Les propos tenus par le ministre, jugés arrogants, ont profondément choqué l'opinion publique. À une semaine du référendum, M. Khaldi met le gouvernement dans la gêne. Parfois, il suffit d'une courte phrase de quelques secondes pour provoquer l'écroulement de tout un édifice qu'on s'emploie à construire avec énergie. C'est ce qui est arrivé au ministre de la Jeunesse et des Sports, Sid Ali Khalid, jeudi passé, lors d'un meeting de campagne pour la révision constitutionnelle. Peu habitué à l'animation politique, aux joutes oratoires et leurs conséquences, M. Khaldi s'est laissé aller dans un discours incontrôlé en conviant ceux qui seraient opposés au projet constitutionnel de "changer de pays". "C'est pour la première fois que nous avons introduit le 1er Novembre dans la constitution et celui qui n'est pas content n'a qu'à changer de pays" ! Un populisme de mauvais goût. Une sortie de route qui a choqué l'opinion publique au plus haut point. Aussitôt, des vidéos sont postées sur les réseaux sociaux, la toile s'est enflammée par une colère citoyenne virale. Le ministre s'est vite rendu "célèbre" en se retrouvant au centre d'un psychodrame politique qu'il a lui-même provoqué. De nombreux citoyens, d'acteurs politiques, des animateurs de la société civile et nombre d'intellectuels ont dénoncé "un dérapage verbal teinté d'arrogance". Une indignation générale. Le ministre, pur produit de l'appareil bureaucratique national, s'est pris une volée de bois vert. Certains internautes sont allés fouiner dans les archives pour rappeler au ministre ses états de service auprès d'Ahmed Ouyahia et d'Abdelmalek Sellal à la chefferie en exhibant des photos de lui aux côtés des deux ex-Premiers ministres, aujourd'hui condamnés pour des faits de corruption. D'autres ont rappelé au locataire de la tour du 1er Mai (siège du ministère) que "quand les citoyens ne sont pas contents, c'est à lui de partir et non l'inverse". Des voix demandant son limogeage se multiplient. Aussi choquants que maladroits, les propos du ministre de la Jeunesse ont soulevé une bonne partie de l'opinion contre lui-même et par ricochet contre le projet qu'il est venu défendre. Croyant bien faire, Sid Ali Khaldi a créé un malaise au sein du gouvernement. Il a mis tout le monde dans la gêne jusqu'à la présidence de la République, nous assure-t-on. Et ce dans un contexte qui recommande plutôt de la prudence que de l'arrogance. De la modestie à l'insolence. Il ne fait aucune doute que la cote de ce "jeune" ministre, dont on dit qu'il est "promu à un bel avenir politique", a pris un coup dur. Il serait difficile de le garder pour longtemps au gouvernement. Alors que l'Exécutif tente de difficilement de convaincre les Algériens de se rendre aux urnes le 1er novembre pour plébisciter la révision constitutionnelle proposée à un référendum populaire, le MJS, par sa sortie, risque de convaincre du contraire. De toute évidence, ses propos ont pris l'allure d'un discours repoussoir. Et cela à une semaine seulement du la date fatidique. Ayant pris conscience de l'ampleur des dégâts politiques causés par ses propos ou peut-être parce qu'il "s'est fait taper sur les doigts", Sid Ali Khadli s'est fondu, hier, d'une déclaration – vidéo – dans laquelle il a tenté de se justifier. "J'ai suivi la dimension regrettable des propos tenus dans le contexte de ma défense de l'introduction du 1er Novembre dans la constitution. Mes propos étaient destinés à ceux gênés par la proclamation du 1er Novembre, mais je suis convaincu que tout le peuple algérien est soudé autour de cette proclamation, il n'y a aucun doute. Je m'excuse auprès de ceux qui ont mal compris mon propos sorti de son contexte...", s'est-il justifié. En somme, la sortie malheureuse du ministre de la Jeunesse et des Sports, un jour seulement après l'attitude "scandaleuse" du wali d'Oran face à une enseignante qui lui expliquait l'état délabré de son école, révèle un comportement arrogant et méprisable d'un certains nombre de hauts fonctionnaires qui pensent se permettre tout, y compris l'insulte à l'égard des citoyens. C'est le propre d'une culture dominante chez des responsables qui n'ont jamais quitté leur tour d'ivoire dans laquelle ils étaient propulsés grâce aux procédés de parrainage. En plus de l'indignation que provoquent des propos comme ceux tenus par le ministre, et d'autres biens avant lui, c'est l'abîme qui frappe l'autorité de l'Etat et ses institutions.