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Les trois éléments pour la naissance d'un état
LES KURDES, UN PEUPLE ECARTELE
Publié dans L'Expression le 17 - 10 - 2017

Les Kurdes ont traversé durant l'histoire, diverses périodes mouvementées
Pour information utile, il n'est question ici que du Kurdistan irakien en raison de l'organisation d'un référendum d'indépendance. Le Kurdistan syrien, soviétique, (côté arménien), iranien, afghan, turc, en Azerbaïdjan ne sont pas concernés.
En droit international, l'acte de naissance d'un Etat exige la réunion de trois éléments:
-une population, ensemble d'individus rattachés entre eux par des liens soit juridiques comme la nationalité ou sociologique, (ethnolinguistique), (souvent les deux à la fois),
-un territoire, espace terrien reconnu par des frontières naturelles visibles ou par un tracé juridique),
- une autorité publique, l'existence d'organes exprimant la volonté représentative d'un Etat ou du peuple concerné,(parfois les deux sont réunis, fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses membres).
Pour savourer, à la juste valeur de la revendication, l'entrée par la grande porte dans le monde, j'ajouterais à cette sauce juridique, des ingrédients comme:
* la langue et sa culture,
*une religion quasi majoritaire,
*souvent l'existence d'un emblème.
Les Kurdes, d'une manière générale, remplissent les critères constitutifs et revendicatifs d'une souveraineté.
Pour information utile, il n'est question ici que du Kurdistan irakien en raison de l'organisation d'un référendum d'indépendance. Le Kurdistan syrien, soviétique, (côté arménien), iranien, afghan, turc, en Azerbaïdjan ne sont pas concernés.
Le cas du Kurdistan irakien
Le peuple kurde, entité ethnolinguiste, géographiquement des montagnes du Sud du Caucase dénommée Kurdistan. Ils se disent descendants des Kardouches. Les Hasanwayhides, les Marwanides et les Shaddadides sont les dynasties kurdes que l'histoire a recensées comme étant les plus connues sous l'emblème musulman. Les ayyoubides, fondés par Salah Eddine en 1514, ont clôturé celles-ci. Le XXe siècle a vu naître une prise de conscience d'identité nationale autour d'une entité ethnolinguiste constituant un peuple kurde avec un territoire: le Kurdistan tel que défini par le traité de Sèvres en 1920. Ce rêve kurde fut morcelé par l'intermédiaire d'une autonomie fragmentaire dans la partie soviétique, (1923/1926), celle de Mahabad en Iran en 1946, en Irak depuis 1991. Du côté turc, un conflit armé oppose les Kurdes à la Turquie qui interdit par ordonnance aux familles kurdes de porter un nom kurde.
Les kurdes à travers l'Histoire
Comme pour certains espaces géopolitiques, les Kurdes ont traversé durant l'histoire, diverses périodes mouvementées d'invasion, à savoir la domination des Macédoniens, Parthes et Sassanides, la période séleucide connue historiquement par la déportation des Kurdes en 181 (av J.-C.) en Anatolie Ouest, pour parer stratégiquement contre les Romains, l'ère romaine, (où Cordouène ou Gordiaea), (un district réputé partie du Kurdistan), était sous le contrôle romain durant quatre siècles jusqu'en 384) et sassanide, (ère connue par le culte du Soleil chez les kurdes établis au Nord de l'Irak actuel). A partir de 530, à la suite de quatre années de froid et d'épidémies, les Kurdes du Moyen-Orient subirent des attaques des Byzantins et des Syriens. La période médiévale, les conquêtes musulmanes: 641, les forts kurdes d'Adiabene furent conquis par les Arabes. Les Kurdes n'ont cessé de créer des problèmes aux Arabes, notamment sous les Califes de Baghdâd. En 696, ils joignirent les révoltes des Khariji puis, en 838 et en 905 plusieurs insurrections éclatèrent. Enfin, cinq principautés kurdes virent le jour: les Shaddadides, (951-1174), les Rawadides, (955-1221), les Hasanwayhdides, (959-1015), les Annazides, (990-1117), les Marwanides, (990-1117). L'unité a manqué à ces dynasties kurdes pour établir un pays kurde, mais les invasions massives issues de l'Asie centrale, (ayant conquis l'Iran), le Califat de Baghdad et les Turcs, (les Seldjoukides), annexèrent les principautés kurdes une par une, sûrement par manque d'unité. Tous ces éléments ont probablement empêché la réalisation de cette union. Vers 1150, le dernier monarque Seldjoukide, Ahmed Sanjar, à partir de ces territoires, a créé une province qu'il a appelée Kurdistan, avec pour capitale Bahar. Un témoignage de Marco Polo, (1254-1324), alors en route pour la Chine, affirme avoir rencontré des Kurdes à Mossoul. Au XIIIe siècle, les Mongols ravagèrent les terres kurdes et assassinèrent de nombreux chefs kurdes. Le XIVe siècle, une grande partie du Kurdistan fut conquise par Timur, (prince turco-mongol). Au XVe siècle, les Kara Koyunlu aidèrent les Kurdes à retrouver l'influence perdue puis, ils furent persécutés par la dynastie Ak Koyunlu à la suite de leur conflit avec les Kara. Après la période mongole, les Kurdes établirent plusieurs principautés kurdes, (Ardalan, (début du XIVe siècle), la plus importante, avec pour capitale Chahrizor, (Kurdistan irakien), transférée ensuite à Sinne en Iran, puis, Badinan, Baban, Soran, Hakkari et Bitlis). La dynastie Ardalan cessera de gouverner avec l'arrivée du monarque Qajar, (1848-1896).
Le Kurdistan irakien
Les Kurdes représentent environ 17% de la population irakienne. Ils se trouvent géographiquement dans le Nord du pays. La capitale Baghdad compte 300.000 Kurdes et près de 100.000 dans le Sud.
Conflit avec l'Irak. A la suite de plusieurs insurrections contre le régime de Baghdad à partir de 1960, l'Irak annonce en mars 1970, un plan de paix avec les insurgés prévoyant une autonomie kurde dans un processus d'exécution sur une durée de quatre années. Mais le régime de Baghdad après une politique d'arabisation tous azimuts déclencha une offensive en 1974 sur les régions riches pétrolifères tout en installant des Arabes dans ces riches régions, particulièrement autour de Kirkouk. 200 000 Kurdes furent déplacés vers d'autres régions irakiennes et en obtenant des Iraniens de couper les vivres aux Kurdes dans le cadre de l'accord d'Alger. En 1980 le régime irakien a déclenché une véritable politique antikurde condamnée par les instances internationales parce qu'elle a véhiculé des mesures répressives: massacres de civils destruction de milliers de villages et la déportation de milliers de Kurdes vers le Sud et le centre de l'Irak. Elle entraîna une riposte aboutissant à une guerre civile. En 1988, cette répression reprit avec une grande férocité. 2000 villages furent détruits et 50.000 victimes kurdes. En 1991, une insurrection éclata encadrée par les deux partis kurdes, le Parti démocratique du Kurdistan, le PDK) et l'Union patriotique du Kurdistan,(UPK). Pour soutenir l'action kurde, le Conseil de sécurité a permis la création d'un «abri sûr». Pour assurer sa sécurité, des troupes US furent débarquées en 2003. Il s'agit d'une véritable autonomie kurde contrôlée par les partis kurdes. Cette zone fut agrandie et sa sécurité confiée aux peshmergas. En 2006 les deux zones kurdes contrôlées, respectivement par le PDK et l'UPK, furent réunies. En 2014, à la suite de l'éclatement de la guerre civile, l'offensive du mouvement «Daesh» et la débâcle de l'armée irakienne, l'effondrement du régime a entraîné l'incorporation par les Kurdes d'autres territoires historiquement connus comme kurdes et géographiquement comme territoires kurdes.
La mésentente de la classe politique kurde
En 2005, le président du PDK, Barzani, est élu par le Parlement régional kurde à la tête du Kurdistan. Il est réélu au suffrage universel en 2009. Puis, en 2013, son mandat est prorogé de deux ans. La classe politique kurde exige une réforme institutionnelle impliquant la limitation du pouvoir présidentiel et la mise en place d'un régime parlementaire. D'autre part, elle n'arrive pas à dépasser les luttes intestines basées sur de vieilles haines. Pour la simple raison que les principaux partis kurdes sont issus de fractions rivales. Elles se sont affrontées au cours de la guerre civile de 1994-1998 et le réseau clientéliste n'a pas évolué avec les changements de temps.
Le référendum s'est déroulé le 25 septembre 2017. Il concernait le Kurdistan irakien mais également les territoires occupés par les Kurdes. Il invitait les Kurdes à se prononcer sur sa volonté ou non. Après la victoire écrasante du oui pour l'indépendance, (92,73% des voix), le pouvoir central de Baghdad et les pays frontaliers des territoires kurdes placés sous leurs autorités ont réagi. Les Irakiens ont pris la décision légale à travers un tribunal, l'arrestation du président et des organisateurs du scrutin d'autodétermination. Cette décision judiciaire a été rendue possible après la saisie par le Conseil de Sécurité nationale sous la présidence du Premier ministre irakien et s'inscrit dans la continuité de la décision de la Cour suprême rendue le 18 septembre, en la jugeant contraire à la Constitution. Les arrestations ne sont opérables qu'en dehors du Kurdistan autonome. Elle empêche les concernés de circuler librement à travers le reste du pays. La Cour suprême s'est par ailleurs déclarée incompétente quant à l'arrestation des députés du Parlement central à Baghdad ayant voté lors de cette consultation. L'Iran s'associe à l'Irak devenu pays frère après Saddam. Il prépare des manoeuvres militaires à la frontière du Kurdistan irakien. Le Kurdistan risque gros avec la Turquie qui affirme que ce référendum est illégitime et inacceptable. Elle le considère comme une erreur grave. Elle brandit l'intervention directe dans cette contrée limitrophe qui risque de mettre son intégrité territoriale en jeu y compris son unité nationale en incitant le PKK, (Parti kurde, côté Kurdistan turc) à choisir cette option d'autodétermination. Pour ce qui est de la Communauté internationale, elle s'est prononcée largement contre la tenue d'un référendum, (USA, Royaume-Uni). Mais le président français a déclaré ouvertement «les droits des Kurdes en Irak doivent être reconnus». Les Kurdes essayent de convaincre les Irakiens à entamer des pourparlers car le scrutin n'ouvre pas nécessairement sur une indépendance unilatérale, mais il servirait à déclencher des négociations avec le gouvernement central. Déjà faut-il le souligner, le Parlement irakien a clairement voté une déclaration le 12 septembre pour s'opposer à l'organisation d'un référendum. Il a également appelé le Premier ministre à entreprendre toutes les mesures utiles pour sauvegarder l'unité du pays. Les députés kurdes avaient quitté la séance en signe de protestation. Le 18 septembre 2017 la Cour suprême d'Irak s'est également opposée à la tenue de cette consultation électorale. Elle s'est prononcée ouvertement vers une suspension. Quant à la Syrie, elle déclare soutenir l'unité de l'Irak. En cas de sécession, l'Iran et la Turquie envisagent de suspendre toute relation et mettre fin aux accords sécuritaires et militaires, de fermer les frontières en imposant un blocus économique. Le 24 septembre, l'Iran a fermé sa frontière aérienne. Seul Israël soutient le projet d'indépendance. Par la voix de son Premier ministre, Israël réaffirme son soutien aux efforts légitimes du peuple kurde pour asseoir son propre Etat. Cette position de l'Etat hébreu, a permis aux Kurdes de célébrer l'évènement en associant des drapeaux israéliens. Cette manière d'agir a été qualifiée par le président turc de liens avec le Mossad. De son côté, le 21 septembre, le Conseil de sécurité des Nations unies s'est prononcé contre le référendum. Il le considère comme un impact potentiellement déstabilisateur.
La situation interne kurde et sa division
Avec la Constitution irakienne de 2005, le Kurdistan dispose d'une large autonomie. Le gouvernement régional kurde émet ses propres visas et plusieurs consulats étrangers sont présents sur son territoire. Mais cet exécutif est fortement divisé en plusieurs forces militaires et politiques. Le PDK domine le Nord tandis que l'UPK domine le Sud. Chacun a ses propres forces militaires et son propre service de renseignements. A ces deux rivaux, il faut ajouter le mouvement Goran devenu depuis 2013, la seconde force politique du Kurdistan après le PDK. Déjà le 15 septembre quand la question du référendum a été soumise au Parlement kurde, les députés du mouvement Goran ont estimé la date du référendum prématurée et se sont inquiétés d'un conflit avec Baghdad. Le Groupe islamique kurde a boycotté la séance et le Parti des Travailleurs du Kurdistan ne s'est pas opposé contre le référendum malgré ses mauvaises relations avec le PDK et son rapprochement avec le gouvernement central de Baghdad. Quant aux territoires gérés par l'autorité autonome kurde la situation est particulièrement tendue, notamment à Kirkouk prise par les peshmergas après son abandon par les militaires irakiens. Même si la population de la cité est majoritairement kurdes, il n'empêche qu'elle compte également des habitants arabes et turkmènes divisés en sunnites et chiites.
Conclusion: même s'ils ont été dupés par l'Histoire et par conséquent, victimes d'évènements historiques en face desquels, ils avaient les mains liées, il n'empêche que ce qui leur a manqué, c'est l'unité des rangs, essentielle à toute cohésion politique et sociale pour la formation d'un Etat, un seul peuple, un seul pays.


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