Patriotisme et professionnalisme    Quelles est la situation de la balance commerciale et des exportations hors hydrocarbures en 2024 de l'Algérie ?    Des prix « lignes rouges » et des représailles contre les contrevenants    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Kiev doit céder les territoires conquis par la Russie    Premier festival de la cuisine halal    Meurtre d'un jeune musulman en France: Retailleau accusé d'attiser l'islamophobie    Le CS Constantine ne peut s'en vouloir qu'à lui-même    L'USMH conserve la tête, l'IRBO relégué en Inter-Régions    La DSP et les gestionnaires des EPH joignent leurs efforts pour une prise en charge des patients    Avant-première du documentaire ''Zinet Alger : Le bonheur'' de Mohamed Latrèche    Présentation à Alger des projets associatifs subventionnés par le ministère de la Culture et des Arts    El Mahdi Oualid: adopter un référentiel national de formations et de compétences pour faciliter le recrutement    Rencontre régionale des journalistes et professionnels des médias: appel à adapter le système de formation aux mutations numériques    CIJ: l'Algérie participe aux audiences sur la demande d'avis relatif aux Obligations de l'entité sioniste concernant les activités des Organisations onusiennes en Palestine    Algérie-Inde: renforcer la coopération dans les domaines de l'énergie et des mines    Le drapeau algérien installé au siège du Conseil de paix et de sécurité de l'UA    Le président de la République reçoit les lettres de créance de cinq nouveaux ambassadeurs auprès de l'Algérie    Oran : visite guidée des médias au Centre d'instruction des troupes d'infanterie à Arzew    Hadj 2025 : poursuite des réservations en ligne des chambres d'hôtels à La Mecque    La BNA augmente son capital social de 100%    Goudjil félicite la championne olympique Kaylia Nemour pour son excellente performance à la Coupe du monde de gymnastique au Caire    Constantine commémore le 64e anniversaire de la mort en martyr de Messaoud Boudjeriou    Gymnastique/Coupe du Monde-2025: 2e médaille d'or pour Kaylia Nemour au Caire    Deuxième session du Baccalauréat des arts: lancement des épreuves pratiques    Santé: rencontre de coordination pour évaluer la performance du secteur    CHAN 2025/Algérie-Gambie: première séance légère pour les Verts    Colloque scientifique à Alger sur le manuscrit d'Avicenne "Le canon de la médecine"    Saâdaoui annonce la propulsion de trois nouvelles plate-formes électroniques    Les renégats du Hirak de la discorde    Mise au point des actions entreprises    Ça se complique au sommet et ça éternue à la base !    Un site historique illustrant l'ingéniosité du fondateur de l'Etat algérien moderne    Sept produits contenant du porc illégalement certifiés halal    Se présenter aux élections ne se limite pas aux chefs de parti    Un art ancestral transmis à travers les générations    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La dernière mission d'un moudjahid
J'AI VECU LE PIRE ET LE MEILLEUR DE MOHAMED SAID MAZOUZI
Publié dans L'Expression le 14 - 05 - 2015

Dénonçant la tragédie d'une histoire tronquée par laquelle on a voulu cacher bien des choses et ainsi altérer gravement l'identité nationale, Mohamed Saïd Mazouzi remet bien des idées en place, les fausses comme les occultées.
Une profession de foi, tel est le voeu, telle est la volonté de Mohamed Saïd Mazouzi qui entend apporter, dans ce livre intitulé J'ai vécu le pire et le meilleur, une pierre à l'édifice mémoriel de l'Algérie combattante puis indépendante. L'homme qui a vécu la prison de 1945 à 1962, qui a éprouvé les deux versants de l'histoire encore édulcorée du pays, affiche son intention réelle de témoigner, non pas «de nos petites histoires individuelles, somme toute sans importance, mais de ce que le peuple a subi, de ce qu'il a sacrifié et enduré pour que l'Algérie continue à exister».
De ces mémoires recueillis par Lahcène Moussaoui, il convient de retenir les éléments-clés indispensables à la compréhension du message. Après une présentation émouvante de ce que fut l'enfance à l'épreuve d'une réalité coloniale que l'école ne pouvait masquer, Mazouzi explique la genèse d'une prise de conscience à la source même de ces mémoires qui, «en toute simplicité, participent d'un souci d'informer sur ce peuple, son passé, ses épreuves et son combat, l'esprit et les valeurs qui l'ont animé».
Et c'est précisément de ses valeurs que Mazouzi a voulu témoigner, affirmant de prime abord que «la Révolution algérienne est si grande par elle-même qu'elle n'a pas besoin d'en rajouter» et que les expériences vécues, que ce soit celle de la prison, de la résistance ou de l'oeuvre de bâtisseur au lendemain de l'indépendance, ont été d'une richesse et d'un enseignement intenses.
Dénonçant la tragédie d'une histoire tronquée par laquelle on a voulu cacher bien des choses et ainsi altérer gravement l'identité nationale, Mohamed Saïd Mazouzi remet bien des idées en place, les fausses comme les occultées. Parlant de cette tendance à minimiser, voire à annihiler la part d'une région comme l'Oranie dans la résistance puis la guerre de Libération nationale, il condamne avec la plus extrême des énergies tout ce qui tente de porter atteinte à l'unité nationale, à travers la stigmatisation des uns et des autres, selon leur région et leur ethnie.
Narrant avec force détails les conditions dans lesquelles a commencé son combat, vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, aux côtés de compagnons tels que Omar Oussedik, Ali Laïmeche puis Aït Hamouda, Hocine Aït Ahmed, Omar Boudaoud, il écrit que «les années 1943, 44 et bien sûr 45 ont été des années d'intense activité du parti clandestin, le PPA» avant de relater les conditions de son arrestation, au souk de Tizi Ouzou, suite à l'attentat manqué contre le bachagha Aït Ali. Cela se passait en mai 1945. Après plusieurs jours de torture ignoble, le jeune Mazouzi va connaître les affres de diverses prisons, d'abord, entre Barberousse (Serkadji) et Tizi Ouzou, puis Blida, les prisons de France, d'Oran, d'El Harrach ou d'El Asnam.
Le plus vieux prisonnier de la résistance puis de la guerre de Libération nationale reverra la lumière du jour avec la renaissance d'une Algérie libre et indépendante, après dix-sept ans d'incarcération. Nommé mouhafadh à Tizi Ouzou par Rabah Bitat, il énumère l'ampleur des travaux qu'il a fallu engager pour créer l'Etat algérien, égratignant au passage Aït Ahmed et son leitmotiv syndical ou le wali de l'époque qui travaillait «en dilettante».
L'épisode du voyage à Londres pour assister au Congrès du Labour Party, accompagné d'un traducteur nommé Mouloud Kacem Naït Belkacem, est des plus émouvants, par-delà une pointe d'humour sarcastique consacrée à sa redingote (p231).
Parlant du Congrès de 1964 et de ses conséquences, il indique avoir «préféré se retirer plutôt que d'exprimer, dans la violence, ses divergences», telles qu'elles apparaissent dans plusieurs pages consacrées à la démesure de Ben Bella. Suivent les péripéties avec Chérif Belkacem, autour de Tizi Ouzou, «à croire que cette ville était inscrite, invariablement dans mon destin», s'émeut Mazouzi.
Sur la période Boumediene, Mazouzi sera limpide et élogieux, rendant à l'homme sa part de mérite, soucieux de contribuer à la vérité:il fut «un dirigeant, un leader de son époque, un homme qui a été utile à l'Algérie», porteur d'une «politique franchement anti-impérialiste et au service de la population» dont il a «libéré la parole» lors de la Charte de 1976. A l'inverse, il tracera de Chadli un portrait au vitriol, forçant les contradictions du personnage et ses choix de personnages qui ont «mené le pays à la ruine». Il en tirera peu après la conviction que «au plus haut niveau de l'Etat, le comportement de courtisan et la complaisance opportuniste prenaient le pas sur l'esprit de responsabilité». L'épisode de la 6e Conférence des Non-Alignés à La Havane où Chadli n'a finalement pas lu le discours préparé par Benyahia, rendu rachitique par les nombreuses corrections des conseillers à la Présidence, allait sonner le glas de l'ère Boumediene, à une époque où l'Urss elle-même entamait son déclin fatal. Le même déclin qui allait affecter l'Algérie, après le Congrès du FLN, en février 1989 et la réforme de la Constitution suivie de l'ouverture aux «associations à caractère politique» qui «a permis à une nébuleuse islamiste d'agir en toute légalité pour saper l'Etat et embrigader des pans entiers de la société dans une totale confusion».
«Une véritable descente aux enfers», commente Mazouzi tout en rendant un hommage appuyé à Liamine Zeroual «un honnête homme et un brave soldat» qui, par son attitude de patriote intègre, aura «mérité de la nation» à laquelle il a rendu une part de dignité, jamais retrouvée depuis la mort de Boumediene.
La conclusion est à frémir quant à «la gestion astucieuse de la rente» pétrolière et «l'inquiétante perspective de rupture définitive entre l'Etat et la société», avec une «pauvre Algérie chaque jour plus éloignée des lendemains qui chantent», malgré la certitude d'un sursaut (révolutionnaire?) dont on ne sait quand et comment il se produira, tôt ou tard...
Editions Casbah, 432 pages


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.