L'important n'est pas de donner des chiffres, mais de passer à l'action! Mustapaha Khiati, président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), déplore l'importance donnée aux chiffres. «Il faut arrêter avec les chiffres, maintenant il faut agir!» s'est ainsi emporté le président de la Forem. Le fléau de la drogue touche un public de plus en plus jeune, et la drogue circule de plus en plus dans les CEM. Le problème devient préoccupant! Entre 250.000 et 300.000 jeunes âgés entre 12 et 35 ans consomment de la drogue selon les données de M.Sayeh, directeur général de l'Office de lutte contre la drogue, dont les statistiques font référence. Pour M.Khiati, il faut d'ores et déjà faire la distinction entre une consommation occasionnelle et une consommation chronique «permanente». Pour lui, une réalité est cependant incontestable, «les 15-30 ans sont les plus grands consommateurs de drogue aujourd'hui en Algérie». Le nouveau phénomène de consommation de drogue par les femmes varie, quant à lui, entre 11 et 17% des consommateurs de drogues selon les chiffres avancés par M.Khiati. Or, le directeur général de l'Office, Abdelmalek Sayeh a précisé, lors d'une conférence de presse, que le nombre de consommateurs féminins est de l'ordre de 5% par rapport aux 95% de consommateurs masculins. On ne peut que constater qu'au vu de l'importance donnée aux chiffres par les deux responsables, il est logique de retenir les données avancées par l'Office. Le phénomène de consommation de la drogue est dynamique, il est donc très difficile, sinon impossible, d'avancer des chiffres probants sur ce phénomène. «On pourrait facilement arriver a un million de consommateurs si l'on se réfère à l'étude faite en juin dernier et qui annonce entre 17 et 30% de consommateurs» a affirmé M.Khiati. En réalité, il ne peut y avoir de données fiables, car la consommation de la drogue est un phénomène qui évolue et qui change à tout moment. Selon M.Khiati, «on a l'estimation du phénomène à un moment donné, c'est une estimation approximative, une projection, sans plus». L'utilité des chiffres est de démontrer l'importance et la gravité du phénomène. Mustapah Khiati a ainsi porté des critiques sur le rapport présenté par l'Office que dirige Abdelmalek Sayah. Un office qui, d'après lui, perd ses prérogatives en étant sous tutelle du ministère de la Justice. «On ne peut pas être juge et partie. Il devient nécessaire de revoir le fonctionnement de cet office, de dégager une stratégie commune et de créer un mécanisme de coordination qui peut mener des actions au niveau national. La société civile est marginalisée. Depuis plusieurs années, on n'arrive pas à engager un travail sérieux sur le terrain», a-t-il regretté. Déplorant le monopole de l'Office, M.Khiati a précisé que «depuis sa création, cet office n'a rien fait sur le terrain, à part avancer des chiffres». L'Office a perdu beaucoup de ses prérogatives, selon le conférencier, il faut donc revoir son fonctionnement dans le cadre d'une stratégie globale. «J'appelle tous les intervenants sociaux ou politiques afin d'élaborer une stratégie commune ou créer un mécanisme de coordination qui peut être l'Office ou une autre structure adéquate», a insisté «l'invité de la rédaction» de la Radio nationale Chaîne III d'Alger. M.Khiati met aussi l'accent sur le manque d'information, de sensibilisation et de prévention, qui sont tout aussi, sinon, beaucoup plus, du ressort de la société civile. «Il est important de laisser la société civile jouer son rôle, et de lui en donner les moyens», a-t-il indiqué. Concernant la prise en charge des jeunes dépendants, M.Khiati insiste sur un processus non médicalisé, pour les jeunes qui ne consomment pas de drogues dures «Il y a le problème des drogues non dures, comme le kif, principal produit consommé en Algérie. Il doit être géré par des thérapies et des psychologues; pour les drogues dures, il faut médicaliser et recourir aux centres de désintoxication.» Un dernier point abordé par «l'invité de la rédaction» de la radio, concernant les moyens de lutte contre la toxicomanie, a porté sur le renforcement du dispositif judiciaire de la loi de 2004. Selon A. Khiati, «cette loi est relativement bonne, mais elle devrait faire la différence dans un premier temps entre les consommateurs, (débutants et habitués), il faut dans un second temps être sans pitié avec les dealers». Des peines incompressible, a-t-il précisé, allant jusqu'à 15 années de prison. «Il faut être sans pitié avec ces délinquants, afin de les empêcher de diffuser leur poison.»