C'est la rentrée ! Il ne sera donc pas question de l'école. Il serait, en effet, inopportun d'aborder l'institution scolaire dans son aspect qualitatif alors que l'on n'est même pas assuré de réussir sa rentrée matérielle. Ce n'est donc point le moment de s'interroger sur le sort des recommandations de la "conférence nationale" de l'éducation ou sur la manière de rattraper les "déformations scolaires" de la "réforme" Benbouzid. Point le moment, non plus, d'examiner le profil de compétence du personnel enseignant que le nouveau mode de recrutement, ratissant large, n'a certainement pas manqué de redessiner. Non, il faut parer au plus urgent : il n'est pas certain d'assurer à chaque élève une place dans un établissement, à moins de surcharger un grand nombre de classes. Nous voici donc renvoyés à des difficultés d'un autre âge. Visiblement, le gouvernement ne maîtrise ni ses prévisions d'infrastructures ni leurs délais de réalisation. Sans doute, les parents appréhendent-ils pour leurs enfants les conditions d'une scolarisation menacée par la surcharge des classes, le relâchement dans les critères de recrutement des professeurs et les promesses de grève des enseignants. Mais, ces parents-ci, ceux des élèves de l'école publique, de l'école des "masses", ne sont pas les seuls à galérer en cette rentrée scolaire. Cela ne les consolera pas pour autant, mais l'école des bien lotis, le "lycée français", pour ne pas le nommer, se voit, à son tour, de moins en moins en mesure de répondre à une sollicitation surabondante. Le lycée Alexandre-Dumas, qui assure tous les paliers du cursus scolaire, subit, effectivement, une grande pression, qui ne semble pourtant pas se justifier par un accroissement particulier du nombre d'expatriés français en Algérie. Non, ce sont nos "élites", en termes de pouvoir et de fortune, qui harcèleraient l'établissement en vue d'y placer leur descendance ! Les moins chanceux, quant à eux, se rabattent sur la filière "spécifique" — qui prépare au baccalauréat français — du lycée Bouamama, ou encore sur l'une de ces rares écoles privées qui dispense le même programme. Et, étrangement, ceux qui ont le pouvoir, ont aussi les moyens d'offrir à leurs enfants "l'exil scolaire", qui les mettra définitivement à l'abri des imperfections de la scolarité locale. Aujourd'hui, jour de rentrée, le pouvoir est affairé à "caser" chacun de nos enfants dans un emplacement pédagogique, quitte à les entasser. Avant de retourner à sa lente réflexion sur une réforme scolaire qui, de l'aveu même de l'encadrement de l'institution, continue à perpétrer ses dégâts. Et, aujourd'hui, légions de nos dirigeants et élites s'affairent, de leur côté, à assurer à leurs enfants les conditions d'une scolarité "de qualité", c'est-à-dire étrangère. La possibilité de ce recours extra-système constitue l'une des explications, si ce n'est l'une des raisons, de ce maintien de l'Ecole algérienne dans son sous-développement pédagogique, scientifique et culturel. La rente se charge de financer cette différence de traitement : à nous l'école "authentique" des "constantes" ; à eux, les écoles du monde ! Pour quelle raison ces derniers seraient-ils alors pressés de réformer l'école des "masses" ? M. H. [email protected] Nom Adresse email