L'équipe du film L'amant double Que se passe-t-il à Cannes? Pourquoi la violence au cinéma s'est-elle banalisée? Il ne se passe pas un jour sans qu'un film projeté dans la sélection officielle ne soit bourré de scènes de violence. C'est le cas avec You we're never really here... film anglais de Lynne Ramsay. Constatez par vous-mêmes: un cou tranché montré en gros plan, du sang qui gicle sur le visage d'un homme. Ce dernier descend ses victimes à coups de marteau! Pas très propre tout ça. Le synopsis? La fille d'un sénateur disparaît, Joe, un vétéran brutal, torturé se lance à sa recherche. Il est confronté à un déferlement de vengeance et entraîné malgré lui, dit -on dans une spirale de violence. Dans un autre registre plutôt existentielo-psychologique est le drame français de François Ozon, Le double amant. A la sortie de la salle, les critiques fusent: «Quelle horreur!» ou encore «C'est un film qui prône le viol ma parole!». L'hémoglobine est en tout cas à chercher du côté de ces immenses tableaux qui se trouvent dans le musée dans lequel travaille Chloé. Ce film franco-belge est également en lice pour la Palme d'or. Ce film qui commence bien se termine en queue de poisson. Au final on en sort, en se disant qu'on n'a rien compris. Nous a-t-on menés en bateau depuis le début? Chloé n'est-elle finalement qu'une pauvre schizophrène? L'histoire est celle d'une jeune femme, 25 ans, souffrant de douleurs inexpliquées au niveau du ventre. Elle a vu tous les médecins et se résout à se rendre chez un psy. Campée par Marine Vacth, («Jeune et Jolie») désormais avec une coupe de cheveux courte qui lui va très bien, cette jeune femme fragile mais belle, tombe amoureuse de son psychothérapeute, Paul. Quelques mois plus tard, ils s'installent ensemble, mais elle découvre que son amant lui a caché une partie de son identité. Il possèderait un jumeau lui aussi psychothérapeute, mais exerçant une méthode de soins pour le moins pas catholique. S'ensuit une relation à double visage où l'ambiguïté, le sexe et la violence ont la part belle dans ce trio qui tangue entre désir, trouble du comportement et légende farfelue sur les jumeaux. L'on est loin du faux-semblant de Cronenberg, mais l'exercice du style de François Ozon finit par s'essouffler et tombe à plat. Chloé aurait, à sa naissance, absorbé le foetus de sa soeur jumelle, restée dans son ventre, d'où ses maux.... Fallait bien que le festival de Cannes 2017 ait son film trash dont la prétention cinéphilique flirte avec l'érotisme esthétisant. Dans Good Time, un thriller policier américain réalisé par Ben et Joshua Safdie, il est cette fois question d'un braquage qui tourne mal... Connie alias Robert Patinson réussit à s'enfuir, mais son frère Nick, quelque peu, retardé mental est arrêté. En prison il est tabassé à mort. Son frère décide par tous les moyens de le faire sortir de l'hôpital. Mais il se trompe de personne. Les bandages recouvrant son visage ne lui laissent pas trop le temps pour l'identifier. Il est désormais face à une personne qui est sortie la veille de prison et qui est loin d'être clean non plus. Commence alors, dans les bas-fonds de New York, une longue nuit sous adrénaline où la violence a droit de cité, telle ces images que les télés américaines diffusent à longueur de journée en direct pour traquer les criminels. Filmé d'une façon réaliste avec une intrusion dans les rues américaines, Good time donne à voir les péripéties de jeunes loosers qui passent leur temps à voler et à cogner pour survire. C'est encore plus flagrant dans le film Sans pitié du réalisateur coréen Sung-hyung Byun, présenté hors compétition, en séance de minuit. Un film d'action à souhait, mais dont l'émotion qui se dégage du jeune acteur au visage angélique et androgyne insuffle une certaine profondeur non négligeable à ce long métrage plein de rebondissements. Les personnages sont bien travaillés même si ce genre de film est peu commode surtout en Corée, avec ces combats de coups de poings à répétition peuvent saouler plus d'un. Un film de gangsters bien sympathique certes, mais où le sang ne cessera de couler à flots là encore. Enfin un film étrange qui ne nous laissera pas indifférents «Une femme douce» du réalisateur ukrainien Sergei Loznitsa. Que dire de cette histoire qui nous plonge dans une Russie broyée par la machine d'un fascisme éculé et absurde? Une histoire qui évolue dans un univers passéiste qui finira par se transformer dans le rêve de cette femme en un monde clownesque ridicule. Ballottée de ville en ville, une femme tente de rendre visite à son mari emprisonné. «Une fresque folklorique et désespérée sur l'inexorable disparition de toute voix discordante. Et la confirmation du grand cinéaste qu'est Sergei Loznitsa», souligne t-on. Une scène terrible vient secouer le spectateur. Si la violence sous-jacente que subit cette femme est bien présente et pesante car marquée par une indifférente criante à son égard et un parcours de combattant pour pouvoir rendre visite à son mari, dans un fourgon où elle est jetée par les policiers, la caméra brouillée du réalisateur, nous introduit dans une scène d'un viol collectif dont la caractéristique est qu'elle place l'image beaucoup plus dans le suggestif que dans le démonstratif. La férocité de cette scène est exacerbée par le cri assourdissant de cette femme qui se débat sauvagement alors qu'on lui déchire ses vêtements. L'on ne saura pas au final si cette femme au regard qui est loin d'être doux va retrouver son mari, seul comptait sans doute pour le réalisateur ce parcours qu'elle va mener et ses personnages et différents profils qu'elle croisera sur son passage, notamment des policiers placides, des escrocs qui tentent de profiter d'elle, et cette vieille femme notamment qui travaille dans les droits de l'homme, entre autres....tenant un gros sac en bandoulière, ou gisant dans une gare de train, par exemple, sont les quelques séquences des errements de cette femme dans une Russie méconnue dont les dialogues bien meurtriers sont le témoin d'une vie cruelle que mènent ces hommes et femmes dans cette Russie fantasmée et dépeinte presque comme dans un tableau... Il y a du pathétique surréel, mais du beau aussi dans cette singulière fresque cinématographique. Et l'on se demande au final qui recevra la Palme d'or et notamment et à qui allons-nous décerner les Prix d'interprétation masculine et féminine, entre autres?