Diplômée de l'Ecole des beaux-arts de Azazga, Taous Ben Amara a exposé dans plusieurs villes du pays et a animé des ateliers d'arts plastiques. Ses créations s'inspirent "du tatouage et des couleurs de tapis amazighs, aux motifs très parlants". Beaucoup d'artistes n'ont pas la chance d'être médiatisés. Tranquillement, ils travaillent à l'ombre de leur solitude qui renforce leur inspiration. Ils savent que l'art est avant tout un dialogue avec soi-même, comme celui du poète avec son âme. Une poésie par-ci, un tableau par-là, un livre de temps en temps, une qacida ou un achewiq au gré d'un éclair et ils s'empilent jusqu'au jour où des amateurs du beau les découvrent. Le brouillard se dissipe, laissant place à la lumière des œuvres. Il faut de la chance pour croiser Taous Ben Amara entre Aïn El-Hammam, Alger et Tizi Ouzou. Sa grande discrétion ne facilite pas la tâche. Mais lorsqu'on y arrive, on s'émerveille devant ses toiles inondées de couleurs, celles du Djurdjura, des Aurès, du Sahara, de l'Afrique même. Des images chaudes représentant l'art des contrées montagneuses où les habitants gardent jalousement les symboles de leurs racines. "Je peins ma culture, mon identité s'exprime dans mes peintures, je peins ce que je représente, ce que je suis", affirme Taous Ben Amara qui confirme son fil conducteur : "Ma première inspiration, c'est celle des couleurs ; je suis coloriste avant tout. Cela imprègne ma peinture. En Kabylie, tout est très coloré. Mon autre inspiration originelle vient du tatouage et des couleurs de tapis amazighs, aux motifs très parlants." De fait, ses toiles sont bariolées de tous les signes décoratifs que l'on trouve habituellement sur les bijoux, tapis, poteries et autres objets de l'artisanat amazigh. Elle les considère comme des éléments d'une langue qui transmet, de génération en génération, des messages culturels profonds. Concernant son courant de peinture, Taous Ben Amara indique : "Je suis plus dans l'impressionnisme, mais avec un nouveau style. Sans être la seule à le pratiquer, j'ai ma propre touche qui fait la différence." En plus du don, l'art de la peinture elle l'a appris à l'Ecole des beaux-arts de Azazga. Malgré une histoire de diplôme non reconnu après 4 années d'études, Taous Ben Amara y a appris les techniques qui lui ont permis de maîtriser l'expression de ses inspirations. Les œuvres artistiques ont vocation à se mesurer aux goûts et à l'appréciation du public. Pour les artistes-peintres, les expositions en sont un moyen. Taous Ben Amara a participé à quelques-unes aux quatre coins du pays (Ouargla, Tébessa, M'sila, Alger...). Son art, elle l'a pratiqué aussi dans la transmission du savoir : "J'ai animé des ateliers et j'ai travaillé dans des écoles comme animatrice des arts plastiques, j'ai beaucoup travaillé avec les enfants." Quand on l'interroge sur ses projets, l'artiste exprime son pessimisme : "Je ne crois pas que l'Algérie soit un pays qui encourage les artistes..., surtout dans le domaine de la peinture." Cela ne la décourage pas : "J'ai tracé un chemin propre à moi et je le suivrai. Pour commencer, je pense à un ouvrage de synthèse sur mon propre travail." En attendant, Taous Ben Amara continue de peindre, de lire et de rêver à une vie dans un endroit "qui lui ressemble", peut-être un lieu de sérénité, de tranquillité d'esprit, de bonheur de penser, de créer, d'afficher et d'assumer librement ses œuvres. ALI BEDRICI