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"La Covid-19 a eu des conséquences collatérales néfastes sur les patients atteints du cancer du sein" Pr MOKHTAR HAMDI CHERIF, DIRECTEUR DU REGISTRE DU CANCER DE SETIF
Directeur du registre du cancer de Sétif (premier registre de tumeur au niveau national) et coordinateur des registres du cancer de l'Est et épidémiologiste de renom, le Pr Hamdi Chérif tire la sonnette d'alarme quant à la nécessité d'un diagnostic précoce et d'un suivi correct des protocoles thérapeutiques pour une meilleure qualité de vie. Liberté : Pouvez-vous établir un tableau sur le cancer du sein, ainsi que sur les cancers les plus répandus en Algérie ? Pr Mokhtar Hamdi-Chérif : Les cancers du sein qui occupent toujours la première place, sont suivis des cancers colorectaux, des cancers de la thyroïde et du col utérin. Ils représentent presque la moitié des cancers féminins, avec une particularité épidémio-démographique de cette tumeur, à savoir le cancer du sein chez la femme jeune en Algérie. L'augmentation est qualifiée d'exponentielle. L'incidence de ce dernier est de 7% par an. En Algérie, on les estime à 14 000 nouveaux cas en 2019 sur les 45 000 nouveaux cas toutes localisations confondues chez les deux sexes. Dans la wilaya de Sétif, on a enregistré pas moins de 700 nouveaux cas en 2019. Durant la période de la Covid-19, il a été constaté des conséquences collatérales néfastes qui ont surgi. Quelles sont vos premières constations durant cette période et les lectures préliminaires que vous avez faites ? Je préfère commencer par la célébration d'Octobre rose. Cette année, la célébration a coïncidé, et malheureusement pour la deuxième année consécutive, avec la pandémie de Covid-19. Cette dernière a eu en Algérie des conséquences collatérales néfastes sur les patients atteints du cancer du sein, ainsi que de tous les cancers. En effet, il a été constaté que la plupart des patients ont abandonné ou n'ont pas respecté les protocoles thérapeutiques, d'une part en fuyant les hôpitaux avec cette crainte exagérée de la contagion hospitalière et, d'autre part, par l'inaccessibilité aux services de santé liés à certaines contraintes du nouveau coronavirus, dont la fermeture de certains services. Cette collatéralité Covid-19 cancer va certainement augmenter le nombre de cas qui vont arriver à un stade tardif de la maladie, déjà élevé avant la pandémie et avoisinant les 60%. Nous estimons aussi que ce nombre ira crescendo durant les prochains mois et passera certainement à plus de 70%. Cela se répercutera sur la survie qui va diminuer. Il faut s'attendre à ce que la mortalité augmente durant les prochaines années.
Que préconisez-vous pour une prévention plus efficace ? Je pense qu'il faut redoubler d'efforts quant à la prévention car le nouveau coronavirus peut être considéré comme un hyperfacteur de risque des cancers du sein. En effet, le confinement a engendré des habitudes physiques et alimentaires de sédentarité et d'obésité, connues pour leur haut degré dans la chaîne de causalité des cancers. Devant cette situation épidémiologique durable, nous devons nous adapter pour sensibiliser davantage et tous azimuts les patients pour un retour aux services de santé, afin d'assurer, en cas de cancer, un diagnostic précoce et un suivi correct des protocoles thérapeutiques pour une meilleure qualité de vie. Il faut un retour à une hypersensibilisation adaptée à la Covid-19 destinée, notamment, aux femmes âgées de 40 ans et plus, tout en insistant sur le dépistage.
