Le poète algérien, Abder Zegout, vivant à Paris, vient d'éditer aux éditions L'Harmattan, «Confidences», son 17e recueil de poésie. Dans cet entretien, il parle de cet attachement à la poésie à une époque où l'on croit, de moins en moins, au pouvoir des mots, surtout quand ils sont agencés en vers. L'Expression: Quelle interprétation pourrait-on donner à «Confidences», le titre de votre nouveau livre? Abder Zegout:À chacun de l'interpréter. Pour moi, il s'agit d'un titre sensible, délicat et sincère. Ce livre est le portrait passionnant de l'amour. Ce sont les mots et les voyages du poète, traduisant ses paroles en actes. Vous écrivez en français, mais on retrouve votre culture d'origine et même des traces de votre langue maternelle, le kabyle, dans vos vers, pourquoi n'écrivez-vous pas en partie en kabyle? Du point de vue de l'écrit, j'exporte en quelque sorte, dans mes poèmes la mixité, la diversité et l universalité. Il y a, entre le français et le kabyle, un destin détourné qui mérite une équité en matière de justice. Je ferai de tamazight un honneur, toujours plus partagé et solidaire dans le monde. Ce qui m'a décidé à participer à un projet où le texte est traduit dans 25 langues dont thakvaylith (le kabyle). Par ailleurs, pour écrire en tamazight directement, je pense, et c'est là mon point de vue, que les conditions ne sont pas réunies, Beaucoup de Kabyles ne s'intéressent pas à la culture kabyle, vous pouvez le constater. Vous vivez à l'étranger depuis le début des années 2000, peut-on dire que vous êtes un poète de l'exil? Moi, exilé? Je ne le pense pas. Je vis à Ifigha (très belle région située près d'Azazga, dans la wilaya de Tizi Ouzou, Ndlr) matin et soir. Dans mes pensées, je ne quitte jamais ma terre, ma Kabylie, mon Algérie. La poésie ne s'exile pas, elle est universelle et internationale. Ma présence en Kabylie, en Algérie et en France fait avancer ma poésie, c'est ce que je pense du moins. Vous avez toujours clamé que les lecteurs s'intéressent encore à la poésie, un constat qui n'est pas partagé par beaucoup de gens. Pourquoi êtes-vous optimiste quand vous parlez de poésie? Oui, je peux le dire: face au réel, la poésie est une ferme urbaine, un lieu de fête à la découverte des mots pour aimer. On rencontre toujours des personnes qui s'apprêtent à vivre une nouvelle aventure littéraire riche en vers. Le poète est-il quelqu'un de «normal» comme tous les autres êtres humains ou bien reste-t-il cet éternel incompris, le solitaire de toujours, cette bougie qui brûle pour éclairer les autres? Le poète est normal, ce sont les autres qui ne le sont pas! Depuis la parution de votre premier recueil de poésie en Algérie, tous vos autres livres (17 recueils de poésie) ont été édités en France, éditer en Algérie ne vous intéresse plus? C'est vrai, de 1998 à 2018, j'en ai édité 17. Le premier, c'était «Vivre pour l'amour» et le plus récent, «Confidences». Je pense sincèrement que c'est une chance de pouvoir se faire éditer en Algérie. Mais tout le monde connaît les grands problèmes que vit l'édition chez nous, surtout quand il s'agit de livres de poésie. Quelle est la meilleure chose qui pourrait arriver à un poète comme vous? La meilleure chose qui puisse m'arriver, c'est l'imagination et le rêve, je pense aussi, ce serait «que ma vie soit en harmonie avec mes mots». C'est là le côté insondable de la poésie, c'est la raison pour laquelle le fait d'écrire est une source évidente de bien-être, comme par miracle, j'ai marché sur les routes pavées des villages kabyles tout en étant à Paris. Quelle en est la pire? La pire, c'est la page blanche. Que les lumières s'éteignent une à une, mais le poète ne se laisse jamais aller à la compromission et sa plume continuera à exprimer les vérités les plus justes et les plus humaines.