L'avocat de deux présumés voleurs a passé une vingtaine de minutes à expliquer pourquoi ils sont innocents. Maître Djamel Boulef-rad défend deux jeunes de Boufarik qui ont failli passer devant le tribunal criminel avec l'association de malfaiteurs, vol de nuit et tout le chapelet menant à la perpèt. Heureusement que la chambre d'accusation a suivi les plaidoiries de l'avocat qui a fait atterrir le dossier en correctionnelle en passant par l'instruction. «Les deux jeunes ont été neutralisés par le papa et son fils, victimes du méfait. C'est un point important car les faits qui remontent à novembre 2012 ont laissé apparaître plusieurs zones d'ombre dont les témoignages recueillis en avril 2013, avaient levé un peu le voile au-dessus de la requalification des faits. Ça ne collait pas. Les faits et la loi n'allaient pas ensemble, la main dans la main. Les poursuites débouchèrent sur l'éloignement de l'association de malfaiteurs, «cet article 177 si redoutable» s'était écrié l'avocat de Blida qui a, avec la permission de Nassima Saâda, la juge, pris son temps pour sensibiliser le tribunal sur la réalité des poursuites avec leurs «grossissements» menant à la crim. La nature même du «butin», une R4, ne peut aller vers la criminelle. La tentative de voler les roues de véhicules n'a même pas été retenue. Seul le vol de l'auto a été retenu. Une des victimes a déclaré, entre autres que «nous étions dans une brume épaisse» et donc la visibilité était nulle. Le doute est donc retenu. Non, le parquet ne l'a pas entendu de la même oreille attentive! «Neuf mois de doute que ce dossier. Et vous êtes priée Madame la présidente de bien examiner le dossier qui ne contient aucune concordance de culpabilité.» a enfin conclu le plaideur qui, lorsqu'il avait fini, s'était aperçu que la salle d'audience était bondée. Une foule dont le tiers était composé de membres des deux familles des détenus, des proches, voisins et amis. Il y avait vraiment beaucoup de monde. Nous aurons une idée au moment de l'évacuation de la salle. Il y a, soulignons-le au passage, une - disons - tradition chez nos jeunes, qui veut que lorsqu'un ou plusieurs voisins inculpés, mais dont les dossiers sentent le doute, un élan de solidarité a lieu le jour du procès, juste pour soutenir les jeunes à la barre. Et quand bien même les débats sont renvoyés, les jeunes quitteront la salle d'audience déçus, mais jamais abattus. Ils reviendront après autant de renvois. C'est dire si nos jeunes ont le sens de l'amitié, du bon voisinage et de la solidarité. Et dans ce contexte, lorsque Maître Boulefrad sent du «renfort» derrière son dos, il s'adonne à un véritable festival long, détaillé, épicé par des anecdotes fraîches sans pour autant agacer les magistrats et magistrates surtout celle du jour: Nassima Saâda, une jeune juge qui sait s'y prendre avec les robes noires tout en gardant bien en main la police de l'audience que beaucoup d'autres collègues, souvent plus expérimentés, perdent en permettant aux policiers de faire le nettoyage, comme par exemple, saisir un mobile qui grésille alors que c'est interdit ou encore faire asseoir un curieux qui entend mal. Saâda adore les agents de police qui sont à l'écoute de tous ses désiratas qui vont en droite ligne avec la loi. Et ce mercredi, l'avocat de Blida a tout entrepris pour permettre aux deux inculpés de rentrer chez eux après neuf mois de détention préventive, comme l'a si bien expliqué Maître Boulefrad, le dossier a mis beaucoup de temps en instruction surtout que les témoins avaient affirmé que durant le méfait, il y avait du brouillard (on était en novembre 2013 et donc impossible de reconnaître comme il faut les deux voleurs sous tous les angles). Ce qu'avait voulu obtenir le plaideur, c'est amener Saâda sur la ligne du doute et donc arriver à voir les deux détenus, rejoindre leurs familles en cette dernière semaine du Ramadhan 1434. Et lorsque le conseil s'était retiré après avoir demandé la relaxe, même au bénéfice du doute, Nassima Saâda, légèrement affectée par le jeûne et le nombre de détenus qui ont défilé à la barre, a eu six secondes pour dessiner sur ses lèvres fines, un très beau sourire illuminant son beau visage. Etait-ce ou annonciateur d'une bonne décision?