Après avoir promptement réagi pour étouffer toute tentative d'intervention étrangère contre le Niger, pays voisin où les militaires ont écarté le président élu Mohamed Bazoum, l'Algérie engage maintenant une médiation afin de parvenir às une solution politique de la crise. Le ministre des AE et de la Communauté nationale à l'étranger, Ahmed Attaf, se rend successivement au Nigeria, au Bénin et au Ghana, trois pays clés de la Cédéao, avec pour mission de baliser la voie à une démarche pacifique qui permettrait de trouver une solution objective à la crise induite par le coup d'Etat au Niger. Les signaux crédibles selon lesquels une intervention militaire était devenue hautement probable, après avoir été possible durant plusieurs semaines ont sans doute concouru à l'engagement de cette médiation, surtout que la population nigérienne n'a nullement fait mystère de son soutien au Conseil national de sauvegarde de la nation (CNSP) mis en place par les militaires au lendemain du coup d'Etat. Dès le lendemain de celui-ci, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avait réclamé des efforts de médiation et un retour à l'ordre constitutionnel, avertissant en même temps qu'une «intervention militaire pourrait embraser l'ensemble de la région du Sahel. Par la même occasion, il a assuré que «l'Algérie n'utilisera pas la force avec ses voisins». Il faut dire que la situation est devenue particulièrement instable dans tout le Sahel et elle impacte de façon claire la sécurité régionale. Au Mali et au Burkina voisins, suspendus par la Cédéao en raison des coups d'Etat intervenus depuis 2020, la montée du péril terroriste n'a pas cessé malgré la présence des contingents étrangers pendant de nombreuses années. Il en va de même du Tchad où sévissent les groupes nigérians Boko Haram et l'Iswap et où les assauts des groupes rebelles cantonnés en Libye contribuent à la précarité de la situation sécuritaire. La déstabilisation de la Libye, en 2011, les soubresauts politiques au Mali et au Burkina aujourd'hui rejoints par le Niger sont autant de défis qui poussent l'Algérie à anticiper un conflit de grande envergure capable de précipiter la région sahélienne dans une guerre par procuration entre des puissances étrangères. Une guerre dont les effets immédiats se révéleront à travers une migration massive vers l'Europe. Un tel scénario est de toute évidence inacceptable pour notre pays et notre armée, confrontés à de multiples menaces sur presque toutes les frontières. C'est pourquoi l'Algérie s'est opposée fermement à une intervention brutale au Niger, consciente que ce qui se joue dans la région n'est autre qu'une redistribution des cartes géopolitiques. L'ancienne puissance coloniale cherche à défendre ses intérêts, notamment en ce qui concerne l'uranium nigérien qui contribue à sa production d'électricité à hauteur de 70%! Les enjeux sont d'ailleurs plus vastes puisqu'il s'agit de l'avenir même de la Françafrique. Bazoum au pouvoir, ces intérêts étaient garantis, notamment les bases militaires française (1500 soldats) et américaine (1000 soldats). Enfin, l'aventurisme au Niger impacterait les échanges économiques, politiques et sécuritaires que l'Algérie a construits au cours des dernières années, comme par exemple le gazoduc scellé par un partenariat entre l'Algérie, le Nigeria et le Niger pour fournir à l'Europe 30 milliards de m3 de gaz par an.