“Qui peut nous arrêter ?!�

Au quartier général de Abdellah Djaballah

Les islamistes sont persuadés que leur candidat vaincra dès le premier tour.
Abdellah Djaballah a-t-il une raison d’en vouloir à Abdelaziz Bouteflika ? Il en a certainement une bien bonne. En 1999, le “candidat du consensus� a entamé sa réforme politique par la rupture des équilibres au niveau de la quasi-totalité des partis, dont Ennahda. Contre son gré, celle-ci succombe à la “Bouteflikamania� et lui accorde son soutien. Pour Djaballah, résolument contre, la page est définitivement tournée. Jusque-là incontesté, le fondateur du mouvement islamiste est éjecté de son poste ; le congrès tenu à Club-des-Pins, à Alger, le confine dans une responsabilité purement honorifique (président d’honneur), et le remplace par Lahbib Adami. Des années de construction s’évaporent, les espoirs d’affirmation s’estompent. Cinq ans plus tard, Adami et ses camarades ne sont plus qu’un lointain souvenir. Ils ont été emportés par la tempête, laminés aux élections législatives et locales, condamnés à la disparition. Abdellah Djaballah, lui, est plus fort que jamais. Il a fondé une autre formation (El-Islah, Réforme), gagné du monde, gagné 38 sièges à l’Assemblée populaire nationale (APN) et aux assemblées locales (1 557 élus, 54 APC contrôlées à la majorité).
Le candidat a installé son quartier de campagne à Bir-mourad-Raïs, à Alger ; en face de la grande mosquée de la ville. Sur les affiches officielles, on voit l’homme fidèle à son image : barbe bien fournie, la tête soigneusement recouverte d’une chéchia blanche, le regard fixe, le visage serein. L’islamiste accompli est de retour. Il veut lutter en faveur d’“un avenir meilleur et une vie plus digne.� Dans un siège où règnent calme et discipline, la victoire, au soir du 8 avril, “ne fait aucun doute ; si le scrutin est libre, démocratique et transparent, nous vaincrons dès le premier tour�, assène Benkhellaf Lakhdar, un des lieutenants de Djaballah. Dès aujourd’hui, les permanences locales seront destinataires d’un million et demi d’exemplaires du programme électoral du candidat, 300 000 posters, trois millions de prospectus et dépliants. Le comité de campagne, dirigé par trois cadres, Lakhdar Benkhellaf (vice-président de l’APN), Abdelghafour Saâdi et Djahid Younsi, va aussi publier un journal en couleur à distribuer aux militants et aux électeurs. El-Islah a commencé la préparation de la campagne présidentielle en janvier 2003, avec le renouvellement de ses structures et la mise en place de plusieurs commissions, dont une exclusivement chargée des femmes (au niveau de la direction siège une secrétaire nationale aux femmes). Durant sa campagne, Abdellah Djaballah mettra l’accent sur le “mandat noir du président Bouteflika et proposera l’alternative.� “Nous partons avec un esprit de vainqueur, explique Benkhellaf, car nous sommes les mieux indiqués pour gouverner les Algériens. Aux dernières élections législatives et locales, nous avons récolté pas moins de 1 200 000 voix.� Selon lui, des tentatives de fraude ont déjà été déjouées. “Comment peut-on expliquer qu’à l’APC algéroise de Sidi M’hamed le nombre d’électeurs soit passé, entre 2002 et 2004, de 18 000 à 90 000 ? Et qu’à Constantine, l’administration ait avancé le chiffre de 454 000 alors, qu’en réalité, il n’y en a que 309 000 ?� Le corps électoral, insiste El-Islah, ne peut en aucune manière dépasser les 15 millions de votants, “comment ose-t-on parler de 17 millions ?� Lakhdar Benkhellaf reste confiant.
L. B.