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«Un outil indispensable pour la langue berbère»
KAMAL BOUAMARA, AUTEUR DU PREMIER DICTIONNAIRE EN TAMAZIGHT
Publié dans L'Expression le 11 - 07 - 2010

Kamal Bouamara est enseignant au département de langue et culture berbères de l'université de Béjaïa. Titulaire d'un doctorat dans le domaine amazigh, il vient de publier, aux éditions l'Odyssée, le premier dictionnaire kabyle. Cet ouvrage de 600 pages propose au lecteur 6000 mots. Dans cette interview, l'auteur parle de ce dictionnaire et de ses objectifs en le réalisant, ainsi que les conditions dans lesquelles il a été conçu.
L'Expression: Comment vous est venue l'idée de réaliser le premier dictionnaire en tamazight?
Kamal Bouamara: Chacun sait que pour enseigner une langue, il est nécessaire, voire indispensable de disposer d'outils pédagogiques, tels qu'une grammaire et un dictionnaire. Le cas de tamazight est pédagogiquement singulier, en ce sens que son enseignement se fait à l'heure actuelle sous deux approches sensiblement différentes. D'une part, il (le tamazight) est considéré comme un simple objet d'enseignement et d'étude (ou de recherche); d'autre part, il est un objet et un outil d'enseignement et de recherche. Voyons de plus près les termes de ces deux approches. La première approche, fondée d'abord par les berbérisants français au temps de la colonisation française, a été importée immédiatement par les Maghrébins, dont les Algériens. Ainsi, on remarquera que le gros de la production scientifique berbérisante se fait aujourd'hui en français; cela concerne aussi bien la production qui se manifeste à l'étranger (notamment en France) que celle qui se publie dans les pays du Maghreb, à l'image du Maroc et de l'Algérie. Au plan de l'enseignement, on remarquera, par exemple, que cette pratique est de nos jours encore en usage dans les départements de langue et culture amazighes de Tizi Ouzou, Bgayet et Bouira. Cette pratique d'enseignement, imposée par la force de la tradition, est considérée, pour la quasi-majorité d'enseignants de cette langue et de chercheurs berbérisants d'aujourd'hui, comme normale, comme pédagogiquement correcte, voire irréprochable. Il y a là pourtant un problème, d'ordre à la fois pédagogique et épistémologique, très sérieux. Cette manière d'enseigner tamazight est, à mon avis, singulière et, à la limite, anti-pédagogique. Ainsi, est-il permis, est-il imaginable d'envisager d'enseigner l'arabe, le français ou l'anglais, etc., par exemple, dans une autre langue? Non! Mais en ce qui concerne le tamazight, il ne semble pas que nos enseignants-chercheurs en question réalisent qu'il y a là problème; mais il est vrai aussi qu'il est plus aisé d'enseigner le tamazight... à la traditionnelle... Mais, en continuant de l'enseigner de la sorte et de nous comporter comme des berbérisants étrangers, nous risquons, à court terme, de réduire de plus en plus le tamazight à un simple objet d'enseignement et d'étude et, à long terme, de le considérer comme une langue étrangère.
Dans l'autre approche, on considère que le tamazight est une langue vivante; par conséquent, il mérite, d'une part, d'être mieux perçu par les siens et, d'autre part, considéré à la fois comme objet et comme outil d'enseignement et de recherche. C'est dans cette optique que certains berbérisants militants ont lancé l'idée d'enseigner tamazight en tamazight, autrement dit sans être contraint de passer par le biais d'une autre langue, telle que le français ou l'arabe. Mais à un moment donné de l'expérience de cet enseignement, il s'est avéré qu'il ne suffisait plus d'en avoir seulement l'idée, il ne suffisait plus de déclarer son intention de..., il fallait absolument passer à l'acte et réfléchir à la meilleure manière de donner à tamazight les outils et les moyens linguistiques et pédagogiques qui lui manquaient pour être un outil d'enseignement et d'étude. Parmi ceux-ci, il y a la métalangue (ou pour reprendre un terme plus vulgarisé, la néologie), les manuels de grammaire et d'orthographe et enfin des dictionnaires. On ne peut, en effet enseigner tamazight en tamazight à l'école sans un minimum de métalangage, sans manuels d'orthographe, sans grammaire(s) et sans dictionnaires unilingue(s) amazigh/amazigh. Il y a déjà des lexiques, des manuels d'orthographe, des grammaires unilingues, il ne manquait alors que le dictionnaire unilingue, voilà c'est désormais fait.
Réaliser un dictionnaire en tamazight avec cette teneur, nécessite sans doute de grands efforts. Comment s'est déroulé cet immense travail et combien de temps a-t-il nécessité?
J'ai commencé à passer à l'acte au courant de l'année 2006. Mais l'idée était plus ancienne. Au courant de cette année, j'ai soumis un petit projet, dans le cadre du consulting, au Haut Commissariat à l'amazighité (HCA); il était question d'élaborer un «dictionnaire de poche» de 500 à 1000 mots (entrées); en 2007, j'ai étoffé le même projet et suis arrivé, avec l'aide de certains de mes étudiants du département de langue et culture amazighes de Bgayet, à regrouper un nombre d'entrées qui avoisine les 3000. Depuis, je n'ai pas cessé d'y travailler. La présente édition contient environ 6000 entrées. Et j'y travaille toujours. A l'heure actuelle, je dispose d'une banque de données informatiques, qui a été élaborée par un ami écossais, Paul Anderson, que je félicite et remercie infiniment. Avec ce programme, j'irai de l'avant plus rapidement.
Pourquoi avoir intitulé ce dictionnaire Issin?
Issin signifie littéralement «apprends». Les termes issin, tamusni, amusnaw sont très courants en kabyle; j'ai choisi le premier parce que c'est un verbe (à l'impératif) dans lequel il y a action, procès, voire processus.
Dans la culture kabyle traditionnelle, la question d'apprendre/connaître/savoir est un processus. Un proverbe de chez nous l'explicite. Le premier dit: nh'effe* ar nimghur (nous apprenons jusqu'à ce que nous devenions adultes»; le second dit: nh'effe* ar ncib (nous apprenons jusqu'à ce que nous ayons les cheveux gris, blancs); le troisième rétorque: Nh'effe* ar nemmet! (nous apprenons jusqu'à la mort!). Ceci dit, le terme choisi est... attrayant, j'espère!
Pourquoi avoir opté pour la variante kabyle uniquement, au moment où l'on parle de plus en plus de tamazight en Algérie et même au Maroc?
Le mot tamazight a plusieurs acceptions populaires. Mais au plan académique, il n'y a que deux options possibles et envisageables de «faire du tamazight». Certains pensent qu'il est possible, envisageable d'élaborer un tamazight sur la base des différentes variétés amazighes (dialectes régionaux) existantes. Remarquons qu'il s'agit là d'un projet programmatique à réfléchir, à élaborer puis à concrétiser. En attendant l'élaboration de celui-ci - cela n'est pas impossible en théorie -, il y a une autre possibilité de «faire du tamazight» sans plus tarder, sans grands moyens humains et matériels, sans l'intervention des Etats où vit cette langue, laquelle est par ailleurs plus pratique, plus pragmatique. Cette possibilité consiste à décrire la «réalité» de cette langue, autrement dit à décrire les usages (amazighs) attestés (comme les dialectes régionaux, les parlers), à les étudier, pour mieux les connaître. En tout état de cause, on ne peut aménager ou standardiser une langue, en l'occurrence le tamazight, avant de la connaître, avant de la décrire. Il se trouve que Issin est, d'un côté, une description scientifique de l'un des usages «réels» de tamazight, que nous dénommons taqbaylit. Mais de l'autre (côté), il y a dans ce dictionnaire, une part d'aménagement/standardisation, qu'on le veuille ou non. Le choix d'un alphabet (et, par conséquent, de certains sons pertinents), d'une certaine orthographe, de certaines types de variation, etc., tout cela fait partie intégrante de la standardisation de cette langue. Pour rappel, Issin prétend porter sur le «tamazight de Kabylie», non pas seulement sur l'un des parlers kabyles. Je ne sais si les Kabyles issus des quatre coins de la Kabylie, voire de la kabylophonie s'y reconnaîtront un tant soit peu.


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