmi le menu fretin, un colis bien ficelé, soigneusement plié et étanche. Ouvrant par curiosité l´une des multiples plaquettes contenues dans le fameux colis, ils aperçurent une poudre blanche qu´ils croyaient, au départ, être de la farine mais qui s´est avérée être de la pure cocaïne suite à l´expertise scientifique diligentée par le laboratoire de Rostomia (Châteauneuf), sur réquisition du juge d´instruction du tribunal de Hussein Dey (cour d´Alger). L´affaire regroupe huit personnes. Le père, ses deux enfants, sa bru et son gendre, puis le beau-père et son gendre, ayant aussi un lien de famille avec les premiers cités. Et enfin la huitième personne n´ayant aucun lien de parenté avec le reste, ce qui donnera le nombre de sept individus qui seront poursuivis de ces graves délits, citons: constitution de groupes organisés de stockage et de commercialisation de stupéfiants et quels stupéfiants, (ce qui est en soi une première dans nos juridictions! Oui une première!) Les faits cités plus haut sont qualifiés de crime par les dispositions de l´article 17 alinéa 1 et 3 et 23 de la loi n°18-04. Quant à l´épouse de Mohamed B., Fahima B., elle est sous le coup de complicité. Le tribunal criminel constitué, outre Merzoug Brahimi et Allalou-Bahia Tabi, des deux jurés tirés au sort, débute les débats tambour battant. Il y a du monde avec en prime trois avocats aussi discrets que les faits avant que la loi ait mis sur la bordure de crime à réprimer avec le maximum: Maître Bousseliou, Maître Chourrar Liès et Maître Ouali Laceb. Ce dernier sera d´ailleurs tranchant lors de sa plaidoirie et dira à toute la composante du tribunal criminel son «amertume d´avoir assisté à un procès où les juges étaient beaucoup plus enclins aux nombreuses lectures et relectures des procès-verbaux des éléments de la police judiciaire qu´à aller au-devant de l´intime conviction. Et cette dernière ne peut être réussie qu´en alliant un excellent interrogatoire à une saine lecture du juge d´instruction.» Le réquisitoire de la représentante du ministère public sera mi-figue, mi-raison même si elle avait mis l´accent et elle a eu raison sur la gravité des faits qui entrent dans l´histoire de notre justice car c´est vraiment une première que ce trafic de cocaïne flottante. La procureure générale avait d´ailleurs sous-entendu que cette affaire, la première du genre doit être impérativement la dernière, sinon c´est la dérive-même, si le cannabis et les drogues «cousines» font des ravages quotidiennement malgré une aveugle mais justifiée répression à tous les niveaux de l´Etat qui joue son va-tout pour en venir à bout. C´est dans ce sens, qu´elle va requérir «globalement», pour tous les accusés, la réclusion à perpétuité ce qui va tout de go permettre au premier plaideur, Maître Ouali Laceb, qui défendait Bouzid S, l´oncle maternel de l´épouse de Ahmed L. et Mohamed B. s´est jeté avec armes et bagages dans le bain de l´adage que «la meilleure défense demeurait l´attaque» en lançant, d´emblée, à l´intention du tribunal criminel qu´il avait une première observation pour ce qui est du réquisitoire de l´honorable représentante du parquet. Elle n´a pas eu l´adresse et l´art qu´il faut dans de pareilles circonstances de trier les distributions de demandes de peines. «Demander comme ça la perpet globalement est en soi un acte désagréable, mais vous, jurés et magistrats, saurez où aller lors des délibérations donnant à chacun son dû», s´est écrié l´avocat de Koléa qui mis le feu sur «l´innocence de Bouzid S. et celle de Mohamed B. qui ont été loin, très loin des faits.» Tour à tour, les deux autres défenseurs ont tenté de faire admettre au tribunal criminel qu´il y a dans cette affaire seulement des déclarations, des dires, des mots, jetés par les uns et les autres. «Mustapha a été constant dans les déclarations durant toutes les étapes de l´instruction et ce lundi», avait balancé Maître Liès Chourrar. «Mon client a été seulement montré du doigt par des accusés comme étant un dealer ayant acquis auprès d´eux quatre kilogrammes de cocaïne contre une pseudo-somme de trente cinq millions de centimes et le paquet remis s´avérera être une bûche entourée de papier journal, remise avant de prendre ses jambes à son cou, de s´évaporer dans la nature jusqu´au jour où il avait été interpellé, interrogé, accusé et jugé ce jour de janvier 2009», avait récité l´avocat brun, Maître Bousseliou. Après délibérations le verdict est tombé avec cinq acquittements, deux peines de vingt ans (le père et le fils) et une réclusion criminelle à perpétuité (Ahmed L.). Donc Bouzid S., Mohamed B. Azzedine, Fahima B. et Mustapha R. sont rentrés chez eux alors que les autres devront méditer sur cette histoire de cocaïne flottante, d´un vieil homme, de la mer et d´une famille entière décimée...