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La zaouia, le parti et la cooptation
L'AUTRE REGARD
Publié dans L'Expression le 10 - 01 - 2007

Le parti est une zaouia qui n'existe que grâce au chef qui fait et défait les choses.
La dernière sortie de Mouloud Hamrouche sur la question de l'allégeance et de l'absence de compétitions électorales crédibles et sérieuses dans la mesure où les élections correspondraient à une sorte de cooptation, n'est pas nouvelle. Déjà, le gouvernement Ouyahia avait mis en pratique cette réalité en relevant de leurs fonctions les «élus» de la Kabylie reconnaissant implicitement l'illégitimité et les jeux de coulisses présidant à ce type d'élection. Mais tout cela marque tous les territoires arabes et obéit, en quelque sorte, à la configuration rurbaine de la société algérienne, la structuration des partis et à leur fonctionnement.
Ainsi, les structures politiques de type européen dont la constitution est relativement récente procède souvent de la même manière qu'une zaouia ou une tribu donnant à voir une forme composite, syncrétique où se juxtaposent la structure partisane européenne et la configuration
«traditionnelle». Déjà, l'Etoile nord-africaine, première organisation politique, née dans le sillage de l'adoption des formes de représentation européenne et après la loi Jules Ferry qui a permis à certains autochtones de fréquenter l'école primaire et les syndicats européens, recourait à des pratiques tirées de la structure confrérique. Ce fut donc le cas de Hadj Ali Abdelkader et de Messali El Hadj qui furent à l'origine de la mise en place de cette structure, constituée, au départ, d'éléments généralement recrutés dans l'ouest du pays. Certes, le parti qui allait prendre la même hiérarchisation que la Sfio (parti socialiste, section française de l'internationale ouvrière) semble obéir aux mêmes schèmes que le parti français, mais était plutôt prisonnier des réalités algériennes en porte-à faux avec le système partisan européen. Dans ces conditions, le parti va emprunter, certes, l'enveloppe externe, mais, souvent de manière inconsciente, il va reproduire la structure groupale «traditionnelle» qui s'impose essentiellement au niveau décisionnel et hiérarchique.
Le début du siècle fut, en quelque sorte, l'espace de la découverte consciente de l'altérité et de l'idée de nation, trop peu interrogée dans nos sociétés. L'ouverture de l'Etoile nord-africaine va permettre la mise en branle de groupes et de strates qui vont souvent se rassembler selon des ramifications locales, tribales et régionales. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que ce qu'on avait appelé la crise de 1949 avait pour origine une contestation essentiellement ethnique. D'ailleurs, durant cette époque, va se créer un «parti du peuple kabyle» (PPK), certes, entretenu par certains milieux, mais qui avait profité d'une certaine fissure au niveau du PPA. Ainsi, le PPA, comme le Mtld ou les autres partis, à l'exception, peut-être, du PCA qui avait une importante composante européenne obéissant donc à un autre type de fonctionnement, étaient constitués de groupes marqués régionalement.
Tout reposait sur le chef de la tribu qui arbitrait les conflits et qui n'avait pas les attributs d'un responsable de parti, mais d'un chef de zaouia; ses décisions sont sans appel, incontestables. Ce n'est pas pour rien que toute tentative de briser cette structure est vouée à l'échec d'autant plus que cette composition syncrétique marque la société entière. La campagne est moins perméable à toute nouveauté et à toute ouverture. Ainsi, la structure partisane fait, avant tout, partie de l'espace urbain. Dans ce type de structure, la «tradition» orale occupe une place importante. Ainsi, le fameux Cnra de Tripoli (juin 1962) a montré les limites de la structure partisane en Algérie. D'ailleurs, le FLN, né d'une césure provoquée par des luttes tribales et groupales au sein du Mtld et qui n'avaient rien à voir avec des joutes idéologiques (les invectives alternaient avec les insultes, lors de cette session), va encore reproduire ce schéma. D'ailleurs, les wilayas fonctionnaient, souvent sans grande coordination, comme des entités autonomes. Le programme de Tripoli dont le texte est rédigé par Benyahia, Harbi, Lacheraf, Malek et Temmam allait tout simplement servir de document sans grande portée, parce que, dans ce type de rencontres, ce n'est pas l'écrit qui est porteur, mais la parole et le groupe le plus fort. Boumediene, par exemple, même si, dans ses discours, parlait de cette nécessaire «cimentation nationale», reproduisait tout simplement ce schéma à l'intérieur de ses structures en désignant souvent les responsables en fonction de critères régionaux et du niveau d'allégeance.
Le parti ou le hizb n'est jamais arrivé à s'imposer comme entité politique et idéologique. D'ailleurs, lors des travaux du Cnra de juin 1962, jamais clôturé, et ceux du congrès du FLN de 1964, les véritables enjeux étaient ailleurs, même si on avait confectionné une Charte d'Alger que trop peu de congressistes ont pris la peine de feuilleter. Tout le véritable débat se faisait ailleurs, parce que l'enjeu, c'était la direction. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que les «grands» de la révolution se détestent tendrement parce que l'un ne peut accepter que l'autre soit le chef de la djemaâ ou de la tribu. Jamais, par exemple, les acteurs n'ont apporté des explications convaincantes sur la scission au sein du Mtld ou au Cnra de 1962, comme d'ailleurs, les inimitiés que se partageaient Ben Bella, Aït Ahmed et Boudiaf. Chacun était soutenu par une tribu particulière. Ainsi, quand les choses devenaient difficiles, on a recours à la résistance armée comme Aït Ahmed qui ouvre le feu sur son ancien compagnon de prison, ou autres expériences vécues ces dernières décennies. Mais généralement, une scission est provoquée à la suite de divergences sur des problèmes d'allégeance ou de degré de contrôle et de cooptation au chef suprême. C'est le cas de toutes les nombreuses scissions connues par les partis.
Le parti, même s'il comprend une composante multirégionale, fonctionne comme une tribu qui considère le chef comme le maillon essentiel et fondamental de la chaîne et l'allégeance, un espace central. La «tradition» orale constitue l'espace favori de communication. Les questions idéologiques ne sont que trop rarement évoquées. Quand elles le sont, elles ne le sont que pour appuyer la position du chef. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien qu'on dit souvent que tous les partis ont le même programme. On n'arrête pas de s'étonner de telle ou telle décision politique d'un parti «démocratique», considérée à contre-courant. Quand Chadli s'en va, Mehri devait nécessairement quitter. Il n'y eut ni «complot scientifique» (comme la presse, trop peu informée, l'indique souvent, mariant deux termes irréconciliables), Benflis désavoué par le chef, devait tout simplement laisser sa place. Toute réflexion sur le fonctionnement partisan, en prenant comme instruments d'analyse, les outils conventionnels restent, selon nous, non opératoires et ne permet nullement de mettre au jour les mécanismes de fonctionnement de la structure de l'Etat et du parti. C'est pourquoi de trop nombreux chercheurs européens ou américains et même algériens, trop marqués par la reproduction du discours du directeur de thèse ou des modes européennes, n'ont pas pu cerner les réalités algériennes.
L'espace syncrétique mettant en situation deux instances culturelles, l'une acquise (la forme de représentation occidentale) et l'autre, originelle («populaire») engendre ce type de comportements et met en branle une sorte de «viol» des attitudes dites «modernes». D'ailleurs, l'idée d'opposition, chez nous, se caractérise par l'élimination du vis-à-vis, sans aucune concession. «Si tu n'es pas avec moi, tu es contre moi», est la phrase de base de la structure confrérique et des partis et des hommes politiques algériens. Dès qu'un parti commence à se rapprocher du pouvoir en place, la presse, souvent peu instruite, malgré le bombardement médiatique européen, du fonctionnement des systèmes politiques occidentaux, et quelques chefs de tribu, se met à parler de «compromission», de «trahison» comme si, s'opposer voulait dire, comme dans la grammaire sociologique «traditionnelle», détruire l'autre sans aucune possibilité d'écoute. Ce manque d'écoute du chef qui se substitue souvent au parti est caractéristique des chefs de zaouïa ou de tribu qui n'admettent aucune contestation. Le parti, c'est le chef.
Dès qu'il y a contestation du chef ou considéré comme tel, le groupe est mis à l'index. Tous les partis ont connu ce type de situations. Quand, dans un des congrès du FFS, une des commissions n'avait pas pu régler un problème, Aït Ahmed intervient d'autorité pour imposer son point de vue, la salle applaudit. Les changements au sein du RND et du FLN obéissent aussi à cette logique qui fabrique et reconstitue les minorités et les majorités, se satisfaisant, reconnaissant explicitement l'absence de projet et de programme, l'assujettissement au président de la République (déclarations de Ouyahia et de Belkhadem, par rapport à la Constitution). Le parti ne fonctionne pas comme une structure autonome, mais comme un espace amarré à l'extérieur. Quand la presse privée emploie ce que certains de ses journalistes appellent le «coup d'Etat scientifique» (expression qui ne veut absolument rien dire) à propos de la mise à l'écart de Mehri et de son remplacement par Benhamouda ou de Benbaïbèche par Ouyahia, oublie carrément les mécanismes de fonctionnement des structures partisanes et de pouvoir dans des pays arabes, notamment l'Algérie et de la fabrication des «majorités».
Les partis ont toujours fonctionné en usant de mises à l'écart permanentes avec des majorités réglementairement constituées. On peut passer facilement d'un groupe à un autre ou d'un parti à un autre sans grand problème parce que les partis manquent d'une assise théorique et idéologique. Ce n'est donc pas sans surprise que le RND s'est retrouvé, normalement ou non, comme premier parti algérien en l'espace de deux ou trois mois en puisant souvent dans la «clientèle» d'autres partis qui y adhéraient souvent, non pour des raisons idéologiques, mais pour une question d'intérêt. Donc, parler de «parti-éprouvette», c'est méconnaître sa composante qui passe d'un parti à un autre. Ses militants sont souvent des transfuges d'autres structures partisanes qui conjuguent souvent leur militantisme à une sorte d'itinérance singulière. La tribu ne fait donc que se reconstituer. Ces partis ont toujours repris en quelque sorte la même architecture que celle du PPA-Mtld qui, une fois l'autorité du chef contestée, le parti a éclaté en morceaux. Le FFS, le PRS et les autres partis ont reproduit le même schéma. Comme d'ailleurs le FLN, condamné pendant une longue période à n'être qu'un simple appareil, a connu des hommes (Chérif Belkacem, Kaïd Ahmed, Mohamed Salah Yahiaoui, Mohamed Chérif Messaadia, Mehri, Benflis) qui étaient, certes, à la tête, mais qui ne tiraient pas du tout leur force du FLN, mais des rapports qu'ils entretenaient, à titre personnel, avec la hiérarchie militaire et le président. Ni Boumediene, ni Chadli n'avaient accordé de l'importance à cette structure partisane qui avait l'illusion de diriger, alors que tout se décidait ailleurs. Même du temps du parti unique, certes, sur le papier, c'était théoriquement le mouhafedh qui dirigeait, mais dans la pratique, c'était le wali. Il y avait, à l'époque, un conflit permanent entre les responsables des structures partisanes et des instances administratives incarnées par le wali qui effaçait carrément le mouhafedh, spécialiste des commémorations et des anniversaires. Donc, cette idée trop ressassée de parti-Etat est à revoir. Certes, le parti unique existait, mais ne fonctionnait pas du tout de la même manière que dans l'ex-URSS ou dans les pays de l'Est.
Le parti est une zaouia qui n'existe que grâce au chef qui fait et défait les choses. Ce n'est pas l'espace idéologique qui détermine la constitution d'une structure partisane. D'ailleurs, les scissions, à l'intérieur de ces partis, apportent énormément d'enseignements sur des structures où la chamaillerie devient l'élément central du débat. Il faut suivre les élections pour comprendre le poids de la «tribu» sur la logique électorale. Ainsi, une commune de Tébessa, traversée par deux tendances tribales, fut «légalement» dirigée pendant une certaine période par deux maires représentant les deux groupes en présence. C'est dire l'empreinte du terrain rural et des pratiques «traditionnelles» dans le fonctionnement partisan qui ne semble pas encore sérieusement ancré dans la société algérienne.
Qu'en sera-t-il des élections de cette année qui ne semblent pas se distinguer des précédentes? Déjà, dans un pays comme le nôtre où les choses ne sont pas claires sur le terrain, ni les assemblées «élues» ni le gouvernement, otages des différents jeux de coulisses, ne sont à même de jouer leur rôle. La question ne se poserait pas en termes de changement de textes constitutionnels, mais de respect des traces écrites déjà disponibles. La cooptation et l'allégeance sont les deux mamelles du fonctionnement du système politique algérien et les lieux récurrents de l'organisation administrative de la société.


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