Le ministre de la Jeunesse et des Sports, M. Boubekeur Benbouzid, vient d'annoncer des mesures devant aboutir à une réforme sportive importante. Au-delà des chiffres avancés se dessine une nouvelle politique nationale en la matière ; une nouvelle vision de la performance, de la formation et de la gestion qui peut briser l'actuel système, dépassé par les exigences modernes du sport, de haut niveau notamment. Il est vrai que le football se taille la part du lion de cette réforme envisagée. Il ne saurait être autrement dans un pays où près de quinze millions d'âmes ont entre six et vingt-neuf ans. Un pays où le football a toujours été catalyseur. M. Benbouzid a déjà brisé un tabou : celui des techniciens étrangers. Depuis la démission de Rabah Madjer de son poste de sélectionneur national, le débat a été centré sur la nécessité de recruter, pour l'EN, un entraîneur étranger. Pour autant, ni Roger Lemerre (aujourd'hui coach de la Tunisie), ni Claude Suaudeau (ex-entraîneur de Nantes), ni Philippe Troussier (entraîneur du Japon lors de la dernière Coupe du monde) ne sont venus. Cet échec dénote avant tout un état d'esprit, un complexe de nos dirigeants vis-à-vis des compétences d'ailleurs, mais aussi la politique de l'Etat qui n'a jamais décidé de casser sa tirelire. Car l'histoire des coachs étrangers est également une histoire d'argent. Une histoire d'argent prise en charge exclusivement par le gouvernement (les décideurs dans notre cas). L'intérêt du recrutement des seize techniciens pour les besoins de la formation est donc en premier lieu moral. Les pouvoirs publics ont fait part, à travers M. Benbouzid, de leur intention de mettre fin à la gestion anarchique, irrationnelle et abusive de l'argent du football. S'ils ont annoncé la prise en charge de l'hébergement, du transport et de la restauration des clubs par la tutelle (un budget de 100 milliards de centimes sera réservé à cet effet), ils ont expressément souligné le gel des subventions à ces clubs. Cela voudrait dire que les présidents et autres dirigeants ne pourront plus alimenter la spéculation des marchés de joueurs, souvent objets de transactions douteuses. Et, par ricochet, les joueurs ne dépasseront guère leur valeur. Ainsi, les prix du marché baissant, la masse salariale devrait aussi diminuer au profit de la formation, de la structuration et des investissements économiques qui font des clubs d'aujourd'hui des entreprises rentables. Les pouvoirs publics veulent, en même temps, bâtir de véritables infrastructures et institutions, sans lesquelles la pratique sportive (avant la performance) serait impossible. La construction d'un centre national de formation pour l'élite “incessamment” à El-Harrach (banlieue d'Alger) et des deux stades de football à Tizi Ouzou et Oran devraient consolider cette vision dont le but est de planter le décor pour une ère de professionnalisme incontournable. Pour peu que cette politique se concrétise. L. B.