L'Expression: Quelle est la position de Jil Jadid et son regard sur la naissance du «collectif des Forces nationales pour la réforme»? Soufiane Djilali: Tout d'abord je dois préciser que Jil Jadid ne fait pas partie de ce collectif. Un membre de la direction du parti a assisté à la conférence qui s'est déroulée à l'hôtel El Aurassi en réponse à une invitation. Généralement, nous répondons à toutes les invitations pour des initiatives même si nous n'y sommes pas engagés. Le dialogue, les échanges et les relations de respect sont des vertus à encourager dans notre pays, surtout dans cette phase politique. Concernant l'initiative, elle-même, il est toujours bon qu'il y ait des regroupements, même si l'objectif reste ponctuel. La société politique (partis, syndicats et associations) est tellement éparpillée que tout effort de rassemblement est positif en soi. Jil Jadid avait été partie prenante des initiatives de création de la Cltd, puis de l'Icso en 2014. Ces tentatives de regroupement avaient incontestablement apporté un plus à la vie politique, même si au final, cela n'a pas duré longtemps. Notre conclusion est qu'il faut passer maintenant à l'organisation de courants politiques cohérents. Le spectre idéologique algérien ne s'est pas encore cristallisé à travers des formations suffisamment fortes pour devenir représentatives. Ni les «nationalistes», ni les «démocrates», ni les «islamistes» n'ont réussi à faire une véritable jonction avec leurs potentielles bases respectives. La construction du champ politique étant à ses balbutiements, il sera pour un temps, difficile de stabiliser les partenaires impliqués dans toute tentative de regroupement. Quelle est votre appréciation sur l'émergence de ce collectif, et de son impact sur la scène politique, notamment sur le processus de révision de la Constitution? Bon, il est clair que ce collectif essaye de se placer comme soutien à l'action du président Tebboune. Ce dernier n'ayant pas de parti politique, il est tout à fait naturel que des forces tentent de lui proposer une forme d'alliance. Le président les a reçues et les a encouragées. Maintenant, je n'anticiperai pas sur les intentions de chacun. De fait, j'imagine que ce collectif soutiendra la démarche politique du président en espérant se placer comme substitut au duo FLN-RND. C'est de bonne guerre. Pouvons-nous dire que nous assistons à une reconfiguration de la scène politique, qui pourrait aboutir à des alliances politiques? Une reconfiguration politique est une nécessité pour le pays. L'ex-quatuor présidentiel est fini. Les deux anciens piliers du régime sont en déshérence et le vide politique est béant. Maintenant je ne connais pas les intentions des uns et des autres. Il est possible qu'émerge une alliance politique entre des partis et des associations. C'est le droit absolu de chacun, c'est la règle de la pluralité et de la démocratie. À mon avis, beaucoup d'organisations feront bloc pour le référendum, mais à l'approche des législatives, la plupart reprendront leurs billes. Ce n'est qu'après les résultats des élections législatives que nous verrons apparaître les nouveaux rapports de force. C'est à partir de cette réalité que se fera la nouvelle configuration politique. À mon avis, pas avant. Comment voyez-vous l'évolution de la situation, à l'approche des grandes échéances, en l'occurrence le référendum pour la révision de la Constitution et les élections législatives? Les Algériens ont envie de croire en une évolution saine de la pratique politique. Ils ont envie de sortir rapidement de la crise. Ils ont envie d'avoir de l'espoir. L'Etat de droit est devenu une revendication partagée. Le référendum donnera la température réelle de l'Etat d'esprit des Algériens. Il faut donc attendre de voir la mouture finale du texte constitutionnel. Il est indéniable que le pays est en train de rechercher et de reconstruire sa stabilité. Des réformes importantes sont annoncées. Le succès dépendra du degré de confiance qu'accordera le peuple à ce nouveau projet. J'ai déjà eu à évaluer la réforme constitutionnelle et je persiste à dire qu'elle porte les germes d'une évolution appréciable du système de gouvernance. Une bonne participation au référendum et surtout un texte accepté par tous seraient une grande opportunité pour le pays pour s'engager sur la bonne voie. Les législatives, quant à elles, auront un rôle plus important dans la reconfiguration de la scène politique. Elles pourraient être l'occasion de voir émerger de nouvelles figures politiques pour peu que le climat général le permette.