Ce n'est sans doute pas la première fois, en Algérie, que des citoyens font les frais du zèle des responsables locaux. Un zèle qui se traduit, tout compte fait, par une censure destinée à cacher des réalités amères, non pas à ces citoyens qui les vivent au quotidien et qui en sont donc parfaitement conscients, mais au chef de l'Etat lui-même. À Ghardaïa, Bouteflika ne verra donc pas tout. Au grand dam des sinistrés des inondations d'octobre dernier, qui voudraient certainement se plaindre des lenteurs et du laisser-aller de l'administration locale, le chef de l'Etat n'aura pas de temps à consacrer à leurs doléances et autres récriminations. Il aura juste l'opportunité de visiter quelques “réalisations témoins”, celles que les autorités locales voudront bien mettre en évidence pour convaincre le Président de leur propre efficacité. Les images que la télévision se fera le devoir de diffuser au JT du soir, avec youyous et applaudissements à l'appui, feront le reste. Les téléspectateurs auront même droit, peut-être, à quelques appels solennels en faveur d'un troisième mandat, histoire de montrer à l'hôte du jour que la vallée du M'zab, à l'instar des autres régions du pays, est tout acquise au président Bouteflika. Grâce, naturellement, au “travail” des officiels du coin et de leurs relais. Ce n'est sans doute pas la première fois, en Algérie, que des citoyens font les frais du zèle des responsables locaux. Un zèle qui se traduit, tout compte fait, par une censure destinée à cacher des réalités amères, non pas à ces citoyens qui les vivent au quotidien et qui en sont donc parfaitement conscients, mais au chef de l'Etat lui-même. C'est que les zélateurs constituent une race de responsables qui n'a jamais cessé de sévir et qui n'a pas fini de se reproduire et de reproduire des pratiques qui, pourtant, ont valu tant de malheurs au pays et à ses enfants. Mais les chefs de l'Etat, comme chacun sait, n'ont pas que les responsables locaux pour s'informer des situations locales. Pour peu qu'il leur tienne à cœur de tout savoir, ils en ont les moyens et ils ont le pouvoir d'en user. Est-ce donc à dire qu'ils se plaisent, à chaque fois, à jouer le rôle de fausse victime d'une farce dont les dindons, les vrais, sont les seuls citoyens ? Ou alors, plus simplement, sommes-nous face à une fatalité qui, la culture du mensonge et de la censure aidant, a fini par s'imposer à nous tous, à tel point qu'un chef de l'Etat n'a d'autre choix que de la subir… en toute conscience ? S. C.