La crise, après une brève phase de rémission, en est de nouveau à un pic de tension. Le mouvement El Islah semble loin de quitter la zone de turbulences. C'est du moins la conclusion qui vient à l'esprit, à la lecture du communiqué rendu public hier par une douzaine de députés du mouvement, dont le président de la commission de l'habitat à l'APN. Les nouveaux reproches qui sont faits à Abdallah Djaballah, consistent en le fait que ce dernier ait continué de s'adresser à la presse, y étalant le linge sale du parti alors que, lors de sa rencontre avec le président du madjliss echoura, plus haute instance entre deux congrès, il avait été entendu que l'ensemble des différends se règleraient désormais loin des yeux indiscrets des médias. L'ampleur que semble prendre la crise est telle que les sept cadres frondeurs sont désormais rejoints par douze députés, dont certains pèsent lourd au sein de l'hémicycle, cela au moment où de nombreux cadres du parti se trouveraient dans la même situation. Dans le communiqué transmis hier à notre rédaction par ces 12 parlementaires, un soutien inconditionnel est apporté aux revendications des «Sept». Il y est même question de «redressement», afin de ne faire guère dans l'originalité, quand ce sont toujours les vieilles marmites qui font les meilleures soupes. Un appel est même lancé en direction des cadres, militants et élus afin de ne pas se laisser prendre à la «campagne de dénigrement des frères frondeurs», leur demandant au contraire, de prendre la peine d'écouter tout le monde avant de se prononcer. Djaballah, que certains chercheraient à évincer par tous les moyens, vivrait ainsi des moments difficiles, puisque les auteurs de ce communiqué ne revendiquent rien moins qu'une réunion extraordinaire du madjliss echoura. Accepter cela, c'est commettre la même erreur qui lui avait coûté la perte de son ancien parti, le mouvement Nahda vers la fin de l'année 1998. Djaballah, devenu un vieux routier de la politique, comme nous le disent des sources qui lui sont proches, sait parfaitement comment gérer ce genre de crises artificielles. Nul ne peut contester non plus le fait que le mouvement El Islah lui doit sa notoriété, sa force ainsi que le fait qu'il soit devenu la première force islamiste dans le pays et le troisième parti politique sur l'échiquier électoral national. La meilleure preuve est le fait que son départ du mouvement Ennahda a été fatal à ce dernier, alors que le tout jeune mouvement El Islah a connu une ascension fulgurante grâce à ce même homme. Cela ne doit quand même pas être une raison suffisante, estiment les plus sincères d'entre ses détracteurs, pour gérer de manière dictatoriale son parti. Djaballah, échaudé par son ancienne mésaventure et convaincu que c'est le pouvoir qui se trouve derrière l'ensemble des complots qui le visent régulièrement, a en effet pris les devants en verrouillant le jeu et en plaçant entre ses mains et celles de ses plus proches collaborateurs, l'ensemble des mécanismes décisionnels de ce parti. Affaire à suivre...