Les week-ends à Béjaïa semblent ne plus être des jours de repos pour les écoliers, si l'on considère les nombreux groupes que l'on voit défiler dans les rues, munis comme les autres jours de la semaine de leurs sacs d'écoliers. Les cours de soutien qu'on connaissait à la veille des examens de fin d'année sont devenus de nos jours des cours qui commencent dès le début de l'année. Les élèves, scolarisés dans les paliers primaire, moyen et secondaire, se rendent dans des locaux, des garages aménagés en salles de classe ou encore des appartements où ils bénéficient de cours particuliers, dispensés généralement par leurs propres enseignants. Jusque-là, rien ne remet en question ce type d'aide pédagogique censé renforcer le niveau des plus faibles dans une matière ou une autre, notamment ceux des classes d'examen de fin de cycle. Cependant, cette activité est assurée non pas gratuitement mais contre monnaie sonnante et trébuchante. Et à quel prix ! Si ce n'est pour s'en mettre plein les poches, pourquoi est-ce que ces enseignants ne le font pas à même l'établissement, ce qui serait à leur honneur? D'autant plus que statutairement, cette possibilité leur est offerte par le règlement. Toutefois, elle porte une autre appellation, à savoir des cours de rattrapage, ce qui ne se fait pas durant le week-end qui, faut-il le rappeler, est censé être une période de repos permettant aux élèves autant qu'aux enseignants de récupérer leurs forces pour repartir de plain- pied la semaine suivante. Les cours de rattrapage s'organisent plutôt après les séances de la semaine ou durant la demi-journée creuse du mardi. Pourtant, cette activité, exercée par des personnes cupides, a fait l'objet d'une mesure d'interdiction de la part du gouvernement, édictée voilà quelques semaines, réservant des sanctions sévères à ceux qui s'amusaient à s'y livrer. Selon des professionnels de l'éducation et de simples citoyens, le recours à cette pratique, pourtant unanimement décriée par des spécialistes, est devenu la hantise de nombreux parents d'élèves. À l'approche des examens, beaucoup de parents d'élèves s'attellent déjà à assurer des cours particuliers à leurs enfants, dans l'espoir de combler les insuffisances et les lacunes scolaires. Dans la ville de Béjaïa, à titre d'exemple, ces cours de soutien font toujours des émules. Selon des témoignages concordants de professionnels de l'éducation et de simples citoyens, le recours à cette pratique, pourtant unanimement décriée par les spécialistes en pédagogie et en psychologie de l'enfant, est devenue la hantise de nombreux parents d'élèves. Le comble, déplore-t-on, réside dans le fait, que la dispensation de ces cours fait l'impasse sur les conditions sanitaires les plus rudimentaires. On tient à monter en épingle «les conditions lamentables» dans lesquelles les enfants suivent ces cours. «Des garages et locaux désaffectés, sans aération ni commodités, sont exploités sans scrupules par des marchands d'alphabet, pour organiser des leçons, moyennant finance. Les enfants issus de familles plus aisées reçoivent ces cours dans des appartements censés être plus hygiéniques, mais à des tarifs exorbitants», soutient-on. Et de préconiser «une intervention prompte de l'Etat, pour mettre un terme à cette pratique illégale, qui ne fait que creuser davantage le fossé entre les petites gens et les nantis.» Apostrophé au quartier Pépinière à Béjaïa, un éducateur, versé depuis des années dans ces cours particuliers, défend une thèse aux antipodes des points de vue précédents: «Nous répondons à une demande pressante exprimée par des parents soucieux de la réussite scolaire de leur progéniture ». «Même sur le plan pécuniaire, la rétribution demandée, et souvent négociée, n'est jamais au-delà des efforts consentis», insiste-t-il. La cinquantaine bien sonnée, une mère de famille, dont un enfant lycéen suit assidûment des cours parallèles, abonde dans le même sens : «Ce soutien pédagogique est plus qu'indispensable, dans la mesure où il traite les lacunes que l'école publique peine à combler. Depuis que mon rejeton en bénéficie, son niveau scolaire s'est considérablement amélioré.»