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La souffrance au travail : un fléau en progression
Publié dans Liberté le 21 - 09 - 2013

Depuis longtemps le travail tient une place centrale dans notre existence. «Par le travail on transforme le monde, mais le travail nous transforme également», nous dit Christophe Dejours, professeur titulaire de la chaire psychanalyse, santé et travail du Cnam. Rêver d'être heureux au travail est un idéal nettement plus accessible, ajouterait Freud. Le travail n'est pas seulement nourricier, il est formateur, émancipateur et constitue l'armature de notre santé mentale. Nul ne peut ignorer aussi son rôle essentiel dans notre construction personnelle et la formation de notre identité. Cette construction identitaire se réalise dans les relations aux autres, en particulier par la reconnaissance que les autres, tant la hiérarchie que les collègues, apportent au travail effectivement réalisé. Mais quand sa construction quotidienne est menacée, elle peut donner lieu à une crise d'identité et une souffrance intense ayant des conséquences néfastes sur la santé de l'individu et de la société elle même. Force est de constater que le monde du travail a parfois des allures de jungle. De nos jours, on s'intéresse aux pathologies singulières dont les individus peuvent être porteurs, le plus souvent en raison de leurs conditions de vie mais rarement à cause de leurs conditions de travail. Si celles-ci se sont nettement améliorées sur un bon nombre de points, les méthodes d'organisation du travail ont généré d'autres problématiques. Le contexte professionnel actuel est aggravé par une gouvernance non respectueuse de l'humain et un manque de civisme et d'éthique.
La souffrance au travail est un phénomène préoccupant partout dans le monde et en forte progression. Pourquoi la souffrance vécue est aussi ample, aussi destructrice, est une question difficile à élaborer. Cette interrogation lancinante insidieusement peut amener un salarié à penser en son for intérieur : "Si j'ai si mal c'est que je suis fragile". Et bien non ! Contrairement à ce qu'on peut penser, les personnes qui souffrent le plus ne sont pas les plus fragiles. Ce sont les plus authentiques dans leur rapport au travail qui craquent, celles qui ne le laissent pas faire ... Les plus fortes, finalement. Ces personnes ont des valeurs très fortes et sont donc plus touchées que les autres. Mais surtout, elles ont tendance à tenir tête et sont donc les cibles idéales du harcèlement moral. Il faut également souligner que dans les cas de souffrance, c'est souvent le plus compétent qui est le plus profondément touché car c'est souvent lui qui s'est le plus investi dans son travail. N'est-ce pas là un vrai paradoxe du management que de contribuer à fragiliser ceux dont l'investissement est le plus fort ? Aujourd'hui, même les plus hauts diplômes ne garantissent rien. Les gens se rendent au travail la boule au ventre. Tous sont victimes de formes d'organisation de travail devenues de plus en plus persécutrices. La théorie du stress est insuffisante pour expliquer ce qui se passe sur le terrain. Il nous arrive de nous retrouver dans une situation qui nous fait souffrir et dans ces moments-là nous regardons autour de nous et nous imaginons les autres (souvent les plus médiocres) heureux, chanceux, dotés de tout ce que nous aimerions, et de nous interroger : pourquoi moi, je n'ai pas toutes ces opportunités ? Ce sentiment de frustration occasionne une souffrance au quotidien. Les abus de pouvoir exercés à l'encontre des employés et qui s'expriment par un comportement contraire à l'éthique visant à les humilier devient une pratique vécue au quotidien. En l'absence d'un code de conduite, les collègues et certains supérieurs hiérarchiques, notamment les chefs intermédiaires ont tendance à profiter de la situation. Cela crée un climat de suspicion qui entrave la paix sociale dans l'institution. Ce phénomène d'ampleur croissante dans le monde entier est encore largement sous-estimé en Algérie. La norme managériale en Algérie est encore à l'infantilisation des employés, auxquels on fait peu confiance et à qui on ne laisse que peu d'autonomie dans ses décisions. Dans ces conditions, il est évidemment difficile pour les employés de s'épanouir professionnellement.
Interrogeons-nous maintenant sur les dégâts occasionnés par l'organisation du travail et ses méthodes de management. Le salarié déploie des efforts, consent des sacrifices qui déteignent sur sa famille, sa disponibilité et sa santé. Pourtant le travail ne lui apporte plus l'élément principal qui assure le renforcement identitaire : la reconnaissance. L'entrave de cette construction identitaire tant personnelle que professionnelle via le travail, engendre des risques. La souffrance ressentie l'isole de son collectif de travail, et apparaissent les premiers signes : un état de qui vive, la hantise de se rendre au travail, les cauchemars, la difficulté de trouver le sommeil ainsi que la rumination de la situation. Le travail est synonyme de productivité, et non de surconsommation déraisonnable. Les chefs tyranniques, inhumains et irrespectueux rendent les travailleurs littéralement malades. Les contextes de pression nourrissent les désaccords. Il est aujourd'hui de plus en plus important d'enseigner les compétences relationnelles pour gérer au mieux les désaccords, car mal gérées les tensions relationnelles sont génératrices de conflits. Ces derniers constituent des facteurs de risques psychosociaux aux coûts humains (stress, épuisement professionnel...) et économiques (perte d'efficacité, désinvestissement, arrêts de travail, départs anticipés...), importants. Ces tensions au travail aboutissent à des situations de souffrance psychique, de découragement, de débordement et parfois même à de réels traumatismes.
Quels sont les risques psychosociaux (RPS) ? Comment se traduisent-ils sur le terrain?
Les risques psychosociaux sont souvent liés à des désaccords sur la définition du "bien travailler". Les RPS sont habituellement décrits par les manifestations suivantes : celles du stress. Les études sur la question montrent que le stress est vécu différemment selon l'âge, le sexe, le caractère, et la situation familiale et professionnelle de l'individu. Tout le monde ne subit donc pas le stress de la même manière, avec la même intensité et dans la même mesure. Vient ensuite le harcèlement, les violences verbales (ou physiques dans certains cas), que celles-ci aient lieu dans l'institution ou lors de contacts avec l'extérieur ; le mal-être généré par le manque d'adéquation entre les aspirations et/ou les compétences d'un individu et le poste qu'il occupe. Ce mal-être peut aussi recouvrir la notion d'isolement ou de manque d'intégration dans un collectif. Un autre risque dans l'augmentation de la souffrance vécue, est la possibilité d'une décompensation avec pour conséquences possibles des pathologies telles que l'angoisse, la dépression, les fameux TMS ou troubles musculo-squelettiques dont les plus fréquents sont le syndrome du canal carpien, la tendinite des épaules et l'épicondylite, une affection qui frappe le coude, et enfin le burnout ou syndrome d'épuisement professionnel qui souvent conduit au suicide, un phénomène des temps modernes qui guette chaque travailleur.
Comment définir le burnout ?
C'est en 1980 que le psychanalyste américain Herbert J. Freudenberger définit pour la première fois la notion de burnout. Le terme de burnout définit un état de souffrance généré par le travail. "C'est un sur-engagement professionnel caractérisé par un épuisement émotionnel, une perte d'estime de soi et la déshumanisation de la relation à l'autre", explique le docteur Agnès Martineau-Arbes lors d'un colloque sur ce syndrome. Pour ce médecin du travail, le terme anglais résume bien l'état d'une personne qui "se consume, physiquement et moralement jusqu'à épuisement total, jusqu'à avoir brûlé toutes ses réserves". Le burnout atteint des personnes "extrêmement engagées dans leur travail et qui veulent bien faire", précise-t-elle. En d'autres termes, le burnout est une sorte d'usure de l'individu à moyen et long terme. Chaque individu dispose d'un capital énergie dans lequel il puise pour gérer le stress. Si rien ne régénère ce capital, la ressource se vide et on arrive au bout du rouleau. Un trop grand stress, une masse de travail trop importante ou encore un environnement oppressant peuvent en effet rendre certains complètement abattus.
Outre les troubles du sommeil et la fatigue, les signaux d'alerte sont la perte de mémoire et de concentration, les problèmes de dos, d'ulcères, l'hypocondrie, et une anxiété qui peut aller jusqu'à la panique. Une surcharge de travail, le manque de récompense ou de reconnaissance, la mauvaise ambiance quand on ne peut pas compter sur ses collègues, l'inadéquation du travail avec nos valeurs personnelles et nos compétences, les problèmes d'équité au niveau des promotions, sont autant de facteurs responsables du burnout.
Nous distinguerons trois phases dans le burnout :
La première phase correspond à l'épuisement émotionnel et physique. Les gens se sentent vidés, ils n'arrivent plus à donner. Le matin, la simple idée d'affronter la journée leur paraît insurmontable. La deuxième phase est celle de la distanciation. La personne développe alors un mécanisme de défense. Le professionnel remplit ses fonctions de manière automate, il n'en a plus rien à faire. La prise de conscience de cet état, qui va à l'encontre de ses ambitions professionnelles, conduit à la troisième phase: la perte de confiance en tout et tous, de motivation et d'estime de soi. Les conséquences peuvent aller du coup de blues à la dépression, jusqu'au suicide. Aujourd'hui, la multiplication d'actes désespérés est révélatrice d'un malaise professionnel grandissant, d'une souffrance au travail qui se généralise. Aux pénibilités physiques, s'ajoute la charge mentale supportée par les salariés. À l'origine du malaise des salariés, est ce que l'on peut appeler le management par la peur. Le burnout n'est donc pas un problème à prendre à la légère. Nombreux sont les salariés qui souffrent dans nos institutions, le plus souvent en silence. Soumis à des méthodes de management qui les poussent à bout, leurs expériences nous montrent que si une organisation du travail se veut rentable, elle doit prendre en compte et préserver le bien-être de ses employés, sa véritable richesse.
La politique managériale
Les managers jouent un rôle essentiel dans l'implication, le bien-être et la motivation de leurs collaborateurs, mais aussi dans la prévention des risques psychosociaux. Les managers "intermédiaires" sont tout d'abord concernés. Tiraillés par la contradiction entre ce qu'ils pensent qu'"il faut faire" et ce qu'ils sont "tenus d'accomplir" dans le souci de prouver leur efficacité, souvent ils piétinent leurs collègues.
L'écoute, le charisme, l'honnêteté, l'ouverture d'esprit et l'exemplarité sont les qualités managériales les plus attendues par les équipes. Être exemplaire, ce n'est pas montrer que rien ne peut nous affecter, mais au contraire montrer à ses collaborateurs que le manager aussi doit faire face à du stress et le gérer, à l'image de ses collaborateurs. Sur un plan pratique, il faut apprendre à toujours faire la différence entre le contrôlable et l'incontrôlable. Par exemple, plutôt que se poser la question des conséquences potentielles de l'erreur que l'on pourrait faire (difficile à contrôler), il vaut mieux se poser la question des plans d'action pour éviter cette erreur. La question primordiale que les managers (quels qu'ils soient) devraient se poser est : est-ce que notre manière d'être efficace peut fonctionner à moyen terme, ou n'est-elle viable qu'à court terme ?
Comment "être bien" au travail ?
Il suffit parfois de petits riens pour améliorer sa vie quotidienne au bureau. Le job idéal, c'est comme la chaussure idéale. Elle nous tient au pied (et à cœur), ni trop petite ni trop grande. Être bien au travail, c'est créer une ambiance harmonieuse et conviviale, c'est avoir des collègues avec lesquels on construit un véritable esprit d'équipe.
Pour bâtir une communauté solide, il faut qu'il y ait un respect mutuel. Le respect est associé de près au civisme et à la coopération. Bien sûr, on peut toujours faire des pansements provisoires, mais la vraie solution à mon sens est d'inculquer cette valeur du "vivre ensemble", du civisme.
L'amélioration de la qualité relationnelle dans le monde du travail ne peut se faire que si les chefs sont triés sur le volet car la médiocrité ne peut engendrer que la médiocrité et la douleur.
Tant que les citoyens n'assumeront pas davantage leurs responsabilités vis à vis de la collectivité, tant qu'ils ne seront pas davantage imprégnés de sens civique, notre société continuera de se porter mal.
Dr Malika Rebaï Maâmri (*)
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