Résumé : Le retour en France sera douloureux pour Meriem et son père. Ce dernier reprend son travail sans trop d'entrain, tandis que la jeune fille poursuit son cursus scolaire, en tentant de donner le meilleur d'elle-même afin d'apaiser le chagrin de son paternel. Un coup à la porte la fera sursauter. C'était la voisine qui venait lui proposer de déjeuner avec ses enfants. Meriem refuse poliment. La voisine insiste. La jeune fille argumente son refus par le fait qu'elle s'était déjà préparé un sandwich. Hawa s'approche d'elle et lui demande : -Ta belle-mère Houria n'est pas rentrée avec vous ? -Non. Elle est restée au village. -Pourquoi ? Elle ne voulait pas rentrer en France ? -C'est mon père qui ne le voulait pas. -Il aurait dû la ramener. Maintenant qu'elle n'a plus que le petit Aïssa, elle va se sentir bien seule. Meriem ne répondit pas. Elle connaissait la curiosité maladive de leur voisine et s'abstenait de donner plus de détails. -Tu ne dis rien Meriem ? -Je ne sais pas quoi te dire tante Hawa. Ces affaires d'adultes ne me concernent pas. -Comment cela ? Tu es assez grande maintenant pour comprendre ces choses qui se passent entre tes parents. Tu aurais pu intervenir auprès de ton père pour qu'il ramène Houria. Au lieu de manger ce sandwich froid, tu aurais eu droit à un véritable repas ma fille. -Je ne m'en plains pas trop. Le soir, lorsque mon père est là, nous cuisinons ensemble. -Mais... Et tes études ? -Je m'en sors très bien. Ne t'en fais pas donc pour moi. Un peu déçue de n'avoir pas satisfait toute sa curiosité, la voisine quitte les lieux en haussant les épaules. Meriem récupère quelques affaires et prend son cartable pour se rendre à l'école. Quelques jours passent. Amar travaillait sans trop d'entrain. L'habitude prenait le relais. Il était devenu encore plus taciturne qu'auparavant et ne puisait son courage que dans la présence de sa fille Meriem. Cette dernière d'ailleurs le ressentait et faisait tout ce qu'elle pouvait faire du haut de ses douze années pour voir son père un peu plus heureux. Hélas ! Elle avait l'impression que tous ses efforts étaient vains rien qu'à la vue de la ride soucieuse qui ornait le front de son paternel. Elle comprenait fort bien son anxiété. Elle-même trouvait souvent du mal à s'endormir en repensant à ses deux sœurs décédées. Melaaz était encore bébé, mais Ghania avait joué avec elle. Elles s'étaient côtoyées et s'étaient rapprochées l'une de l'autre alors qu'elles se trouvaient en France et loin de Houria. Puis ce rapprochement était devenu un lien très solide. Il y avait des nuits où Meriem n'arrivait pas à trouver le sommeil. Les yeux fixant le noir, elle repensait aux derniers événements qui avaient frappé la famille. Son pauvre père avait déjà bu le calice jusqu'à la lie depuis son tendre âge et continuait à affronter ces durs coups du destin. Pourquoi la poisse leur collait-elle ? Pourquoi ne pouvaient-ils vivre heureux et loin de tout aléa à l'instar de toutes ces familles qui les entouraient ? Son petit cœur bondissait dans sa poitrine. Elle réprimait souvent ses crises de larmes, de crainte que son père ne l'entende. "Surtout pas", se disait-elle, car la vue de ses larmes ravivera ses douleurs. Son père avait trop souffert et souffrait encore. Que pourrait-elle faire pour le soulager de ce fardeau qu'il portait sur le cœur depuis le décès de Melaaz et maintenant de Ghania ? Elle tournait et retournait cette question dans sa tête et s'endormait en rêvant d'un avenir meilleur. Seules peut-être ses études pourraient lui redonner l'espoir et le courage de continuer sur ce chemin parsemé d'embûches qui était le lot de sa famille. Les vacances d'hiver approchaient à grands pas. Son père la préparait déjà à ce petit voyage qu'elle devrait faire au bled. Elle passera les deux dernières semaines de l'année à la ferme auprès de Houria et du petit Aïssa. Meriem n'était pas emballée par cette séparation avec son père, d'autant plus qu'elle allait devoir affronter le regard malveillant de sa belle-mère qu'elle redoutait. (À suivre) Y. H.